Deux en un – De combien de Länder la République a-t-elle besoin ?

, par Sabrina Vorbau , traduit par Cécile Gérard

Deux en un – De combien de Länder la République a-t-elle besoin ?

Le gouvernement français souhaite faire passer le nombre de régions de 27 à 15, dans le but diminuer les coûts de gestion. D’autres États fédéraux, comme l’Allemagne, envisagent de plus en plus une fusion de leurs États fédérés. Cela va de pair avec de nombreux avantages, mais aussi avec un arrière-goût désagréable.

L’annonce était presque passée inaperçue : alors que la presse écrite attendait impatiemment des nouvelles sur la vie privée de François Hollande, celui-ci annonçait vouloir réduire le nombre de régions françaises de 27 à 15. Les petites régions entraînent de lourds frais de gestion et économiquement parlant, une fusion avec des régions plus grandes est un choix judicieux. D’autant plus que, prises individuellement, de nombreuses régions de France seraient incapables de se faire une place dans la concurrence européenne en raison de leur taille. C’est pour cette raison que la Commission européenne appuie le projet de réforme de François Hollande.

L’endettement de la France a à nouveau cru, au cours des dernières années, pour atteindre près de 93 pour cent du PIB. C’est pourquoi le président souhaite épargner 50 milliards d’euros entre 2015 et 2017. Pour ce faire, il envisage un changement de structures, une simplification de l’appareil étatique et une réorganisation de la carte de France : moins de régions, moins de départements.

L’Alsace et la Lorraine seront vraisemblablement regroupées. Par ailleurs, une proposition prévoit de fusionner les départements de Basse et de Haute-Alsace et le Conseil régional d’Alsace. Cela devrait être entériné par un référendum populaire après une phase d’acclimatation.

Ce projet n’est pas neuf. Il y a cinq ans, le Président de l’époque, Nicolas Sarkozy, avait déjà soumis cette proposition, qui s’était toutefois heurtée à la résistance des habitants d’Alsace et de Lorraine. Aujourd’hui, les chefs administratifs libéraux-conservateurs alsaciens et socio-démocrates lorrains se rencontrent tous les quatre mois dans le cadre de négociations communes pour échanger des idées favorisant une coopération plus étroite. L’objectif est de rendre la population plus réceptrice à l’idée de fusion. Cela semble porter ses fruits : d’après un sondage représentatif, moins de citoyens se prononceraient actuellement contre une fusion en cas de vote.

Stratégies de la République fédérale

Cela fait quelque temps que l’on discute d’une fusion de certains länder en Allemagne. Parmi les seize que compte le pays, beaucoup font face à de graves problèmes financiers. À cela vient s’ajouter la règle d’or budgétaire qui exerce une pression sur les budgets des länder plus petits et des villes-États. D’après la fédération allemande des contribuables, il serait possible d’épargner annuellement un demi-milliard grâce à la réduction de dix pour cent du personnel administratif résultant de la fusion. Une des possibilités serait un État composé de neuf länder.

À l’inverse de son voisin français, la Sarre se refuse à fusionner avec la Rhénanie Palatinat, même si le secteur des soins de santé, l’offre d’études et la coopération en matière de justice pourraient profiter d’une collaboration entre les deux länder. Pour les länder riches, tel l’État libre de Bavière, une fusion des petits länder arriverait à point nommé. Il serait ainsi possible de réaliser des économies lors des paiements de la péréquation financière.

La fusion entre le Bade et le Wurtemberg, réalisée en 1952, témoigne des chances de réussite d’un tel procédé. Selon l’office régional statistique du Bade-Wurtemberg, la croissance économique qui s’en est suivie fut fulgurante et reste performante.

Coopération plutôt que fusion

La définition contient déjà un malentendu. Une fusion ne prévoit pas de retracer les frontières mais est davantage perçue comme une complémentarité entre la plupart des régions apparentées.

Il ne fait aucun doute que d’un point de vue économique, l’idée de fusion est raisonnable et serait avantageuse pour bon nombre d’États en Europe qui comptent énormément de municipalités, provinces et régions. L’absence de synergies entraîne une hausse continue des coûts pour des États membres déjà en proie à l’endettement. Des fusions d’administrations en aval et une réduction du personnel du secteur public permettraient de réaliser des économies et de gagner en rapidité pour certains processus au sein de la communauté. Et pourtant, une réduction de personnel va de pair avec une perte d’emplois : un arrière-goût amer d’une approche de réforme efficace économiquement.

Pour l’infrastructure, les avantages liés à une fusion devraient prévaloir sur l’économie de personnel : création de réseaux énergétiques, hydrauliques et de communication, coopération transfrontalière dans le secteur de l’enseignement et coopération en matière d’implantation d’entreprises.

Mais, pour ce faire, une fusion formelle des länder est-elle nécessaire ? Il est aujourd’hui déjà possible de mettre sur pied une coopération transfrontalière dans pratiquement tous les domaines publics par le biais de traités intergouvernementaux, de conventions et d’associations transfrontalières. La qualité et l’efficacité des prestations publiques peuvent ainsi être améliorées, même sans avoir recours à un référendum populaire ou à une modification de la constitution. Ce qui constituerait un gain de temps, d’argent et de papier !

