L’enjeu Ukrainien, au cœur de la crédibilité Européenne face à son voisin Russe

, par Myriam Allain

L'enjeu Ukrainien, au cœur de la crédibilité Européenne face à son voisin Russe

L’Ukraine aujourd’hui déchirée par de violentes manifestations apparaît comme un enjeu considérable pour l’Union Européenne. Cependant outre une simple joute verbale, cette question est également un moyen pour l’Europe de réaffirmer sa crédibilité, sa compétence à s’exprimer d’une seule et même voix et d’enfin prendre en considération son voisin russe.

« Nous voulons une Europe qui parle d’une seule et même voix ; mais dans toutes ses langues, de toutes ses âmes », écrivait le poète Portugais Fernando Pessoa affirmant avec vigueur cette unité nécessaire à une construction européenne mise à mal par un euroscepticisme grandissant actuel.

Le dossier Ukrainien en constitue aujourd’hui un exemple caractéristique. Nouvel enjeu pour la crédibilité de la puissance européenne, l’Ukraine se retrouve rattrapée tant par sa position géographique que son histoire. Divisée suite au choix de son gouvernement de tourner le dos aux accords Européens de libre échange et son refus de signer à Vilnius le 21 novembre dernier, l’Ukraine connaît aujourd’hui de violentes manifestations ayant menées au décès de plusieurs manifestants. Elle doit désormais faire face à son dilemme historique ; son ancienne appartenance au bloc soviétique face à son attirance européenne portée par les valeurs de démocraties et des Droits de l’Homme.

Mais, l’Ukraine s’avère être un dossier bien épineux. Tout d’abord, pays dont la superficie dépasse les 600 000 km2, celle-ci fait indéniablement partie de l’Europe. Par ailleurs, pont majeur ou tampon entre l’Europe et la Russie, elle en est un acteur important. Courtisée tant par la volonté Russe de reconstituer une alliance eurasienne en 2015, que par la volonté Européenne de la compter parmi ses membres, l’Ukraine s’est vue contrainte de revoir ses priorités.

Néanmoins, le choix s’avère délicat lorsque l’on prend en compte une population elle-même divisée culturellement, historiquement et linguistiquement. Choix encore plus délicat lorsqu’en période de faiblesse économique, il faut faire appel au plus offrant ; au moins contraignant.

Il serait tentant de clamer que l’Union Européenne a aujourd’hui beaucoup d’autres préoccupations et qu’une intervention serait des plus mal venues. En outre, la limite entre ingérence, et responsabilité de protéger s’avère comme étrangement fine pour une Europe en partie responsable du déchirement Ukrainien. Lorsque le premier est défini par l’interdiction fait à tout État étranger de se « mêler » de la définition et de l’exercice de sa souveraineté tant interne qu’internationale, le second, bien que supportée par l’Union Européenne ne connaît pas encore d’unanimité quant à sa définition précise.

Evitant une intervention directe, l’Union se doit néanmoins d’intervenir dans cette crise qui rappelle par de nombreux points la révolution « orange » de 2004 ayant conduit à une transition démocratique porteuse d’espoir pour l’Ukraine. Elle se doit d’intervenir pour une population encline à adopter ses idéaux, pour 46 millions de citoyens source de richesse économique, mais aussi un pays appartenant à son territoire, un pays qui en constitue sa frontière même.

Que peut faire l’Union Européenne ? L’Union n’a-t- elle qu’un devoir ou a-t-elle également un pouvoir d’intervention ?

Enjeu humanitaire, mais aussi institutionnel et Politique il est désormais nécessaire que l’Union Européenne s’unisse enfin, à quelques mois des élections, forte d’une seule voix, pour faire entendre une position claire, distincte et décisive, notamment face à son voisin russe. L’Europe se doit d’agir, mais d’agir bien.

La question du « Comment faire » se pose. Quels outils sont à sa disposition ? L’Europe a-t-elle réellement cette capacité ou doit elle se contenter de sermons perpétuels et de menaces sans véritable impact ? D’autres questions s’y ajoutent ; celle de l’unité d’action, l’unité de voix défendue par Fernando Pessoa, mais aussi des outils mis à sa dispositions. Comment évoquer la crédibilité d’une construction Européenne construite sur les vestiges d’une guerre, une construction aux aspirations pacifiques si ce n’est par des outils concrets, des actions pertinentes et une « solidarité de fait » ?

Nombre de dialogues ont été certes déjà engagés, notamment entre les 28 ministres européens des affaires étrangères le 20 janvier dernier ; condamnant les lois répressives adoptées par le Parlement Ukrainien. Certes des sanctions sont possibles, comme l’a montré l’UE en Biélorussie en 2011 face aux dérives du Président Alexandre Loukachenko. Néanmoins ces dernières ne semblent pas à « l’ordre du jour pour le moment », selon la Chancelière allemande Angela Merkel.

En tout état de cause, il est peut être désormais temps pour l’Europe de prendre véritablement en considération son voisin Russe et de mettre fin à cette ignorance qui n’a que trop durée afin d’avoir une véritable vue d’ensemble des questions internationales. En effet, comment envisager une construction européenne efficace sans prendre en compte un puissant voisin aspirant à construire sa propre union économique ? Comment se positionner efficacement sur le dossier Ukrainien sans appréhender mais aussi comprendre le dilemme auquel elle est confrontée ? Il en va de l’avenir de l’Union, de parvenir à élargir sa vision du monde ; prendre en compte cet acteur, concurrent fortement décidé à parvenir à ses fins. (La Russie a notamment promis 15 million d’euros à l’Ukraine).

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