Engageons-nous contre le national-populisme hongrois !

, par Cédric Le Pohon

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Engageons-nous contre le national-populisme hongrois !
Membres du Jobbik Flickr Licence creative commons

Enfin. Il était temps. Tandis que la Hongrie de Victor Orban adopte à tour de bras depuis 2008 des lois plus liberticides et antidémocratiques les unes que les autres et que l’extrême-droite entre dans des gouvernements comme en Grèce, les opinions publiques européennes, trop occupées par la crise économique, semblaient s’être mis en veilleuse. En ce début d’année 2012, à l’heure où la nouvelle Constitution hongroise entre en vigueur, un semblant de début de frémissement démocratique est perceptible dans les médias et les politiques.

Point de réaction soudaine et scandalisée cependant, comme lorsque Haider était parvenu au pouvoir en Autriche (il ne faut tout de même pas exagérer...) mais simplement une sorte d’interrogation de nos opinions publiques, doublée d’un malaise et d’une gêne certaine d’une partie de notre classe politique.

Car il est toujours très simple de donner des leçons de démocratie à nos proches voisins européens situés en-dehors de l’Union européenne lorsqu’ils sont plongés dans la dictature depuis plus de 20 ans. Je pense évidemment à la Biélorussie de Loukachenko, érigée d’ailleurs en totem par les Jeunes Européens (avec raison). Parce qu’il ne coûte rien politiquement et économiquement de taper sur un système archaïque, aux structures datées de l’époque communiste.

Mais la lutte pour la démocratie et les droits de l’homme semble être une lutte sélective pour les Européens. Elle n’est soudainement plus si importante dans un certain nombre de cas. Passons sur la frilosité à critiquer les partenaires commerciaux majeurs (Chine, Russie) ou la difficulté à prendre le tournant du Printemps arabes par crainte des vagues d’immigration. Ce qui me préoccupe aujourd’hui, c’est lorsque des dégradations démocratiques ont lieu au sein même de l’Union européenne et que des apprentis dictateurs tels que Victor Orban agissent avec la passive complicité de la famille politique dominante au Parlement européen, à savoir le PPE.

Et c’est alors que tout devient compliqué. On réfléchit, on s’interroge, on gesticule, on relativise, on examine. La Commission européenne, du haut de son expertise technicienne, s’indigne ces temps-ci de la fin de l’indépendance de la banque centrale hongroise. Grands dieux, quelle audace ! Du reste, la fin des médias libres, la criminalisation rétroactive de l’opposition socialiste, la mise au pas de la culture, la fin (de fait) du pluralisme politique de part les bidouillages incroyables de la loi électorale, l’introduction mégalomane, nostalgique et passéiste de la « grande Hongrie » dans les livres d’histoire et dans tous les lieux publics, la bénédiction divine de la Constitution au détriment de centaines de minorités religieuses, la tolérance de ratonnades de Roms par des milices spéciales, la xénophobie et l’europhobisme ambiant entretenus par les néonazis... Tout cela n’inspire que quelques protestations sourdes de la part de Bruxelles.

Du reste, même parmi les europhiles les plus convaincus, censés avoir un engagement et un positionnement politique fort, il y a division et hésitation entre immobilisme et condamnation. A en croire Jean-Dominique Giuliani, président du Conseil d’administration de la fondation Robert Schuman, « la démocratie n’est pas en danger en Hongrie ».

Car le malaise est là. Il a été mis en évidence hier de façon remarquable par Daniel Cohn-Bendit (Verts) et Guy Verhofstadt (libéraux) : le parti populaire européen (PPE), qui regroupe en son sein l’ensemble des droites modérées et europhiles, UMP et CDU compris, n’osent bouger car il est vice-présidé par un certain M Orban. Tiens, ça alors ! Voilà qui va rendre difficile la possibilité de brandir la menace de l’article 7 du Traité de Lisbonne (article qui donne la possibilité de priver de droit de vote au Conseil un Etat qui ne respecterait pas les traités).

Dans ce contexte politique bloqué (même la critique des socialistes est tiède), la balle est, à mon sens, dans le camp de la société civile pro-européenne, démocrate et des associations de défense des droits de l’homme. La pression doit venir des citoyens. Les enjeux sont aussi importants que la crise économique actuelle. La lutte contre les populismes au sein même de l’UE est d’autant plus fondamentale que les valeurs à défendre, de démocratie, de droits de l’homme, sont évidentes. L’initiative doit, je pense, venir des Jeunes Européens à travers une action européenne coordonnée : tractages, dépôts de bougies devant la Commission européenne et ambassades hongroises... Leur action et leur détermination pourraient de plus avoir un effet d’entraînement sur le Mouvement européen et sur l’ensemble de la mouvance européenne.

En tant que Président de section locale mais avant tout en tant que simple citoyen européen, j’en appelle donc à la responsabilité et au courage politique. Bien au-delà de la défense de la démocratie en Hongrie et partout en Europe, c’est notre identité et notre honneur même d’Européens qui sont en jeu.

