Les leçons pour l’Europe à retenir des élections en Italie

, par Fabien Cazenave

Les leçons pour l'Europe à retenir des élections en Italie
Carte de l’Italie en Europe - Source : Wikicommons par NuclearVacuum

Les résultats des dernières élections législatives en Italie sont marqués par le sceau de la stupeur. Aucune réelle majorité n’apparaît et les deux candidats les plus populistes arrivent en deuxième et troisième position.

Non seulement Beppe Grillo et Silvio Berlusconi ont eu des discours irraisonnés pleins de promesses populistes mais ils ont fait de l’Europe la cible prioritaire de leur colère. Les électeurs italiens les ont suivi et ont laissé de côté le champion des milieux européens Mario Monti. Doit-on en conclure que l’Europe était la principale raison du vote des Italiens ?

Le rejet d’une Europe trop compliquée

Comme en 2005 en France, les électeurs ont voulu dire un grand basta à une Europe qu’ils ne comprennent plus. Comme en France, l’Europe a été le centre des questions électorales et les discours eurosceptiques ont été bien meilleurs que ceux des pro-Européens. Cette fois-ci, l’Europe paye un discours considéré comme trop favorable à l’austérité au détriment des citoyens. Bien sûr, il y a un côté populiste à expliquer l’Europe comme étant le défenseur des banquiers, des élites, des marchés et des intérêts politiciens. Cependant, les résultats de l’élection italienne démontrent que le message envoyé par le référendum de 2005 n’a pas été compris par la classe politique en Europe.

Le fait que nos dirigeants nationaux se concertent au niveau européen pour lutter contre le déficit est une bonne chose. Mais le manque de perspectives politiques fortes et ambitieuses est aujourd’hui la vraie faiblesse du discours européen. Le dernier budget européen trouvé au bout de la nuit lors du dernier Conseil européen à Bruxelles en est l’éclatant exemple. On a réduit l’investissement dans l’Europe parce qu’on ne sait pas quoi faire au niveau européen pour pouvoir relancer l’économie.

Si le message envoyé aux citoyens est d’expliquer qu’on ne peut pas faire grand-chose au niveau européen parce que « c’est compliqué », il est logique que les électeurs se tournent vers ceux au discours plus simple et engagé. Même si cela est au détriment de l’idée européenne.

Mario Monti : la compétence n’est plus suffisante

Les résultats de Mario Monti lors de cette élection sont extrêmement décevants. Ne pas dépasser les 10 % alors qu’il était le président du Conseil italien en place est le signe d’un grand échec. Pourtant l’Italie avait avec lui à sa tête un homme intègre, intelligent et qui avait la confiance de ses pairs au niveau international. Nombreux seront ceux qui expliqueront que c’est un technocrate. Ceux qui ont lu son livre en collaboration avec Sylvie Goulard intitulée De la Démocratie en Europe sauront qu’il est bien plus que cela. Dans ce livre, Mario Monti explique très clairement que toute décision politique ne peut se faire qu’en fonction du bénéfice qu’en tireront les citoyens. On est bien loin de l’idée habituelle des technocrates. Du reste, son bilan à la tête de l’Italie après la dévastation des comptes publics due au précédent gouvernement Berlusconi a été remarquable. Mais pas suffisant pour les électeurs.

Quelles leçons devons-nous alors en tirer ? Tout d’abord, que les pro-européens doivent investir les têtes de liste des partis politiques. Tous nos leaders politique sont aujourd’hui des pro-européens tièdes. Ils font l’Europe par raison, ils la considèrent plutôt comme une contrainte que comme un véritable moyen d’action. L’expertise n’est plus suffisante. Il faudra donc pour les prochaines élections européennes de 2014 que les partis politiques mettent en position éligible non pas les experts de l’Europe présents dans leur rang, non pas ceux qui ont besoin d’être re-casés, mais les porteurs du feu européen. Car face au discours populiste de l’extrême gauche ou de l’extrême droite, la première des réponses doit loger dans l’ambition pour l’Europe. Le discours raisonnable, à mi-chemin entre la préservation des intérêts nationaux et l’envie d’avancer par petits pas dans la construction européenne, ne satisfait plus les électeurs.