Vos commentaires
  • Le 5 mai 2014 à 18:57, par Lame En réponse à : Deux en un – De combien de Länder la République a-t-elle besoin ?

    Dans le cas de la France, le « contracting out » territorial vise surtout à licencier un maximum de fonctionnaires pour convertir leur charge salariale en allocations de chomage à faible durée de vie. De ce point de vue, ne serait-il pas plus simple de modifier la gestion des collectivités territoriales au lieu de fusionner à tour de bras ? Voici mes propositions :

     Suppression des impôts territoriaux au profit d’un financement non contributif. L’Etat verse un budget minimum garanti à chaque collectivité et les aident à mettre en oeuvre des fond d’investissements pour compléter l’enveloppe.

     Les administrations territoriales sont remplacées autant que possible par des SCIC et emploie un maximum d’intérimaires. On limite ainsi l’inflation du nombre de fonctionnaires territoriaux en cas d’accroissement des compétences des collectivités territoriales et l’on permet aux administrés d’exercer un contrôle accru sur la qualité du service.

     Renforcer la démocratie référendaire territoriale pour permettre aux citoyens de combattre plus efficacement les gaspillages budgétaires.

    Pour financer la réforme, on pourrait dégraisser l’Etat en supprimant la multitude de comités consultatifs inutiles. La plupart n’ont été créé que pour caser des mandataires sortant ou des troublions ou faire plaisir à l’UE ou une autre organisation internationale en donnant l’illusion que ces directives ont donné lieu à des réformes.

    Néanmoins, si l’on veut à tout prix résoudre les problèmes par une fusion de collectivité, ne vaut-il pas mieux aller au bout de la logique ? Il s’agit alors d’appliquer les réformes suivantes :
     Regrouper l’ensemble des communes de l’hexagone en communautés urbaines ou fédérations rurales au niveau du canton.
     Remplacer l’ensemble des départements et régions par une région unique.
     Appliquer à chaque région et collectivités d’outre-mer le régime de la collectivité d’outre-mer.

    Tant qu’à faire autant éviter les demi-mesures.

  • Le 5 mai 2014 à 22:20, par tnemessiacne En réponse à : Deux en un – De combien de Länder la République a-t-elle besoin ?

    @Lame

    "Dans le cas de la France, le « contracting out » territorial vise surtout à licencier un maximum de fonctionnaires pour convertir leur charge salariale en allocations de chomage à faible durée de vie."

    La fin de votre phrase est assez choquante mais le nombre de trucs chocants qui passe sur ce site quand c écrit avec le coeur on pe répondre sinon c ke de la loghorré verbale genre jsuis un intellectuel, mais va dire ça à des gens normaux dans la rue t’aura même l’occasion d’en placer une. C pas ke pour toi dsl

  • Le 6 mai 2014 à 08:33, par Lame En réponse à : Deux en un – De combien de Länder la République a-t-elle besoin ?

    @tnemessiacne

    Deux passages de l’article indiquent clairement que le but des fusions est le licenciement de fonctionnaires. Désolé si je choque le lecteur en soulignant les conséquences humaines de ce genre d’économie. J’espère qu’on ne m’accusera pas d’euroscepticisme parce que je ne l’ai pas passé sous silence.

    @Tout le monde

    En France, les projets de fusion de région ne sont pas uniquement motivés par des objectifs financiers. Pour les élections européennes, les partis traditionnels français ont remplacé la circonscription nationale unique par des superrégions. Ces dernières sont plus favorables électoralement aux grand partis mais restent suffisamment déconnectées du contexte régional pour ne pas conférer d’avantages électoraux aux partis régionalistes ou séparatistes.

    Le système des superrégions est constesté par une large partie de l’opinion publique qui est partagée entre le retour à la circonscription unique ou l’élection des eurodéputés dans des circonscriptions régionales ; cette dernière option est minoritaire. Convertir les régions actuelles en dix à quinze régions géantes permettrait aux partis traditionnels de faire élire les eurodéputés dans un cadre régional en bénéficiant des avantages des superrégions électorales. Les partisans de l’Europe des régions, on n’en doute pas, se rallieraient massivement au nouveau système.

  • Le 10 mai 2014 à 10:12, par EtieN En réponse à : Deux en un – De combien de Länder la République a-t-elle besoin ?

    L’objectif de la réforme territoriale n’est pas de licencier des fonctionnaires (cf. On ne peut pas licencier un fonctionnaire).

    L’objectif est de supprimer des postes qui ne servent à rien. Trouvez-vous utile qu’un même territoire bénéficie des aides économiques de l’UE, des ministères, des services emploi et europe de la préfecture, de pôle emploi, du service économique régional, de l’agence économique régionale, du service économique départemental, de l’agence de développement du Département, des chambres consulaires, de l’intercommunalité, et enfin de la maison de l’emploi de la commune ? (cas réel et malheureusement fréquent).

    Pendant ce temps, la justice, la police, et l’éducation râclent les fond de tirroirs, et à la différence de ce qui se fait en Allemagne, l’Etat et ses multiples banques (CDC, BPI, Oseo) n’ont pas un sou pour sauver Alstom.

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