Le Taurillon : Votre équipe a réalisé une vidéo sur votre rentrée parlementaire à Strasbourg. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué depuis que vous êtes eurodéputée ?
Malika Benarab-Attou : D’une part, le fait de devenir une personnalité publique, les attentions que me portent les personnes qui me reconnaissent et que je ne connais pas, le regard respectueux sur la députée que je suis devenue alors que j’étais une parfaite inconnue...
D’autre part, étant de nature spontanée, l’obligation de mieux maîtriser (donc contrôler) mes paroles et mes écrits car ils peuvent être instrumentalisés politiquement (mais le naturel revient au galop !).
Le Taurillon : Dans votre profession de foi aux élections de juin 2009, vous êtes « mobilisée par la place de l’Islam en Europe et au Maghreb ». Y a-t-il un rejet de l’Islam dans notre Europe qui se veut sécularisée ?
Malika Benarab-Attou : Je ne dirais pas qu’il y a un rejet de l’Islam globalement, en Europe. Les situations sont différentes selon les pays et nous voyons bien que l’Islam vient questionner l’identité et la culture européenne telle qu’elles sont définies/vécues par beaucoup d’européens aujourd’hui, en particulier en France.
Le mode de sécularisation français se conjugue en terme de laïcité comme une opposition entre le religieux et le politique-l’espace public. Ce n’est pas le cas dans d’autres pays européens qui se situent dans un mouvement d’autonomisation du politique par rapport au religieux sans être dans une opposition frontale qui génère des relations conflictuelles entre les croyants (en l’occurrence les musulmans, nombreux suite aux effets de la colonisation) et les tenants d’une laïcité radicale.
De l’autre côté des rives de la Méditerranée, les États musulmans ont « gelé » la réflexion sur l’Islam entraînant l’émergence de mouvements religieux (salafisme par exemple) ayant une approche fermée/radicale et politique de la religion. Alors même que les sociétés, de fait, sont dans entrées dans un processus de sécularisation. Un travail de réflexion et d’ouverture de l’approche religieuse musulmane existe chez certains intellectuels mais cette pensée reste à la diffuser et à se l’approprier par les citoyens musulmans plus largement. J’ajoute que la sécularisation est un processus (comme l’émancipation) et non une situation : un mouvement qui peut connaître des phases différentes donc.
Le Taurillon : Pourquoi avez-vous voulu être membre de la commission des Affaires étrangères ? Quels seront les grands sujets que vous y aborderez ?
Malika Benarab-Attou : Les relations Europe-Maghreb et plus largement Europe-Afrique me passionnent et me semble un enjeu important dans une planète qui est mondialisée (qui connait des relations multiples et de plus en plus nombreuses entre les peuples et les individus). Dans le contexte actuel qui évolue vers un monde multipolaire, l’Europe a un rôle important, spécifique, à jouer à condition qu’elle renoue avec ses valeurs fondatrices. La fraternité/solidarité en est une, essentielle.
C’est pourquoi je suis membre des commissions parlementaires Affaires Étrangères ainsi que Culture et Éducation. Pour les délégations je suis sur Maghreb/UMA et Parlement Euro-Med ainsi que sur Union Africaine.
Le Taurillon : Pour vous, est-ce que l’Union européenne doit aller vers le fédéralisme ?
Malika Benarab-Attou : Absolument. C’est une position déjà ancienne de mon parti (les Verts) : une Europe fédérale qui s’appuie sur les régions c’est-à-dire les territoires, avec leur culture, leur histoire, le vécu des citoyens quoi. Une déclinaison de l’adage : « penser global agir local » et, pour paraphraser Edgar Morin, associée à une approche réflexive penser local (les expériences) agir global (des directives européennes qui prennent en compte les bonnes pratiques issues des expériences).
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