Astérix l’Européen

Un hommage à Albert Uderzo, mort mardi à l’âge de 92 ans

, par Théo Boucart

Astérix l'Européen
Uderzo est mort. Astérix, Obélix et Idéfix sont orphelins ! Photo : Séance de dédicaces avec Albert Uderzo, lors du Salon du livre 2008 (crédit : Georges Seguin)

Albert Uderzo nous a quittés dans la nuit du 23 au 24 mars, à l’âge de 92 ans. Son personnage principal, Astérix, est à fois irréductiblement gaulois et profondément européen.

On a tous lu ces bandes dessinées au coup de crayon si caractéristique et aux répliques, jeux de mots et patronymes si cultes : « XXII ! Les Romains ! », « Ta vie ne tient qu’à un fil, Téléféric », « Par Jupiter ! Par Toutatis ! Par pitié ! »… et on a tous rêvé de trouver la recette de la fameuse potion magique ! Astérix, Obélix, Idéfix, Panoramix et tant d’autres personnages iconoclastes sont orphelins de leur co-créateur, le dessinateur Albert Uderzo, mort dans son sommeil chez lui, à Neuilly-sur-Seine, à l’âge de 92 ans.

Né dans la région de Reims en 1927 et fils d’immigrés italiens (son prénom de naissance est d’ailleurs Alberto), Albert Uderzo se découvre très tôt une passion pour le dessin, puisqu’il publie sa première illustration dès 1941, en pleine seconde guerre mondiale. 10 ans plus tard, il fait la connaissance de celui avec qui il formera un duo légendaire : René Goscinny, prolifique scénariste et écrivain de littérature jeunesse, également auteur d’Iznogoud, de Lucky Luke ou encore du Petit Nicolas.

René Goscinny (à gauche, à côté de Maurice de Bevere (dit Morris), le dessinateur de Lucky Luke) a conçu les 16 premiers albums d’Astérix aux côtés d’Albert Uderzo, jusqu’à sa mort en 1977.

C’est ensemble qu’ils imaginent et décident de publier dans le journal Pilote les premières planches d’Astérix et Obélix, représentant des héros « très français ». Le succès est immédiat et international. Entre 1959 et 1977, les deux amis publient 16 albums. La mort tragique et inattendue de Goscinny en 1977 ne signe pas pour autant l’arrêt de la série, puisqu’Uderzo décide de continuer seul à rédiger les scénarios et à dessiner les planches. Le 38ème album de la série, intitulé La fille de Vercingétorix, et conçu par Jean-Yves Ferri et Didier Conrad (Uderzo décide d’arrêter le dessin à la fin des années 2000) est ainsi sorti en 2019 et est traduit dans plus de 20 langues. Au total, 380 millions d’exemplaires dans près de 110 langues et dialectes ont été écoulés depuis 1959.

Amsterdam, 1971. Albert Uderzo dessinant son Gaulois mondialement connu, aux côté de Morris, auteur du non moins célèbre cow-boy du Far West Lucky Luke.

Européen au-delà des idées reçues

Non sans un certain sens pour représenter les clichés de nombreux peuples, Goscinny et Uderzo ont fait voyager leurs héros moustachus dans tout l’Empire romain et même autour, à la rencontre de très nombreux peuples européens : les Bretons, les Belges les Lusitaniens, les Ibères, les Pictes, les Cimbres, les Grecs, les Sarmates… donnant des scénarios parfois anachroniques (comme le montre l’avant-dernier album Astérix et la Transitalique, évoquant l’unification italienne).

Mais au diable l’exactitude historique ! Au-delà du préjugé du Breton délicat, du Belge joyeux, du Normand rustre ou de l’Ibère colérique, les aventures d’Astérix et de ses compères auront peut-être permis à de très nombreux lecteurs, petits et grands, de prendre conscience que le territoire européen est très riche culturellement, mais dont les peuples partagent de nombreux points communs (symbolisés par les grands banquets communs et conviviaux).

L’hommage européen à l’annonce de la mort d’Uderzo a d’ailleurs été unanime, particulièrement en Allemagne, où le petit Gaulois est très populaire (un tiers des ventes totales d’albums a été effectuée outre-Rhin), mais également en Espagne, au Royaume-Uni, et dans bien d’autres pays d’Europe, jusqu’en Finlande. Dans ces pays, les lecteurs passionnés se sont même approprié les histoires de ces deux compères aux traits typiquement gaulois (et cela ne tient pas uniquement au fait que beaucoup de noms de personnages soient traduits différemment selon les langues). Dans une interview télévisée, Albert Uderzo a affirmé que « les petits Allemands et les petits Espagnols sont persuadés qu’Astérix est allemand ou espagnol ».

Albert Uderzo a dessiné l’Europe dans toute sa diversité. Aujourd’hui, celle-ci lui rend un bien bel hommage.

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