Mesdames et Messieurs les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne,
Vous rentrez chez vous après deux jours et une nuit de sommet européen, sûrement content-e-s d’en avoir fini avec cette négociation, sûrement satisfait(e)s d’avoir obtenu des bouts de ficelle sur vos objectifs, sûrement confiant(e)s dans l’accueil de vos citoyens à l’annonce des résultats.
Et bien moi, jeune citoyenne européenne, je ne suis ni contente, ni satisfaite, ni confiante. Vous avez acté aujourd’hui, pour la première fois depuis plus de 60 ans d’intégration européenne, une baisse en valeur réelle du budget européen.
Cela ne veut pas dire que vous avez recherché l’efficacité dans les dépenses et la suppression des gaspillages, cela veut dire que les budgets alloués aux différentes politiques européennes vont baisser, alors que la population continue d’augmenter (ne serait-ce qu’avec l’entrée de la Croatie au 1er juillet). Moins d’argent pour les agriculteurs (la politique agricole commune), moins d’argent pour l’aide au développement, moins d’argent pour le développement des régions (les fonds structurels et de cohésion), moins d’argent pour la compétitivité (objectifs « UE2020 »), moins d’argent pour l’emploi (fonds social européen), moins d’argent pour la protection de l’environnement, moins d’argent pour la recherche et l’innovation, et surtout moins d’argent pour la jeunesse (Erasmus et les autres programmes de jeunesse et de mobilité). Et cela a un sens, ça veut dire moins d’argent pour les 500 millions de citoyens européens.
Reprenez vos manuels d’économie
Alors même que nous sommes embourbés dans une crise économique majeure, alors même que nous sommes juste rassurés quant à l’avenir de l’euro, alors même que les taux de chômage explosent partout en Europe, vous décidez de baisser les ressources budgétaires.
Faut-il vous refaire la démonstration économique qu’un euro dépensé par l’Union européenne a plus d’impact (effet de levier) qu’un euro dépensé dans un État membre ? Faut-il vous refaire la démonstration des économies d’échelle ? Si vos conseillers ne vous ont pas rappelé ces évidences, renvoyez-les à leurs études et à leurs manuels d’économie.
« Mais mes citoyens ne veulent pas donner plus d’argent à Bruxelles » me répondrez-vous. Et pourquoi à votre avis ? Parce que vous n’avez pas mené les politiques pour faire connaître à vos citoyens les mesures européennes, pour faire connaître le montant des fonds reversés dans votre pays, pour faire connaître les projets financés grâce à cela. Parce que vous n’avez pas pris les devants pour informer les citoyens sur ce que vous, les parlementaires, les fonctionnaires et les commissaires font à Bruxelles.
C’est la faute du système
Alors bien sûr me direz-vous, mais c’est le jeu. Les négociations sur les ressources de l’UE relèvent d’une décision intergouvernementale et de fait un État membre défend ses intérêts pour représenter les tendances de l’opinion publique de son pays. Les États contribuent à hauteur de 75% au financement de l’UE et c’est normal qu’ils aient la main mise dessus.
Pas si c’est pour prendre ce genre de décisions qui sont un suicide européen à long terme. Ce système vous arrange bien et permet, comme un arbre qui cache une forêt, de dissimuler vos égoïsmes nationaux.
Si vous vouliez ne serait-ce que vous épargner ces drames à répétition tous les sept ans, il vous suffirait de changer les règles du jeu, il vous suffirait d’augmenter les ressources propres de l’Union, et par conséquent de réduire vos contributions nationales.
Mais non, vous vous cachez derrière le système, derrière les méandres politico-administratifs d’une réforme institutionnelle, plutôt que d’avoir une vision, une vision politique de ce que devrait être l’avenir de l’Europe.
Pourtant vous aviez fixé des objectifs à l’UE
Vous ne vous souvenez pas, il y a 3 ans vous avez adopté une stratégie pour l’UE, la stratégie Europe 2020. Vous aviez pourtant porté avec conviction des objectifs ambitieux :
- « Emploi : porter à 75 % le taux d’emploi de la population âgée de 20 à 64 ans
- Recherche-développement et innovation : investir 3 % du PIB de l’UE dans la recherche et l’innovation
- Changement climatique et énergie : réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % (voire de 30 %, si les conditions le permettent) par rapport à 1990 ; accroître de 20 % la part des énergies renouvelables ; augmenter de 20 % l’efficacité énergétique
- Éducation : réduire le taux de décrochage scolaire à moins de 10 % ; porter le nombre de diplômés de l’enseignement supérieur à au moins 40 % de la population âgée de 30 à 34 ans
- Pauvreté et exclusion sociale : réduire d’au moins 20 millions le nombre de personnes touchées ou menacées par la pauvreté et l’exclusion sociale ».
