Capitale européenne de la culture 2020 (I) : Rijeka la croate

, par Lucie-Hélène Pagnat

Capitale européenne de la culture 2020 (I) : Rijeka la croate

2020 sera une année culturelle, ou ne le sera pas. Pour pouvoir en juger sereinement, découvrez la capitale européenne de la culture du sud : Rijeka, qui signifie « rivière » en croate.

« Rijeka, port de la diversité »

Construite par les Celtes, conquise par les Romains, peuplée par les Croates, dominée par les Habsbourg et rivale de Venise, Rijeka devient officiellement une ville libre en 1779 en acquérant le statut de « corpus separatum ». Ce dernier ne l’empêcha pas d’échoir au royaume d’Italie, puis à l’empire d’Autriche, avant de subir une annexion yougoslave post seconde guerre mondiale ; une minorité italienne s’est maintenue dans ce port désormais devenu croate. A l’heure où la Croatie débute son semestre de présidence du Conseil (des ministres) de l’Union européenne 1, cette municipalité portuaire croate de 144 000 habitants lance son année culturelle afin de témoigner ce qu’elle incarne depuis des siècles sur la mer Adriatique : un « port de la diversité ». Dotée de ce slogan, Rijeka va tacher d’intégrer plusieurs valeurs phares au cœur de son programme 2020 à savoir : courage, ambition, unicité et progressivité. La capitale culturelle croate a fait graviter son année de mandature à venir autour de trois thèmes reflétant l’entrelacement de son identité avec celle de l’Europe contemporaine : eau, travail et migration.

Eau : la ville-rivière qui coule Souvent retrouvée en tête des endroits les plus pluvieux au monde, Rijeka possède une eau d’un tel goût qu’elle serait capable, à elle seule, de nous faire revenir à Rijeka ! Dans le programme de cette année, l’eau est intrinsèquement liée à la diversité biologique et aux problématiques écologiques contemporaines. Il est temps de s’interroger sur la manière dont nous vivons en bord de mer, sur les nouvelles dynamiques économiques (et notamment le tourisme durable) s’y développant, tout en préservant énergiquement notre environnement naturel.

Travail Droit de l’homme depuis la Déclaration onusienne de 1948, le « droit au travail » est aujourd’hui un droit fondamental qu’il convient non seulement de défendre mais surtout de renforcer et de prôner. À l’ère des nouvelles technologies, l’avenir de l’Europe est entre nos mains, celles des acteurs du travail d’aujourd’hui et de demain. En révolution permanente depuis l’ère post-industrielle, le travail contemporain exige que l’on repense les économies à travers le prisme du travail immatériel et des industries créatives. Les spectacles et expositions programmés contribuent à faire de Rijeka la capitale culturelle garante de la réflexion nouvelle sur le travail qui devra habiter chacun des visiteurs voguant en son sein. C’est par exemple le cas de l’exposition « Times of power » visant à montrer l’art dans un contexte de lieu de travail comme un moyen de résistance à la répression.

Migration Grandes migrations de populations, mobilité, nomadisme et échanges sont au cœur de Rijeka qui a depuis son origine été un carrefour méditerranéen : une ville de migrations. Cette nature particulière de Rijeka reflète également l’avenir de l’Europe qui doit faire face à une mobilité croissante des populations de son territoire. La capitale culturelle croate s’interroge dans cette thématique sur la manière dont les Européens traitent les différentes identités afin de donner aux visiteurs l’envie d’apprécier la richesse de cette diversité.

L’atout du label « ECoC » pour Rijeka

Être capitale européenne de la culture2 nécessite avant tout de se doter d’un programme culturel étoffé et diversifié afin de répondre à la curiosité des visiteurs. Mais ce label permet aussi à la ville, voire à la région, de bénéficier d’un rayonnement lui permettant d’entamer des projets de rénovation et de construction sur son territoire afin de relancer une dynamique sociale parfois éloignée de la population.

Pour ce faire, Rijeka reçoit 140 millions de kuna (monnaie croate) de subventions de l’Union européenne, soit 18,80 millions d’euros. À la place de trois bâtiments industriels, le port croate va par exemple voir émerger : un musée de la ville, une bibliothèque municipale, trois bâtiments culturels et surtout une maison des enfants, dédiée au développement de la créativité des plus jeunes, ce qui est une première du genre en Croatie. Des châteaux des Frankopan 3 seront rénovés dans le cadre du projet « Suivre les traces de la famille Frankopan ». Un navire nommé Galeb va également être converti en musée et attraction touristique. En outre, grâce au programme « Sweet & Salt », le bord de mer (sel) et la rivière Rječina (douce) seront également rénovés. En outre, des sculptures d’art permanentes sont de plus en plus installées sur la côte croate par des artistes croates mais aussi internationaux. Une nouvelle route du tourisme culturel se dessine ainsi dans la région de Rijeka.

En sus de l’amplification de la diplomatie culturelle depuis sa candidature, de nombreux partenaires vont pouvoir bénéficier d’une plus-value notable de ce label de capitale européenne de la culture, comme par exemple l’université où de nouveaux programmes d’études sont mis en place 4. Rijeka compte ainsi potentialiser sur les infrastructures et les équipements développés pour accueillir, voire retenir, les visiteurs tout au long de cette année 2020.

1. D’après l’article 16.9) du Traité sur l’Union européenne, la présidence du Conseil de l’Union européenne s’effectue à rotation égale entre les Etats membres tous les six mois. Cette présidence semestrielle joue un rôle significatif dans l’organisation et l’impulsion des travaux du Conseil des ministres de l’Union

2. L’acronyme « ECoC », repris aujourd’hui en hashtag correspond au nom du label « European Capitale of Culture »

3. Au Moyen Âge, les Frankopan sont une puissante famille (croato-hongroise) qui domine une partie de l’île de Krk et du littoral croate

4. L’université de Rijeka va mettre en oeuvre le programme « Deltalab » concernant la transition urbaine et architecturale, ou encore le programme de formation « Développement international de projets culturels » en partenariat avec l’université de Bordeaux

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