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Vos commentaires
  • Le 20 janvier 2012 à 09:42, par laurent bonsang En réponse à : Engageons-nous contre le national-populisme hongrois !

    la situation en Hongrie doit nous faire nous engager car il est totalement innaceptable que les valeurs de la construction européenne, celles proclamées par le CEDH, par la charte des droits fondamentaux, soient ainsi bafouées. le nationale populisme a trouvé un exemple en Hongrie, un exemple qui donne froid dans le dos mais dont la coueur avait été donnée dès le départ par V Orban qui parlait de « révolution nationale ». en France l’expression de « révolution nationale » a un très lourd passé. mais cet engagement ne doit pas être uniquement contre le national populisme en Hongrie car s’il n’y avait qu’en Hongrie qu’existait ce danger. regardons en France notamment ; et n’oublions pas qu’il existe un lien étroit entre les discours de haine, d’exclusion, des mots qui peuvent blesser, comme ceux de Jobbiok, et le fait que fin juillet un norvégien, national populiste a appuyé sur la détente avec le carnage que nous savons. la peste brune revient de plus en plus...

  • Le 20 janvier 2012 à 12:03, par Cédric Le Pohon En réponse à : Engageons-nous contre le national-populisme hongrois !

    Lorsque je parle du « malaise mis en évidence hier », il s’agit en fait des débats parlementaires du 18.01.12 : http://www.lemonde.fr/europe/​article/2012/01/19/​cohn-bendit-s-en-prend-a-orban-​et-la-constitution-stalinienne​-de-la-hongrie_1631821_3214.ht​ml

  • Le 20 janvier 2012 à 13:58, par jpbvb En réponse à : Engageons-nous contre le national-populisme hongrois !

    Les contre-pouvoirs verrouillés l’un après l’autre en Hongrie. La personnalité inquiétante de Victor Orban. Un scénario politique dangereux. Une Europe qui réagit frileusement.

    Une crise économique profonde engendre ce genre de dérives. La bonne réaction sera de tout faire pour améliorer le pouvoir d’achat et l’emploi prioritairement dans les pays où ce genre de dérives s’accentue.

  • Le 21 janvier 2012 à 13:23, par Ronan En réponse à : Engageons-nous contre le national-populisme hongrois !

    Vu la situation actuelle en Hongrie, il serait peut-être en effet bien et nécessaire d’envoyer sur place, comme s’apprête à le faire le Parlement européen, d’ailleurs (à moins que cela ne soit déjà décidé à cette heure...) la fameuse commission d’enquête tant demandée pour examiner sur le terrain ce qu’il s’y passe vraiment. Nul doute que cette fameuse commission trouvera très certainement plus de facilité à travailler en Hongrie qu’elle n’en aurait trouvé en Birmanie et en Syrie (entre autres, et par exemples...). Et ce, afin de savoir s’il faut activer (ou non) les dispositions du fameux article 7 des traités européens.

    Car, de deux choses l’une : soit (1) l’opposition hongroise nous raconte des « carabistouilles » tout de même assez énaurmes (ce dont je doute, tout de même, au vu de nombreux témoignages qui s’expriment à ce propos...), soit (2) le PPE devrait nourrir une honte profonde à entretenir un tel soutien à l’égard du gouvernement et du parti de Viktor Orban (point de vue vers le quel j’aurais plutôt tendance à pencher...).

    Néanmoins, tout de même, certains arguments utilisés me laissent tout de même perplexe : dans cette affaire hongroise, il existe suffisamment d’arguments fondés et rationnels (ex : trafficotage de la loi électorale et charcutage à convenance des circonscriptions électorale...) (ou récentes « lois » sur les médias...) (ou récentes « modification » des modalités du contrôle de la constitutionnalité des lois...) pour « charger » Viktor Orban et contester utilement son pouvoir (et à raison), sans qu’il soit pour autant nécessairement utile d’utiliser à ces fins des arguments purement rhétoriques et contestables, à la limite du péché véniel (voire du grand n’importe quoi).

    Vouloir, comme dans l’un des commentaires ci-dessus, absolument dresser un parallèle entre l’actuel pouvoir hongrois et la France de Vichy (tout le monde aura compris ?!) sous prétexte que l’un et l’autre ont - un jour ou l’autre - employé l’expression « Révolution nationale », c’est too much. (Nb : il en connaît quoi, de la France de Vichy, Viktor Orban ?! Sait-il seulement que « son » expression y a effectivement été employée, mais dans un tout autre contexte ?!).

    Même chose, et « too much » également : quand Danny Cohn-Bendit prétend (dans un discours prononcé au parlement européen, pas plus tard que cette semaine...) qu’il a en Hongrie de la « famille » (?!) (alors que tout le monde sait que ce n’est factuellement pas le cas... à moins de parler là de « famille (très) élargie »...), et que ceux là ont « peur » (rien que ça...).