Et comment faire tout cela sans budget ?
Il reste les budgets nationaux
C’est sûr ces objectifs doivent être mis en place dans chaque État-membre, il faut donc que les États membres puissent maintenir leurs budgets tout en réduisant leur dette. Mais quand les budgets des gros États membres comme la France ou le Royaume-Uni représentent autour de 40% du produit national brut (PNB) et que le budget de l’UE représente moins de 1% du PNB européen, il me semble qu’il y a quand même deux poids deux mesures.
Vous ridiculisez l’Union européenne
Par votre comportement, par vos propos et par votre incapacité à vous projeter après vos élections nationales, vous ridiculisez l’Union européenne. Comment s’étonner que les citoyens nous disent : "de toute façon l’Europe ça peut pas marcher, c’est déjà difficile de se mettre d’accord dans un couple, alors à 27…". Et que répondre à cela ? Le spectacle que vous jouez, l’image de l’UE que vous donnez ne fait pas envie aux citoyens. Et comment s’étonner qu’avec cette image là les citoyens ne votent pas aux élections européennes ?
C’est cela que vous cherchez, battre le record en 2014 du plus faible taux de participation ? Alors que le Parlement européen est le seul espoir qu’il nous reste, à nous citoyens, de refuser cette décision de baisse du budget européen. Refuser pour que l’on puisse être contents de notre appartenance à l’UE, satisfait de ses actions et confiants dans son avenir. Pour qu’on l’on puisse continuer à croire dans le projet européen.
1. Le 9 février 2013 à 19:27, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
J’espère que nos eurodéputés, notamment à gauche, auront le courage d’assumer leurs responsabilités et de rejeter un budget européen en baisse.
2. Le 9 février 2013 à 20:12, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
Il y a ici deux enjeux : sur le budget une approche « pro-européenne » ne peut accepter un budget européen en baisse alors qu’au contraire il devrait augmenter significativement pour que l’Europe puisse accomplir les tâches que l’on attend d’elle. Espérons que les eurodéputés sauront se montrer à la hauteur et rejetteront cet accord. Sur la politisation il faut avant tout une politisation du scrutin et cela peut passer avec le traité de Lisbonne par la désignation par les partis européens de candidats à la tête de la Commission ce que le PSE s’est engagé à faire. Ceci dit compte tenu du mode de scrutin proportionnel, que je ne remet naturellement pas en cause, ce n’est pas à une alternance brutale que l’on peut espérer assister, et tant mieux, mais à la victoire possible d’une coalition europrogressiste qui permettrait d’imposer un président de la Commission plus valable et plus indépendant des gouvernements.
3. Le 10 février 2013 à 12:36, par Bernard Giroud En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
Chacun pour soi, la marche arrière est enclenchée !
Ne nous y trompons pas, c’est non seulement un coup d’arrêt, mais bien une diminution, le chemin à rebours de la construction européenne, dans lequel on s’engage aujourd’hui.
L’incapacité, le refus, de vouloir mettre en commun une série de politiques ou d’activités par les actuels chefs de gouvernements européens est la signature du retour de l’esprit de la « cloche ». IL signe le niveau moral et intellectuel des acteurs en présence ; Mensonge, faiblesse, cupidité, toutes « qualités » qui sont entrain de nous faire reculer.
Faudra-t-il dire à Mme Merkel qu’elle garde ses Mercedes et ses BMW chez elle ; Que monsieur Hollande peut mieux examiner le dédale de cette politique agricole, abondant des nantis ; Que Monsieur Cameron garde pour lui son humour d’insulaire, qui prétend l’avenir aux basques des banquiers. Car enfin, quelle insulte à nos pères, quel mépris de ces morts, de ces siècles, quelle absence de mémoire ? Le monde entier n’en croira pas ses yeux qui les regardera, d’abord, avec étonnement, ensuite en souriant, et à la fin… et à la fin, les rejettera, rejettera leurs biens et leur morale pour cause de risque tragique.
Ne nous y trompons pas, c’est ainsi qu’ils y regarderont. C’est ainsi qu’ils nous verront, ceux qui de par la terre, s’ouvrent, avec lenteur, mais surement, les portes d’un meilleur ; Tous ceux qui pensaient qu’enfin, les siècles des tragédies réparées, ce groupe de pays prospères, gâtés par la nature, pourraient aller avant, plus avant, montant ainsi en éclaireur à ces mondes en réveil, qu’il y a bien une voie d’un futur, coloré, prometteur.
