« Covid 19 » vs « Euro 2020 » en 2021 : l’impossible quadrature du cercle sanitaire et sportif

, par Volkan Ozkanal

« Covid 19 » vs « Euro 2020 » en 2021 : l'impossible quadrature du cercle sanitaire et sportif
Un Euro, douze pays, une Coupe mais un gros problème : le « Covid-19 qui a empêché la tenue du Championnat d’Europe cette année. Reporté pour juin 2021, aura-t-il lieu ? Image : Marco Verch Professional Photographer / FlickR

Cela fera bientôt un an que le monde a découvert l’existence depuis Wuhan, en Chine, de la pandémie dit du « Covid-19 ». Depuis lors, entre confinements, couvre-feu, hausse des cas positifs et décès, les pays vivent au rythme des bulletins de santé et des mesures prises pour tenter de juguler la crise sanitaire. Parmi celles-ci, le monde du sport aura payé un lourd tribut aussi bien humain que financier et l’ombre de la pandémie plane encore sur les compétitions. Entre annulations, reports en 2021 (J.O., Euro 2020), reprise sans public ou avec jauge de supporters et questionnements sur la suite à donner, le virus a mis à mal également le monde sportif. Avec, en filigrane, une question lancinante qui se posera pour l’Euro 2020, censé avoir lieu dans 12 pays, en 2021 : comment maintenir la compétition si le virus reste toujours actif ?

2020, année sportive improbable : entre annulations, reports et questionnements sur le futur

Difficile d’y voir clair dans cette année 2020 perturbée à tous les niveaux que ce soit humainement, économiquement, socialement et culturellement. Dans un monde tenaillé par une crise sanitaire sans précédent et des mesures de restrictions toujours plus fortes pour freiner le virus, le sport n’a pas été épargné non plus, loin de là. Quelque soit la compétition sportive concernée, que ce soit le tennis (U.S. Open, Roland-Garros), les Jeux Olympiques de Tokyo, prévus l’été dernier, le Tour de France ou le Championnat d’Europe de football, bon nombre de compétitions ont oscillé entre reports, annulations et conditions d’accès contrôlées et renforcées. La visibilité est incertaine sur la suite des évènements avec un virus toujours actif et surtout incontrôlable dans ses grandes largeurs. Si les grandes échéances se sont adaptées malgré tout comme le tennis, avec l’U.S. Open en août dernier ou Roland-Garros récemment, en mettant en place des jauges de personnes, le football est somme toute davantage impacté. Sport le plus médiatisé et mondialement diffusé, avec des stades remplis à ras bord et des sponsors parmi les plus importants qui soient, la mise sous cloche de l’Euro 2020 a été un coup dur pour l’UEFA en termes de pertes de recettes.

Dans sa grande quête d’un football globalisé, le report de l’Euro, qui devait en outre fêter ses 60 années d’existence, après une première édition en France, en 1960, a freiné la politique d’expansion de l’instance européenne, si friande de relais historique. Si dépendants également d’un « business-model » prenant en compte davantage parfois le financier au détriment du sportif, ce report a entraîné une perte de revenus pour des dépenses déjà engagées et des recettes publicitaires non obtenues. La situation actuelle ne plaidant pas franchement non plus pour un optimisme forcé comme on a pu le constater lors du récent France-Ukraine au Stade de France lors du match amical du 7 octobre dernier.

Une rencontre sans enjeu, remportée haut la main par les « Bleus », 7 buts à 1 mais dans un contexte « Covidien » hautement pénalisant pour l’Ukraine. En effet, les joueurs de l’ancienne gloire, Ballon d’Or 2004 avec le Milan AC, et actuel sélectionneur Andriy Chevtchenko ont non seulement été sèchement battus mais ils ont dû, en plus, souffrir d’avoir eu des joueurs testés positifs au « Covid-19 ». Une situation irréelle notamment au poste de gardien de but tellement perturbante qu’avec trois gardiens testés sur quatre, les Ukrainiens auront dû « réactiver » en catastrophe une autre ancienne gloire du Dynamo Kiev, Oleksandr Shovkovskiy. Celui-ci, 45 ans au compteur et assistant de Chevtchenko a dû enfiler les gants pour faire le nombre sur le banc… Une situation ubuesque mais prévisible et qui sera au cœur des interrogations si la pandémie continue et est active d’ici juin 2021.

