Brexit or not Brexit ?
L’Union européenne subit depuis quelques années déjà des crises sans précédent, entre crise des réfugiés, crise de l’euro et crise de la Grèce. Les sommets s’enchaînent sans que les difficultés ne disparaissent. La dernière en date, et non des moindres, est la menace du Brexit. Tout est dans le nom, contraction de « British Exit ». Les Britanniques, lassés de devoir appartenir à une entité dont ils ne maîtrisent pas le leadership vont devoir décider par référendum fin juin quel sera leur avenir au sein de l’Union.
Du côté de l’Union européenne, tout le monde est sur les charbons ardents. Le cas britannique pourrait créer un séisme sans précédent en inspirant d’autres pays ayant peu foi en la construction européenne, et vider ainsi peu à peu l’Europe de sa substance. Si les dirigeants européens se veulent rassurants en déclarant qu’une sortie du Royaume-Uni n’empêcherait pas les autres d’avancer, ils craignent cependant tous la dislocation de l’Union : « La France souhaite que la Grande-Bretagne reste dans l’Union européenne, c’est l’intérêt de l’Europe et du Royaume-Uni », a déclaré Manuel Valls qui craint une décomposition de l’Union européenne si le camp du « Leave » l’emporte.
Les institutions européennes ne clament plus haut et fort leurs positions à l’approche du référendum mais elles sont fermement convaincues que le « Remain » doit l’emporter à l’issue du scrutin. Ainsi, la Banque centrale européenne (BCE) est d’avis que le Royaume-Uni reste dans l’Union européenne. Le président de l’institution, Mario Draghi, a par ailleurs déclaré : « Le Royaume-Uni et l’Union européenne profitent mutuellement l’un de l’autre ». Il a cependant ajouté que la BCE est parée à toutes les éventualités selon le choix des Britanniques. Quant au président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, il laisse entrevoir quelle sera la place du Royaume-Uni si le camp du « out » l’emporte, alors même que dès 2014 il avait fait de la question britannique sa priorité : « Si les Britanniques devaient dire « non », ce que je n’espère pas, la vie communautaire ne continuera pas comme avant (…). Le Royaume-Uni devra accepter d’être considéré comme un Etat tiers, que l’on ne caressera pas dans le sens du poil ». La négociation du divorce est déjà envisagée, quand bien même les dirigeants européens craignent qu’un Brexit fragilise davantage la construction européenne.
Depuis le traité de Lisbonne, l’article 50 prévoit en effet la possibilité de retrait de l’Union européenne sur simple notification unilatérale au Conseil européen. Entre enjeux nationaux et communautaires
Face aux enjeux de ce référendum, les campagnes pour et contre le Brexit se sont très vite organisées, chacune défendant leurs arguments et utilisant des slogans accrocheurs. D’un côté, la campagne du « Vote Leave, take control », a d’abord axé son action et ses critiques sur le coût que l’Union européenne représente pour le Royaume-Uni : ils estiment notamment que rester dans l’UE signifie dépenser « 350 millions de livres » sterling par semaine, à l’étranger. La campagne est claire : « Our money, our priorities ». Sans surprise, la question de l’immigration et des frontières est aussi régulièrement relancée par les partisans du Brexit, qui dénoncent l’arrivée « de violents criminels » chez eux.
De l’autre côté, les opposants au Brexit font campagne pour dire « oui » à l’Europe : « Stronger in ». Ils défendent une économie plus forte, une position internationale plus importante et une sécurité plus développée, au sein de l’Union européenne. Ils rappellent l’importance du marché européen pour l’économie britannique, et les avantages dont la population bénéficie quotidiennement : des prix plus bas dans les supermarchés, des vols moins chers à destination des pays membres de l’Union européenne, des coûts avantageux en téléphonie.
Un des points communs des deux campagnes, est le souci de lier les électeurs aux enjeux : les partisans du Brexit insistent fortement sur les progrès nationaux qui pourraient être réalisés si le pays ne contribuait pas au budget européen : l’argument phare est celui de la National Health Service (le service de santé publique du Royaume-Uni), ainsi que l’éducation : « l’Union européenne nous coûte environ 350 millions de livres par semaine : assez pour construire un nouvel hôpital équipé par la NHS chaque semaine ». Les questions économiques et financières sont au cœur du débat et les rapports sur les conséquences économiques d’un Brexit fleurissent depuis quelques semaines.
Le débat sur l’avenir communautaire est donc essentiellement porté sur le niveau national. Les Britanniques réfléchissent en termes d’avantages et d’inconvénients nationaux. L’Union européenne garde le silence, à l’image de la chancelière allemande qui ne se prononce pas sur le Brexit de peur de passer une nouvelle fois pour une donneuse de leçon alors qu’elle est fermement opposée au Brexit.
Salle d’attente pour l’Union européenne
En attendant le résultat du référendum, Bruxelles est dans l’attente. Les dirigeants européens prennent leur distance avec le débat, par crainte d’influencer négativement les électeurs. Bruxelles a fait sa part en négociant un accord avec le Royaume-Uni, accord que Cameron a négocié au terme d’un chantage pour son soutien au camp du « Remain », c’est désormais aux électeurs britanniques de se prononcer. Quelle que soit l’issue de ce référendum, les négociations reprendront très vite entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Il s’agira de redonner à la relation RU-UE une base solide et durable, ou bien de mettre en place des procédures pour encadrer la sortie du pays par le biais de la clause de retrait. Pour se préparer à ces deux possibilités, des diplomates de plusieurs Etats membres ont initié des discussions avec les institutions européennes à la fin du mois de mai.
Ainsi, Bruxelles tourne au ralenti en ce mois de juin habituellement très chargé. Les agendas ministériels sont tenus, mais l’activité réduite. Bruxelles remet même à plus tard la définition du budget européen qui a traditionnellement lieu fin mai, tant cette question est sensible Outre-Manche, et représente l’un des arguments majeurs du camp du « Leave ». En outre, la plupart des autres gros dossiers qui posent problème vis- à-vis du Royaume-Uni sont également plus ou moins suspendus (CETA, fraude fiscale, etc.). Nul doute que l’issue du scrutin le 23 juin prochain impulsera une nouvelle dynamique pour l’Union. Entre aveu d’échec et marginalisation du Royaume-Uni, elle devra sans plus attendre agir en conséquence si elle ne veut pas courir à sa perte. D’autant plus que selon un sondage mené par l’institut américain Pew Research et parut la semaine dernière, les Européens sont de plus en plus critiques vis-à-vis de l’Union européenne.
1. Le 13 juin 2016 à 22:59, par Iwantout En réponse à : Brexit : L’Union européenne dans l’attente
Pourquoi n’existe-t-il aucun articles en anglais sur l’organisation d’un referendum ?
2. Le 13 juin 2016 à 23:35, par Hervé Moritz En réponse à : Brexit : L’Union européenne dans l’attente
Bonjour,
Notre média est un média participatif. Si un internaute souhaite proposer un article en anglais sur ce sujet, il est possible de l’envoyer à la rédaction.
Je crois qu’il y a déjà quelques articles en ligne en anglais concernant le Brexit.
Bonne lecture
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