Quelles peuvent être les prochaines étapes ? Que peut on inventer en ayant perdu la confiance et le regard de l’autre ? Revenir au temps des sentiers parcourus, et passer à l’arrière, rater train du nouveau monde… C’est ainsi que l’on perd. Je veux la liberté d’un nouveau monde ou l’on pourra plus loin.
4. Le 11 février 2013 à 12:02, par Letaulier En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
« Faut-il vous refaire la démonstration économique qu’un euro dépensé par l’Union européenne a plus d’impact (effet de levier) qu’un euro dépensé dans un État membre ? »
Avant de penser à la « refaire » il faudrait déjà la faire. Je ne suis pas certain qu’un financement via l’UE soit plus performant qu’un financement par un Etat. Ni d’ailleurs qu’un financement par l’Etat soit à son tour plus performant qu’un financent par la région ou le land ou la province.
L’UE est prise dans ses contradiction, elle dit qu’il faut maitriser la dette publique mais en même temps elle réclame un budget plus conséquent, en oubliant de rappeler de le budget de l’UE est aussi de la dépense publique.
5. Le 11 février 2013 à 15:49, par Jonathan Leveugle En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@Letaulier : Ce que vous ne voyez pas c’est que les effets des politiques nationales s’annulent souvent du fait de la compétition que les Etats se jouent entre eux.
6. Le 11 février 2013 à 18:32, par Letaulier En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@Leveugle
Tu peux me donner un exemple concret de politiques nationales qui s’annulent ? Je pense pas que les Belges aient construit un deuxième tunnel sous la manche.
7. Le 11 février 2013 à 19:18, par Jonathan Leveugle En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
Les politiques de défense à travers lesquelles chaque Etat achète le matériel d’une armée nationale incapable de le défendre réellement. Ces politiques sont inefficaces et auraient un impact véritable si elles étaient menées à l’échelle européenne.
8. Le 12 février 2013 à 14:20, par Letaulier En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@Leveugle
Tu veux faire une défense commune ? Cela existe déjà dans l’esprit des Anglais, des pays de l’Est, des pays nordiques, de la Belgique etc. c’est l’Otan.
Si on avait une défense commune, on serait encore au stade des discussion pour savoir si on envoie nos hommes au mali et les islamistes de Sahal seraient déjà à Bamako.
9. Le 12 février 2013 à 16:37, par Fabien Cazenave En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@taulier : c’est en partie faux. Si nous avions une défense européenne commune, cela voudrait dire que nous aurions une Europe politique, par conséquent une capacité de décision beaucoup plus rapide que celle de 27 Etats nationaux.
10. Le 12 février 2013 à 17:25, par Letaulier En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@Cazenave
« une capacité de décision beaucoup plus rapide que celle de 27 Etats nationaux. »
Cela m’étonnerait beaucoup. D’après la presse la décision d’intervenir au Mali a été prise en un week end. Est-ce que tu imagines les 27 dirigeants des pays européens se mettre d’accord en un laps de temps si court (Sans parler de ceux qui voudrait au préalable faire ratifier leur décision par leur parlement) ? Il faudrait un sacré abandon de souveraineté pour que cela marche.
11. Le 12 février 2013 à 18:28, par Fabien Cazenave En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@letaulier : merci de me sans esprit chagrin... je dis qu’une coordination de 27 Etats européens ira toujours moins vite à prendre une décision qu’un Etat européen. Par ailleurs, un Etat européen ne serait pas un abandon de souveraineté puisqu’une Europe politique veut dire un gouvernement responsable devant le parlement représentant les citoyens...
12. Le 12 février 2013 à 20:42, par Letaulier En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@Cazenave
Pardon j’avais compris l’inverse !
13. Le 15 février 2013 à 16:50, par Mickaël.N En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@Letaulier
C’est très simple, l’UE consacre seulement 6% de son budget à des frais de fonctionnement, malgré les attaques répétés contre le niveau des rémunération. Dans les Etats membres, la moyennes est à 34% au bas mot.
De base, un état membre gaspille davantage...
14. Le 15 février 2013 à 17:25, par Stephanell En réponse à : Budget européen : carton rouge à nos 27 chefs d’État et de gouvernements
@Mickaël.N
On ne peut pas comparer les frais de fonctionnement nationaux à ceux de l’UE, pour la simple raison que l’administration territoriale de l’UE, c’est celle des Etats membres. Ce sont les ministères, les préfectures, les collectivités, les juges nationaux, les agences de l’Etat qui font respecter le droit de l’Union. La moindre directive et le moindre règlement européen renvoient systématiquement aux « autorités compétentes des Etats membres » leur mise en oeuvre.
Quels services publics sont rendus directement par l’administration européenne ? Il y en a, oui, mais par au point de porter les dépenses de fonctionnement à 34% du budget européen.
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