Deuxième leçon : il faut politiser l’Europe. À force de considérer le niveau européen comme un lieu neutre ou existerait seulement l’intérêt général européen est une fiction qui ne fait plus rêver les électeurs. En 2005 en France, les pro-européens de gauche n’ont jamais su trouver la parade à l’argument du non de gauche disant que la constitution était de droite ou néolibérale. En Italie en 2013, l’Europe de Bruxelles ne serait là que pour défendre les intérêts de l’austérité. Or l’austérité n’est pas une obligation économique, c’est un choix politique. Par conséquent, il est grand temps d’arrêter le discours d’un José Manuel Barroso nous expliquant qu’il refuse une politisation entre la droite, la gauche, le centre et les écologistes du Parlement européen sous prétexte qu’il faudrait faire cause commune face aux eurosceptiques. Cela fait des années que ce discours est en place, les porteurs de cette vision de l’Europe doivent accepter d’en constater l’échec.

Dernière leçon à tirer de cette élection italienne : les leaders des différents partis doivent permettre à l’électeur de savoir à l’avance pour quelle majorité ils votent. On ne savait pas avec qui Mario Monti allait gouverner, cela a été une des faiblesses de sa campagne. Au Parlement européen, nous nous retrouvons dans ce type de situation. En effet, du fait de la proportionnelle et du refus des partis principaux de faire alliance sur la base d’un programme commun, nous nous retrouvons avec des partis éclatés et sans majorité claire. La Commission européenne en profite pour agir dans son coin. Espérons que les partis politiques européens sauront en 2014 dessiner les contours de majorité politique claire pour les électeurs, à défaut d’une réforme électorale (compliquée à mettre en oeuvre) qui permettrait de dégager naturellement une véritable majorité. Le fait que les partis politiques européens pourront imposer la couleur politique du futur président de la Commission doit permettre de simplifier l’Europe pour les citoyens. En France, pour les élections régionales à la proportionnelle, on sait très bien qu’écologistes et socialistes gouvernent ensemble s’ils arrivent en tête. Pourquoi ne pas reproduire ce schéma au niveau européen par exemple ?

Ces élections italiennes doivent faire réaliser qu’il est grand temps de politiser l’Europe pour la rendre plus lisibles aux électeurs. Sinon nous aurons de plus en plus de mécontents à force d’aboutir à des compromis par le plus petit intérêt commun. L’Europe dans sa globalité sera jugée par les lecteurs comme responsable de ses malheurs alors qu’il s’agit avant tout du manque d’ambition de nos dirigeants nationaux qui refusent d’agir comme des dirigeants européens. Politisons l’Europe, ses adversaires le font déjà et progressent à chaque élection grâce à ça.

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Vos commentaires
  • Le 1er mars 2013 à 15:09, par L. Massimo En réponse à : Les leçons pour l’Europe à retenir des élections en Italie

    Personne en dehors de l’Italie n’a mentionné une des raisons principales du résultat des élections italiennes. M. Monti est arrivé en un peu mois d’un an à faire haïr l’Europe aux italiens qui étaient parmi les peuples les plus pro-européens du continent. Il a été certainement obligé d’augmenter les impôts pour remédier à la situation désastreuse laissée par son prédécesseur, mais cela a été fait d’une façon vexatoire et stupide. La majorité des citoyens et des petits entrepreneurs ont été accablés avec amendes et accusations exagérées. Le tout en nom de l’Europe.

  • Le 1er mars 2013 à 17:33, par Bernard Giroud En réponse à : Les leçons pour l’Europe à retenir des élections en Italie

    Au citoyen Européen, un tour d’avance !

    La zone euro nous fait la preuve que son mécanisme monétaire ne peut aller plus loin, sur son territoire, sans courir le risque de la déflagration.

    Ce mécanisme dans son état actuel ne pèse, en quelque sorte, que sur un seul plateau de la balance ; Il révèle aujourd’hui son énorme insuffisance et le déséquilibre qu’il engendre ;

    Il renforce les plus forts, qui bien sur, n’iront pas s’en plaindre..

    Dans aucun état, ni en Suisse, ni au USA, ni en France , ne vient l’idée de laisser une région dynamique faire le vide, en attirant à elle seule, les capacités financières , et les moyens de travail, du pays, sans prévoir de la part de l’organisme compétent, un rééquilibrage des régions en perte de vitesse.

    Ce n’est qu’une question de bon sens, le sens de la prudence qui ménage le potentiel, pour l’instant méconnu, ou moins visible, de l’autre ; Celui qui prendra le relais lorsque viendra son tour.

    Actuellement, nous avons dix-sept pays, dix-sept régions, dix-sept économies, dix-sept euros de valeurs différentes. Pour preuve les » marchés », qui prêtent à chacun de façon différente.

    Ne sous-estimons pas, l’inquiétude, l’absence de perspective, la colère qui grandit, à cause des tensions, à cause des distorsions.

