Les Roms et l’Union

De l’urgence de respecter les engagements communautaires

, par David Mokhtari

Les Roms et l'Union
Manifestation de roms à Paris en 2007 http://www.flickr.com

Les Roms constituent actuellement la plus importante minorité ethnique de l’Union européenne. Dans les textes, ce sont des citoyens d’Europe à part entière qui bénéficient des mesures en faveur des minorités mais leur situation sociale et politique reste précaire.

Depuis 2007, les huit à dix millions de Roms sont devenus la plus importante minorité ethnique de l’Union européenne. Ils sont surtout présents en Roumanie, Bulgarie, Slovaquie (env. 10% de la population), et sont officiellement reconnus en tant que minorité dans plusieurs autres. Leur langue, le romani, a obtenu le statut de langue minoritaire aux Pays-Bas (1996), en Allemagne (1998), en Slovénie (2000), en Autriche et en Slovaquie (2001) et encore en République Tchèque (2006), en Roumanie (2006) et en Pologne (2009). Ce statut n’est pas que symbolique : il implique la mise en place de mesures allant dans le sens de l’enseignement du romani et son utilisation par les administrations nationales et plus généralement de l’intégration des Roms.

C’est que ceux-ci entretiennent des rapports paradoxaux avec les gadjés (non-roms). Souvent rejetés du fait de leur mode de vie essentiellement nomade, donc « insaisissables », et à une réputation sulfureuse, ils symbolisent en même temps la liberté, l’indépendance, et sont même acclamés lorsqu’ils s’appellent R.Quaresma, H.Stoitchkov, C.Chaplin, Bouglione [1] ou encore « Gypsy Kings ». Devenus majoritairement sédentaires en Europe de l’Est à l’époque soviétique en contrepartie d’une garantie d’embauche, ils réaffirment leur identité au début des années 90. La chute du mur signifie pour eux des licenciements massifs, une grande pauvreté et très vite, une recrudescence des tensions sociales et d’actes xénophobes puisqu’ils restent considérés comme « étrangers », même en Bulgarie et en Roumanie où ils sont fortement implantés depuis plusieurs siècles.

Les Roms bénéficient actuellement de protections dans les textes communautaires. L’Union pose en effet la protection des minorités comme condition d’accès à son espace et une trop faible protection de celles-ci avait contribué à repousser de trois ans l’entrée de la Roumanie, prévue initialement en 2004. Les Roms bénéficient de plusieurs programmes d’aide transnationaux (« Décennie pour les Roms », à l’initiative de sept États de l’Est et soutenu par l’UE depuis 2008), ou communautaires puisqu’ils sont visés par les aides destinées aux minorités (programme PHARE par exemple). Ces programmes mettent en avant l’éducation et l’insertion professionnelle. Des améliorations ont ainsi pu être constatées, bien que les fonds arrivent lentement à destination. Les droits politiques des Roms étaient également reconnus et ils sont représentés dans les parlements roumain et slovaque et au Parlement européen par exemple par la Hongroise Livia Jaroka, issue du parti européen ADLE.

Mais la crise est actuellement un prétexte pour remettre en cause ces avancées. Ainsi, en République tchèque, les élèves roms ne peuvent être scolarisés que dans les écoles pour enfants handicapés suite à des récentes coupes budgétaires supprimant les écoles pour Roms. Un autre projet original, le label « ethnic friendly » décerné aux entreprises embauchant des Roms, n’est plus autant prisé. En Roumanie et en Bulgarie, beaucoup de Roms vivent sous le seuil de pauvreté local et de vives tensions ont lieu. En Hongrie, où ils étaient mieux traités que dans les États limitrophes, beaucoup immigrent vers l’Ouest. En Slovaquie, ils vivent essentiellement dans les régions les plus pauvres. En Italie, le Président Napolitano s’est ému l’an dernier des conditions d’accueil des Roms suite à un incendie mortel. La France a pour sa part scandalisé l’Union l’année dernière, en expulsant les Roms sur des bases ethniques, dans une affaire médiatisée où elle s’est attiré les foudres de la commissaire V. Reding et de la plupart des opinions civiles des États membres. Au Royaume-Uni, une loi récente, le Localism Bill, menace sérieusement des camps de Roms sédentarisés, pourtant mis en place légalement.

Tous ces actes à l’encontre d’une minorité particulière ne doivent pas nous laisser indifférents. Aucun argument non démagogique ne peut être avancé pour accabler un groupe minoritaire et les mesures nationales allant à l’encontre de l’esprit de textes communautaires protecteurs de droits fondamentaux ne doivent pas être acceptées.

Pour aller plus loin :

 Rom’Europe
 Courrier International

Mots-clés
Notes

[1Tous ont des origines roms. Les deux premiers sont des footballeurs, portugais et bulgare

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