« Je dois dire qu’au lieu de douze pays, cet Euro pourrait n’être organisé que dans onze, huit, cinq ou même un seul » - Aleksander Ceferin, le président de l’UEFA, en plein dilemme mais… optimiste

Annulations, reports et questionnements donc sur la pérennité de la compétition, voici les ingrédients qui ont jalonnés le parcours de l’UEFA et il n’est pas sûr, économiquement parlant, que cela n’ait pas d’incidences sur un avenir plus ou moins lointain. Décalé d’un an, de juin 2020 à juin 2021 (entre le 11 juin et 11 juillet 2021), le Championnat d’Europe se déroulera dans des conditions inédites pour le coup. Dans un contexte de grande précarité et d’interrogations sanitaires, comment parvenir à faire de cet enjeu, voulu comme festif, une fête populaire ? Les diverses, mais nécessaires, restrictions et autres blocages ne permettant pas la réunion de supporteurs dans et autour du stade étant, là encore, au cœur de ce débat. Dans ces conditions, quel sera l’impact d’une compétition privée de ses supporteurs, sel de tout sport, surtout dans autant de pays concernés par la compétition ? Une question que l’UEFA se posera nécessairement. Et à laquelle une réponse ne pourra être apportée qu’en 2021 probablement pour savoir si toutes les conditions seront réunies pour réussir ou non l’impossible. Là encore, si l’UEFA se veut rassurante, impossible de pouvoir anticiper ou préparer sereinement une compétition à une date aussi lointaine et avec autant de contraintes sur le papier.

Euro 2020 : quel espoir pour juin 2021 et quid des supporters ?

Impossible (c’est le mot actuel) donc de se projeter avec certitude dans l’avenir, c’est un fait. En effet, tant que la crise sanitaire durera et qu’un éventuel vaccin ne sera trouvé, il faudra vivre avec le virus bon gré mal gré en tentant de le freiner. Dans ces conditions, l’Euro 2020 reporté en juin 2021 n’est pas encore certain d’être joué malgré le vœu de l’instance européenne. Une situation en relation avec celle que nous vivons et pour laquelle, le seul espoir repose sur un traitement rapide et efficace de la situation au niveau médical. Dès lors, l’UEFA ne perdant jamais la main a pu repousser l’Euro 2020 d’une année supplémentaire tout en gardant l’appellation « Euro 2020 » au détriment de 2021. C’est déjà cela d’économisé, notamment en termes de marketing pour éviter les changements de logo. Cependant, alors que la Ligue des Champions s’est déroulée en août dernier, sans public, mais avec des matchs à enjeux et une cascade de buts, quelle sera la configuration dans neuf mois ?

L’UEFA, tel un Etat dans l’Etat, est face à une double problématique : être en mesure de faire dérouler la compétition et accueillir une des composantes essentielles d’un match, à savoir le public. Là encore, difficile de prévoir et surtout de mettre en place une politique claire tant que la situation sanitaire ne se sera améliorée, sachant que les championnats européens ont repris depuis, mais avec une jauge de personnes réduite et de plus en plus de cas de joueurs positifs. Un impact d’autant plus négatif que le rythme d’une compétition aussi longue (un mois entier) qu’un Championnat d’Europe, avec des matchs tous les trois jours sera à prendre en compte pour la motivation des joueurs. Contrairement à la Ligue des Champions dont le « Final 8 » était plus court en termes de délai et de jours.

Ce n’est qu’un infime espoir qui fait vivre l’Euro 2020 mais il est impossible de prédire l’avenir et savoir si les matchs auront lieu avec du public, une jauge avec une capacité de 30 ou 50% ou bien dans des stades vides pour profiter de Griezmann, Mbappé, Kroos ou Harry Kane.