    Les modes de vie avec leurs avantages et leurs terroirs, ont, ainsi, généré leurs propres économies de vie naturelles, souvent heureuses de leur bonheur local bien simple. Un autre type de développement, ne peut pas s’imposer trop vite, à des régions qui s’en trouvaient bien sans cela, ou ne peuvent qu’un rythme qui leur est propre, pour le moment.

    Nous ne pouvons aller plus loin sans tenir compte de réalités incontournables que sont les habitudes, les mentalités, les disciplines de vie diverses. Nous ne pouvons aller plus loin pour vivre ensemble sans établir des règles claires, qui tiennent compte de ces diversités. Ces règles de bases doivent s’imposer à tous, sous peinent de disparition rapide de ce dernier modèle européen.

    Laisser faire Les règles de l’économie libérale, telles qu’elles fonctionnent actuellement, , revient de la part des régions fortes, on le voit, à phagocyter les régions plus faibles et à faire des déserts économiques privés d’emploie, et donc de vie, sans rien remplacer.

    L’une des bonnes solutions pourrait être que chaque citoyen dans cet ensemble, actuelle zone euro, accepte des sous-ensembles aux niveaux différents ; Cette zone euro ne pourrait continuer à exister que si elle acceptait de veiller à ne pas trop rompre l’équilibre économique du sous-ensemble, ancien pays, nouvelle région, pour le moment, moins forte ou moins compétitive.

    Cette solution, passe par le contrôle régional des capacités d’échanges de nos régions-pays, capacités équilibrées par leur propre réelle production. (Et services), capacités que l’on ne dépasse pas.

    Les échanges continues, mais selon ce qu’on peut.

    Ainsi, l’on garde, tant que l’on ne peut faire mieux, une zone avec la même monnaie, mais limitée à la capacité de chacun ; Le-même modèle principe, qu’un citoyen père de famille dans son pays. Cela ne devrait pas être trop difficile à l’époque des ordinateurs.

    On en revient aux ancien temps, me direz-vous ?

    Pas tout à fait, nous avons une même monnaie, qui n’est pas tout a fait la même, mais qui permet des comparaisons, des circulations, des communications plus faciles ;

    De plus c’est un symbole, comme une sorte de direction ;

    Nous préparons ainsi, avec des garde-fous, des échanges et un développement d’avenir plus stable, maitrisé, et sous le regard de chacun, démocratique.

    Peut-être, ainsi, sous le respect de chacun, revient à terme la confiance, celle qui génère des capacités jumelées, celles qui peuvent propulser l’ensemble vers le progrès, aux lendemains tout neuf, pour des coopérations puissantes, modernes et exemplaires.

    Le frein au déséquilibre régional étant maintenant établi, vient ensuite la partie constructive.

    C’est l’honneur et l’utilité d’un politique, d’un élu, de prendre garde et de prévoir ; En gros le contraire du laisser faire ou du laisser aller financier ou sectaire ;

    Il doit conduire le faire ensemble, faire s’entendre, se comprendre les différents niveaux ; le génie du risque et de l’aventurier entrepreneur, la capacité de l’organisateur, et l’importance de la force du nombre, cette providentielle base d’appui ;

    Toutes ces intervenants sont respectables ; Ils sont utiles, Ils doivent reconnaitre leur interdépendance, se « reconnaitre », se connaitre à nouveau. ; Un peu le contraire de la lutte des classes ; Ainsi la force de la masse reconnue, d’où sort, l’aventurier moteur, (pas l’homme providentiel), permet au futur de s’inventer. Les atouts de chacun, devenus complémentaires minimisent les inévitables erreurs des essais du progrès.

    Nous ne sommes dans ces principes que dans l’application toute simple de ce qu’un bon sens millénaire n’a cessé de nous inculquer.

    Ce n’est que le schéma de l’utilité relative de chacun d’entre nous ; Une participation à laquelle chacun de nous est appelé, quelque soit son état, qu’il n’ait qu’un tout petit talent, ou qu’il en ait de bien plus grands. Comprendre parfois, que nous sommes partie de bien plus grand que son nombril, aide ici, à trouver sa place.

    Il semble donc, que nous ayons encore un peu de mal à appliquer de tels bons vieux principes. On peut être sur cependant, que si l’on veut grandir ensemble pour aller plus loin, nous devrons nous accepter tels que nous sommes ; Ainsi que la Fontaine dans sa fable, le lion sauvé par la souris, n’en faisons pas l’économie.

    Sinon nous reviendrions aux tours d’avant.

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