    Soyons sérieux, cinq minutes : on ne combat pas un régime qui dérape par des lois inopportunes, voire démocratiquement scélérates (car elles le sont, pourquoi pas...), en tombant également dans des outrances qui, assurément, décrédibilisent la critique ! Pas non plus en mentionnant à tout bout de champ les « heures les plus sombres de notre histoire » et la « peste brute » à chaque flambée national-populiste (ce qui, par trop de systématisme et de rhétorique inopportune, ferme la réflexion avant même qu’elle ait commencée et interdit, par cela même, tout examen rationnel et sérieux des réels problèmes tels qu’ils sont véritablement...).

    Enfin, si l’on déplore que « fin juillet un norvégien, national populiste a appuyé sur la détente avec le carnage que nous savons », il serait peut-être bon de rappeler que pour « national-populiste » qu’il soit en effet, c’est surtout et avant toute chose en militant « identitaire » d’une certaine Europe (bien blanche, prétendument aux racines chrétiennes, bien que de comportement fort païen et pour le moins déchristianisé...) que, tel le Maxime Brunerie d’un autre épisode (lui aussi militant « identitaire » d’ailleurs), ce triste personnage a agit.

    On aimerait donc que la thématique de l’ « identité européenne » (car c’est de la dynamite) soit donc maniée avec prudence, jusque dans les colonnes du Taurillon notamment... (précisément parce que c’est de la dynamite...). Car c’est bien au nom de ce « jus de crane » mortifère qu’est l’ « identité » sous toutes ses formes que l’on sépare, que l’on exclut, et - éventuellement (plus rarement, heureusement...) - que certains excités tuent.

  • Le 21 janvier 2012 à 21:07, par Giroud Bernard En réponse à : Engageons-nous contre le national-populisme hongrois !

    Il ne suffit d’afficher des gros bras ou de se couvrir de belles casquettes, pas plus que de faire porter le drapeau par une garçon nette bien encadrée pour régler des problèmes de pauvreté ou de mal-vivre ; Il ne suffit pas de crier sa colère, de se mettre en bataille, et de casser ce qu’ont fait les parents pour croire que l’on va sortir de l’ornière. Il ne suffit de penser que l’on est les plus forts, de se priver de ceux qui pensent autrement et de rejeter l’idée que l’on ne comprend pas, pour aller vers des jours meilleurs ; Il semble bien que ce soit le contraire, qu’aient trouvé les modèles ou les expériences d’un passé encore pas si lointain. Il faudrait rappeler à ceux qui sont tenté par des discours de haine, d’orgueil, ou de séparation, que si eux ne semblent pas trouver de porte de sortie dans notre Europe, pour entrer dans un nouveau monde, il n’en est pas de même pour bien plus grands et bien plus forts que nos petits pays. Même si les gros bras batailleurs voulaient en découdre avec voisins ou opposants, il faudrait rappeler à leurs petites cervelles à casquettes militaires que d’énormes moyens lointains et précis peuvent en quelques secondes les jeter en dehors du grand jeu, eux et toutes leurs cliques. Personne ne permettra que l’incendie ne s’allume, et la crainte de Dieu, a toujours été le commencement de la sagesse. Si l’on parle donc de sagesse, et qu’il faille recourir à ses voies, je crois qu’il serait bon pour tous et pour chacun, de chercher à comprendre comment retrouver les chemins de concorde. Comme toujours, la nature a horreur du vide. Il faut bien reconnaitre que les déséquilibres, les trop grandes différences, les difficultés journalières pour subvenir à leurs premiers besoins, pour nombre de nos concitoyens permet à la peur, cette gangrène de l’esprit, cette peste, de se développer. Elle est mauvaise conseillère. Mais la question est : Ou aller, comment faire, à qui faire confiance ? Faire confiance au meilleur ! Comment reconnaitre ce meilleur, à travers tous ces brouillards du mensonge ? Il nous faut chercher, en premier lieu, le meilleur témoin des vertus exemplaires, celui qui les applique pour lui ; Celles-ci sont bien connues, et enseignées depuis longtemps ; Elles constituent, de toujours, le phare le plus sur, dans la tempête. En second lieu il faut user d’intelligence, pour « remettre à l’heure », sans faiblesse, certaine pendules du gaspillage de l’inefficacité ou de l’outrance financière. Enfin il faut compter aussi sur la bienveillance du ciel "Aides-toi, et le ciel t’aidera". Autrement dit, ne croit pas que tu sois seul, à vouloir faire bien, ou mieux : Fais confiance à ceux que tu connais pour être digne de foi ; Élargis ton cercle à la mesure que ton cœur et ta raison te le permettent ; Tu rencontreras le courage et l’intelligence ; Tu rencontrera la force et la connaissance ; Et tu rencontreras surement, si tu persévères, le chemin qu’éclaire l’étoile, celle qui mène à la réconciliation, et aux projets que l’on peut alors, réaliser en commun. Rappelle-toi ; Ceux qui te parlent de ces projets que l’on réalise en commun, et qui les appliquent à la mesure des besoins, ceux-là sont sur le bon chemin.

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