Quoiqu’il en soit, le format de cet Euro sera inédit et démontrera que cette pandémie fait trembler jusqu’au bout toute la planète football, sportivement parlant. Du jamais-vu, en attendant des joueurs meilleurs et surtout une amélioration de la situation. Dans l’histoire des compétitions européennes, jamais un Championnat d’Europe ne s’est déroulé une année impaire et cela démontre que le sportif passe désormais au second plan. Un vrai coup d’arrêt pour une compétition qui aurait été l’apogée de la coordination européenne, sur le terrain, avec pour paraphraser le Général de Gaulle, la réunion du football d’Europe de « l’Atlantique à l’Oural ».

« Show must go on », adaptation de l’UEFA à 12 pays hôtes… ou pas ?

En attendant, quel sera l’avenir de l’Euro 2020-(2021) ? La question reste encore en suspens, même au sein des instances de l’UEFA alors que son président, le Slovène Aleksander Ceferin, n’exclut aucun changement de format pour pallier à la situation. Dans une vie sans « Covid », douze pays auraient dû prendre part au festin européen entre Nations européennes dans un large panorama de villes choisies. De Londres à Munich et Bilbao, en passant par Rome, Amsterdam, Glasgow, Copenhague, Budapest, Bucarest, Dublin et Saint-Pétersbourg, l’Europe était au cœur de l’Euro de football. En comptant également Bakou, en Azerbaïdjan, et qui se trouve actuellement sous le feu des projecteurs en raison du regain de tension avec son voisin arménien pour le contrôle du Haut-Karabagh et l’on obtient un vrai casse-tête pour les instances dirigeantes à l’heure actuelle.

Si d’aventure, Ceferin et l’UEFA sont dans une quasi-obligation d’indiquer que l’Euro aura lieu, business oblige, malgré les conditions et probablement avec moins de pays intervenants, la perte financière serait terrible en cas d’annulation ou de nouveau report. D’un côté, en cas de réduction des participants, il faudra compenser les répercussions financières pour les pays lésés. Dès lors, les sponsors et les pertes économiques risquent d’entraîner des problématiques pour des pays qui ont massivement, parfois, investis pour accueillir l’évènement. De l’autre, si l’Euro ne peut être joué, les pertes seraient encore plus grandes, même si la tendance est de continuer et de suivre le modèle du « Final 8 » de Lisbonne pour la Ligue des Champions, en août dernier. Une situation certes compliquée puisque les projections sanitaires ne semblent pas optimistes alors que l’on constate que le niveau de la « seconde vague » est au plus haut dans plusieurs pays européens. Mais pas impossible à mener si l’UEFA veut maîtriser un minimum ses coûts et pertes et se projeter à travers une compétition capitale dans son format pour la crédibilité de l’institution européenne.

Alors, 2020 devait être l’année du sport entre Euro de football, Jeux Olympiques et les autres traditionnelles compétitions. A l’heure actuelle, toutefois, il est peu sûr que les sportifs qui sont de plus en plus nombreux à être testés positifs comme dernièrement, le Milanais Zlatan Ibrahimovic (Suède), le Parisien Kylian Mbappé et le Turinois Cristiano Ronaldo (Portugal) l’ont été, gardent un bon souvenir de celle-ci. Dans le football, plus que dans d’autres secteurs d’activité, des renversements de situation existe toujours.

Des victoires qui se forgent dans la difficulté et l’adversité envers et contre tout, ce qui en fait le sel de ce sport. Cependant, l’UEFA devra gérer un tout autre combat contre un adversaire plus pernicieux et sans aucune mesure possible pour éviter le choc frontal. Dans tous les cas, il faudra s’armer de patience collectivement, attendre et espérer que la situation mondiale se décante afin que la vie reprenne son cours d’avant. Si tel est le cas, l’Euro 2020 reporté en 2021 permettra de « compenser » notamment pour les Européens et de juguler une attente après une année hautement compliquée. Reste à savoir quand et sous quelles conditions il sera possible de compenser cette année noire. La réponse sera sûrement connue d’ici le 11 juin prochain… ou pas. Ironie de l’histoire, si report ou annulation il y a, un pays pourrait continuer à « tirer » son épingle du jeu. En effet, le Portugal de Cristiano Ronaldo, tenant du titre obtenu en 2016, garderait une année de plus son trophée pour une situation décidemment inédite à tout point de vue. 2020, l’année de tous les possibles dans un monde devenu impossible.

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