Vous avez dit “75 million d’habitants en plus” ?
En mai 2004, l’Union européenne opère le plus grand élargissement de son histoire : 10 nouveaux Etats en plus, 10 nouvelles langues officielles, 738 000 km2, 75 millions de citoyens. L’Union se trouve à jamais changée par cet événement qualifié d’historique.
Un mois plus tard, les citoyens européens, dont le nombre s’élève alors à 455 millions, sont appelés à voter pour élire leurs représentants au Parlement européen. Si les Européens “de l’Ouest” votent pour la 6ème fois, les Européens “de l’Est”, quant à eux, votent pour la 1ère fois. Le mois de mai avait accueilli de nombreux événements célébrant la réunification des deux Europes, le mois de juin marquera l’histoire européenne en la concrétisant : tous les Européens, égaux en droit, voteront pour un seul et même Parlement. Les élections européennes doivent être le premier pas vers une nouvelle page de l’histoire européenne. Elles doivent devenir un événement historique.
Le soir du 13 juin, les résultats des élections tombent : la droite reste en tête avec 34% des voix, suivie par les Sociaux-Démocrates (24%), puis des Libéraux et des Écologistes. L’ordre est le même que celui des dernières élections de 1999, les scores eux-aussi sont semblables. Les équilibres politiques du Parlement européen restent inchangés. En clair, le grand élargissement, l’événement qui se devait d’être historique, ne s’est pas reflété dans les urnes. Pire, l’abstention, malgré l’arrivée de 75 millions de nouveaux habitants, continue son ascension. De 50%, elle passe à 55%. 5 points de plus pour 75 millions d’habitants de plus. Une déception, les Européens s’unissent dans le non-vote.
En France, des esquisses du “Plombier polonais” à la “tête de turc”
Le contexte de l’élargissement de l’UE vers l’Est s’est doublé dans certains pays des prémices de la campagne référendaire relative à la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe.
Deux ans auparavant, en 2002, est établie une convention sur l’avenir de l’Europe présidée par Valéry Giscard d’Estaing. Cette convention a pour rôle d’établir un traité unifiant et rationalisant le droit européen jusqu’alors divisé en une multitude de traités et de chartes. Le projet de traité a aussi, et comme son nom l’indique, pour vocation d’établir une constitution européenne ainsi que de préparer à une Europe élargie. La convention prend fin en 2003, quelques mois avant les élections. Si l’ensemble des Etats signent le traité en octobre 2004, l’Espagne, le Luxembourg, la France et les Pays-Bas annoncent que la ratification du traité sera soumise à référendum national. Ces référendums stimulent le débat sur l’organisation institutionnelle européenne et l’avenir de l’Union. Toutefois, ces derniers provoquent également chez certains partis des slogans simplistes et de la manipulation, voire de la désinformation.
Des partis comme le Rassemblement national ou le Mouvement pour la France instrumentalisent les peurs liées à l’élargissement et à l’établissement du traité. Teinté de xénophobie et de racisme, des campagnes de désinformation sont lancées pendant la campagne des européennes de 2004. Que cela soit la promesse d’une “invasion de travailleurs polonais” ou d’une submerssion de “drogues et de crimes” venus de Turquie, les déclarations et les mensonges fusent faisant apparaître les infox qui fleuriront pendant la campagne référendaire de 2005. Des propos similaires vont être entendus aux Pays-Bas ou en Espagne, ainsi qu’au Royaume-Uni. Résultat : en 2005, 20 millions d’Européens bloquent la ratification d’un traité en impliquant 455 millions.
En ce qui concerne les élections européennes de 2004, les Français décident de voter en grande majorité pour des partis traditionnels, notamment le PS qui arrive en tête par une division de la droite et du centre entre l’UMP qui arrive deuxième et l’UDF qui arrive troisième. Les partis eurosceptiques quant à eux augmentent, totalisant, tous partis confondus, 20% des voix. Du jamais vu…jusqu’à lors.
1. Le 25 mai à 11:42, par Henri En réponse à : Élections européennes de 2004 : l’élargissement invisible ?
« En ce qui concerne les élections européennes » Il faudrait sérieusement analyser pourquoi, Paul Brachet utilise, comme tout le monde, l’expression « les élections européennes », puisqu’il s’agit d’une seule élection européenne qui n’a lieu qu’une seule fois tous les cinq ans. En Union Européenne, il n’y a qu’une seule élection européenne. L’Union Européenne en est toujours là.
2. Le 27 mai à 12:34, par Paul Brachet En réponse à : Élections européennes de 2004 : l’élargissement invisible ?
Bonjour et merci pour ce commentaire.
J’ai utilisé l’expression au pluriel en raison de la règle qui veut que le pluriel ou le singulier soit décidé en fonction du nombre de personnes que l’on élit par la participation au scurtin. On doit ainsi écrire les élections européennes, puisque l’on vote pour plusieurs représentants in fine (l’ensemble des eurodéputés), et l’élection présidentielle puisqu’à la fin, on vote pour désigner une seule personne.
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