Vision n°1 : la Communauté internationale
Le 6 février dernier, John Sawers, directeur politique du Foreign Office britannique, a informé directement les dirigeants kosovars serbes, lors d’une rencontre, que le groupe de contact composé de la France, du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de l’Italie, de la Russie et des Etats-Unis avait décidé d’accorder l’indépendance au Kosovo.
Cette déclaration est le résultat d’un changement d’attitude de la communauté internationale vis-à-vis du Kosovo.
On a pu clairement s’en rendre compte lors de la réunion du Conseil de sécurité du 14 février, quand, pour la première fois, la Grande-Bretagne (Etat membre de l’UE et membre permanent du Conseil de sécurité) a nettement fait savoir que l’indépendance du Kosovo était une possibilité réaliste.
Cette déclaration a ensuite été soutenue par d’autres membres permanents du Conseil de sécurité. Ces déclarations permettent d’espérer en une solution durable pour le statut définitif du Kosovo qui contribue à la stabilité des Balkans, surnommés « le trou noir de l’Europe ».
Vision n°2 : les Serbes
En fait, la scène politique serbe présente trois points de vue différents concernant l’avenir du Kosovo.
Le premier est défendu par le chef du Parti Radical serbe, en accord (d’après lui) avec le Premier ministre de Serbie Vojislav Kostunica : toute proclamation de l’indépendance du Kosovo conduira à ce qu’ils le déclarent comme « territoire occupé ».
Le second est celui du Président serbe Boris Tadic, qui a proposé lors de la réunion du Conseil de sécurité évoquée précédemment que le statut du Kosovo ne fasse l’objet d’aucune décision avant vingt ans.
La troisième vision est représentée par le chef du Parti Démocrate Libéral, Cedomir Jovanovic, ancien Vice-Premier Ministre dans le gouvernement de Zoran Dzindzic : c’est le point de vue de l’aile modérée et pro-européenne serbe, qui estime que le Kosovo est déjà indépendant et qu’il n’est donc aucunement une menace pour l’Etat serbe.
Vision n°3 : les Kosovars d’origine albanaise
Hashim Thaqi, un membre de l’équipe de négociateurs du Kosovo, a déclaré dans sa dernière conférence à la Freie Universität de Berlin que le Kosovo sera un Etat de citoyens, où toutes les ethnies auront la possibilité de développer leurs propres identités nationales et culturelles tout en bénéficiant des mêmes droits.
Un autre membre de l’équipe de négociateurs, Veton Surroi, représentant de l’avant-garde intellectuelle et citadine du Kosovo, estime que l’indépendance n’est pas un drapeau, un hymne, un logo, « la bataille de Fushë Kosova » [1], une question de continuité entre Albano-Kosovars d’aujourd’hui et Illyriens et Dardaniens d’autrefois [2] ou une question d’isolement. L’indépendance est plutôt une question de gestion politique, de sécurité et de regard vers le XXIème siècle.
Pour le militant kosovar bien connu Albin Kurti, qui avait été emprisonné sous le régime de Milosevic pour l’organisation de manifestions pacifistes d’étudiants, l’indépendance du Kosovo est le seul moyen d’indemniser les Kosovars d’origine albanaise pour ce qu’ils ont souffert sous Milosevic.
Pour que le Kosovo devienne un Etat bien géré, démocratique pour tous ses citoyens, et membre de l’Union européenne, il faut qu’il devienne d’abord un Etat indépendant souverain.
En guise de conclusion
José Manuel Barroso est venu au Kosovo pour exprimer le message que la place du Kosovo et de toute la région est dans l’Union européenne. L’UE a prouvé qu’elle pouvait agir efficacement dans le domaine de la politique étrangère, comme ce fut le cas en Macédoine où elle prit une part active en forçant les parties en présence à chercher la meilleure solution par la négociation pour aboutir à l’accord de Ohrid dans un jeu à somme positive.
L’UE devrait par conséquent avoir un rôle moteur pour le Kosovo et pour le suivi du statut définitif. Alors que l’International Crisis Group recommande un paquet « indépendance », la communauté internationale demande au Kosovo de se concentrer sur son développement économique et social. Ainsi, l’UE et ses Etats membres auront l’opportunité d’accroître leur engagement, y compris financier, dans les Balkans occidentaux au sens large.
Un généreux programme d’assistance dans le domaine de l’éducation et une libéralisation de la politique des visas sont nécessaires, ainsi que l’aide au développement rural. L’UE ne doit pas en arriver à dépenser plus pour ses coûts de mission après l’adoption du statut du Kosovo que pour les fonds structurels de pré-adhésion dans les nouveaux Etats membres.
Fehmi Hajra, membre du Bureau national de la JEF Kosovo & Isak Gllogovci, Secrétaire Général de la JEF Kosovo
(Document traduit de l’anglais par Emmanuel Vallens, membre du bureau national des « Jeunes Européens - France »).
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