L’accompagnement et la reconversion des sportifs de haut niveau : la patate chaude

, par Julian Jappert

L'accompagnement et la reconversion des sportifs de haut niveau : la patate chaude

Mais pourquoi donc les idoles d’un jour sont-elles trop souvent des idoles déchues une fois leur carrière terminée ? Le constat est malheureusement unanime : les athlètes ont souvent des difficultés à combiner leur carrière sportive avec la poursuite de leurs études ou d’un travail.

Par le rayonnement qu’ils peuvent engendrer, par les valeurs qu’ils peuvent véhiculer et simplement par les droits et devoirs qu’ils ont, il est essentiel de comprendre pourquoi tant de sportifs de haut niveau rencontrent des difficultés pendant et après leur exigeante carrière.

Accompagner la reconversion

Les travaux de notre think tank mettent en exergue le fait que beaucoup (trop !) d’acteurs ont développé des dispositifs d’accompagnement et de reconversion à l’attention des sportifs de haut niveau. L’Union européenne a publié des « Lignes directrices sur la double carrière » ; le Ministère des Sports français a réalisé une plaquette informative sur ce sujet et délivre de nombreuses aides. Chaque Ministre des Sports finit par réaliser l’importance de la situation et tente de laisser sa pierre à l’édifice. La dernière en date n’est pas des moindres car elle concerne le statut du sportif de haut niveau, sujet essentiel. Le CNOSF a aussi investi cette question, à travers sa commission des athlètes de haut-niveau. L’INSEP a quant à elle fait évoluer sa vision de l’accompagnement des sportifs, en adoptant une position souple basée sur le projet de vie de l’athlète. Pratiquement toutes les collectivités territoriales offrent également des accompagnements, souvent éparses et au coup par coup…

Les aides et dispositifs existent donc (investissement financier important de l’Etat : 10 millions d’euros par an, système de primes olympiques et paralympiques, aides à la formation et aux concours avec un aménagement de scolarité et d’études, aides sociales, conventions d’insertion professionnelle pendant la carrière…) mais l’accès à l’information, première étape pour l’athlète, apparaît compliqué. La multitude des acteurs impliqués sur ce sujet semble rendre peu lisible les offres de formation et les opportunités de transition. Que faire quand la gouvernance d’un secteur met en péril un résultat efficient ? Probablement identifier et promouvoir des exemples de bonnes pratiques, pragmatiques, ayant des résultats tangibles. C’est ce que nous tenterons de faire lors de notre prochaine conférence le 7 octobre prochain [1].

Des idées, sources de simplification et d’efficacité

  Mettre en place un lieu d’information traitant de l’évolution professionnelle des SHN, regroupant toutes les informations et dispositifs existants.
  Accompagner les SHN dans la définition de leur projet personnel et professionnel. L’investissement des acteurs proches (entraîneurs, federations, écoles, organismes de formation…) étant souvent décisif, chaque athlète étant un cas particulier.
  Agir avec l’ensemble des acteurs, notamment les fédérations, qui sont les premières impliquées.
  Associer les entreprises (réserves de bonnes pratiques), car ce sont elles qui embaucheront les athlètes plus tard. Des passerelles sont à consolider entre le monde du sport et le monde de l’entreprise, afin que chacun puisse comprendre le fonctionnement de l’autre : du côté des athlètes, une plus grande anticipation de l’après-carrière est primordiale ; du côté des entreprises, un accompagnement continu et souple avant et après la carrière sportive est porteuse de sens, à la fois pour l’athlète et pour l’entreprise.
  Favoriser/rendre obligatoire la double carrière. Ses bénéfices sont nombreux : prévention du décrochage scolaire précoce, augmentation du nombre de diplômés de l’enseignement supérieur, renforcement de l’employabilité, santé, épanouissement personnel, social, exemplarité… Toutefois le chemin est encore à tracer, il n’existe que peu d’aménagements des horaires, peu d’accords formels entre le monde sportif et le monde de l’éducation et de l’emploi, peu de cadre légal ou de politique gouvernementale, aucune approche systématique s’appuyant sur des dispositifs financiers et juridiques de portée générale et durable.

Il semble donc nécessaire d’avoir une approche intersectorielle et intergouvernementale à l’échelle nationale (sport, éducation, santé, budget…) et une approche européenne en tenant compte des spécificités de chaque sport. Cette « patate » est chaude, certainement. Mais elle n’exonère pas les responsabilités de chacun. N’oublions pas que derrière ces problématiques il existe des hommes et des femmes qui rencontrent souvent de grandes difficultés.

Quelques autres exemples de bonnes pratiques en Europe

• Au Royaume Uni, le programme « Performance Lifestyle » vise à développer les compétences des athlètes de haut niveau pendant qu’ils s’entrainent, c’est-à-dire leur donner des compétences transférables qu’ils pourront utiliser dans leur vie post-sportive. Via UK Sport http://www.uksport.gov.uk/pages/performance-lifestyle/

• Au Royaume Uni, le TASS (Talented Athlete Scholarship Scheme), système de bourse qui permet de concilier sport et études. Via Sport England https://www.tass.gov.uk/pages/about-us.html

• En Allemagne : Vattenfall Sponsorship Scheme : Vattenfall est une société privée qui soutient les SHN et les jeunes talents. Des anciens champions sont les tuteurs des jeunes champions. http://corporate.vattenfall.com/about-vattenfall/sponsorship/

• En Allemagne : « German Sports Aid Foundation – Your Name for Germany » – un projet dirigé par la German Sports Foundation, qui propose aux citoyens allemands de faire un don de trois euros par mois à un athlète, pour financier leurs études et leurs entrainement.

• En Espagne, PROAD – Consejo Superior de Deportes (Ministère gouvernement) – un programme qui concerne la réinsertion des SHN dans le marché du travail. http://www.csd.gob.es/csd/competicion/01deporteAltaCompeticion/03DepAltCompet/programa-de-atencion-al-deportista-de-alto-nivel-proad/

Cet article s’inscrit dans la réflexion initiée par le think tank Sport et Citoyenneté à travers l’organisation d’une conférence sur l’accompagnement et la reconversion des sportifs de haut niveau (Angers – 7 octobre 2014). Inscriptions en ligne sur http://sportetcitoyennete.com/conference_reconversion_angers.htm

Notes

[1« L’accompagnement et la reconversion des sportifs de haut niveau », Angers, 7 octobre 2014, avec le soutien du Conseil Général de Maine-et-Loire, de la Ville d’Angers, du fonds de dotation Mécèn’elite Anjou, d’Opcalia Pays de la Loire et de Scania

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