Aujourd’hui, la Serbie se retrouve depuis peu dans une situation géopolitique fort inconfortable.
En effet, après la récente ’’sécession’’ monténégrine de mai-juin dernier et avec la prochaine éventuelle ’’perte’’ du Kosovo, la Serbie risque de se retrouver très bientôt ainsi confinée dans ses frontières de la fin du XIXe siècle [1] ou, tout du moins, du tout début du XXe siècle [2]) et ainsi enclavée, sans plus aucun accès à la mer [3].
Les contradictions d’une identité mal définie
L’épineuse question du Kosovo, qui resurgit périodiquement et qui revient ces jours-ci sur la scène internationale, vient rappeler à tous que la Serbie n’est toujours pas parvenue à surmonter les contradictions politiques d’une identité nationale ’’serbe’’ encore bien mal définie.
Comment, en effet, un Etat peut-il se définir comme serbe, alors que les frontières héritées à la disparition de la Yougoslavie de Tito ont laissé un quart des Serbes (soit près de deux millions de personnes) hors des frontières de ce nouvel Etat et alors qu’aujourd’hui seuls les deux tiers de sa population se déclarent encore serbes ? (Soit environ 6,5 millions de personnes, sur les près de 10 millions d’habitants que compte aujourd’hui la Serbie...).
Selon la Constitution serbe [4], « la République de Serbie est l’Etat démocratique de tous les citoyens qui y vivent, fondé sur les libertés et les droits de l’homme et du citoyen, les droits du gouvernement et l’équité sociale ». Mais, en réalité, les Serbes majoritaires y représentent actuellement encore un peuple privilégié. Et les autres peuples présents en Serbie (ou minorités nationales) y subissent aujourd’hui encore diverses formes de discriminations quotidiennes.
Des conséquences meurtrières du nationalisme ethnique
La mise en évidence partisanne de ces contradictions et l’exploitation politicienne de telles frustrations, sur lesquelles le régime nationaliste de Belgrade avait assis son pouvoir, a eu des conséquences meurtrières au Kosovo et dans les républiques voisines de Croatie et de Bosnie-Herzégovine lors des guerres de sécession ’’yougoslaves’’ des années 1989-1999.
Mais une telle attitude, si elle perdurait dans la classe politique et dans l’opinion publique de la Serbie, ne risquerait-elle pas de mettre le feu et à sang le Kosovo, la Serbie elle-même sinon tout l’ensemble des Balkans, cette péninsule du sud-est du continent désignée sous le surnom de « poudrière de l’Europe » depuis au moins le début du XXe siècle ?
Qu’est-ce aujourd’hui qu’être Serbe ? [5] Que s’est-il vraiment passé, le 28 juin 1389, à Kosovo Polje ? [6] Quel est le profil ’’idéal’’ de la Grande Serbie ? [7] La Vojvodine est-elle serbe ? [8] Le Monténégro est-il une nation ? [9] Que reste-t-il de l’idée yougoslave ? [10] Telles sont là quelques unes des questions essentielles auxquelles cet ouvrage, très complet et d’une grande clarté, essaie d’apporter une réponse rationnelle et scientifique, détachée des propos politiciens les plus polémiques.
Comprendre ce qui se passe aujourd’hui en Serbie
Face aux enjeux présents et dans le souvenir des déchirements d’un passé encore récent, il est important d’essayer de comprendre ce qui se passe aujourd’hui en Serbie. Et tel est en effet l’objet de cet ouvrage complet et didactique qui s’efforce de dresser ici un tableau d’ensemble aussi exhaustif que possible de la situation politique dans ce pays des Balkans.
Contraintes géostratégiques liées à la géographie, Identités serbes liées à l’histoire, système politique d’aujourd’hui et forces en présence, situation économique, clivages régionaux et relations extérieures : c’est ainsi toute la Serbie d’hier et d’aujourd’hui qui est passée au crible de l’analyse.
Un ouvrage auquel il manque néanmoins une conclusion traitant de l’avenir possible de la Serbie dans des Balkans appaisés et dans une Europe en construction. Une Serbie démocratisée et pacifiée qui ne serait alors plus l’épouvantail ni le croquemitaine de la région, ni le paria de l’Europe. Tout du moins peut-on l’espérer, car les raisons d’espérer existent bel et bien. Et cet ouvrage exhaustif et précis le démontre très clairement.
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