Europe et Droit d’asile : une promesse trahie

Une Tribune du Président d’ « Amnesty International / Malte »

, par Jean Pierre Gauci

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Europe et Droit d'asile : une promesse trahie

Alors que la saison estivale commence, les « boat people » débarquent sur les côtes européennes de la Méditerranée. Ces immigrants ne portent avec eux aucun papier ; seul bagage, leurs économies qui pour nous semblent dérisoires. Il nous est difficile de voir qu’au travers de ce flux d’immigrants, chacun d’entre eux transporte avec lui toute son histoire, sa vie et surtout ses espoirs...

Nous ne voyons que les 20 Erythréens débarquant sur nos côtes [1], quand dans l’ombre des centaines sont arrêtées pour avoir tenté d’exprimer pacifiquement leurs opinions ou leur croyance religieuse. Nous ne parlons pas non plus des centaines de prisonniers politiques incarcérés sans même un procès, de ceux qui subissent la torture pour avoir essayé de s’échapper à la conscription militaire. Alors oui, nous parlons de ces 100 somaliens arrêtés par nos forces armées [2] mais connaissons nous la violence politique de ce pays qui s’effondre ? Nous parlons du Soudan et de la République Démocratique du Congo, mais combien sont au courant du quasi génocide au Darfour ?

Alors que le nombre de demande d’asile a continuellement progressé en Europe depuis les dernières années, l’importance politique donnée, dans chaque pays européen, à la gestion du droit d’asile n’a pas diminué. En vérité la question d’une politique commune sur le droit d’asile est l’une des plus complexes et des plus chargées politiquement que l’Union Européenne a du faire face. L’opinion publique est aussi partie prenante. Le droit d’asile est devenu un sujet majeur de discussion dans plusieurs pays européens, et particulièrement pour les pays frontaliers.

L’année 2005 fut marquée par la violation des droits de l’homme sur ce sujet, de par l’interception, la détention et l’expulsion des immigrants étrangers, même de ceux demandant la protection internationale. Au moins 13 personnes furent tuées pour avoir tenté de traverser la frontière hispano-marocaine : un résultat des moyens ’’létaux’’ et disproportionnés utilisés par les agents frontaliers espagnols et marocains pour empêcher les immigrants d’accéder à l’enclave de la Ceuta.

Hommes, femmes et enfants continuent de faire face aux barrières procédurales du droit d’asile. En Grèce, en Italie ou au Royaume Uni, certains sont illégalement retenus, ou se voient refuser une aide juridique nécessaire. Ils sont illégalement expulsés avant même que leur demande soit entendue. Pendant ce temps, d’autres sont renvoyés dans des pays où le risque que leurs droits fondamentaux soient violés, persiste. Le fait que des états membres de l’Union européenne soient partis prenants à ces actions, illustre l’échec de l’Union européenne à prendre conscience qu’elle est face à une crise ’’protectionniste’’ bien pire que la gestion de toutes ces demandes de droit d’asile.

L’importance croissante de la question sur le droit d’asile des réfugiés est souvent liée aux problèmes du racisme et de la discrimination. Cette question s’étend aussi aux nouveaux membres, parmi lesquels, le plus petit d’entre eux. A Malte, les droits de l’homme des clandestins (comprenant le demandeur d’asile aussi bien que les réfugiés) continuent d’être violés suite à la mise en place d’une politique de détention systématique et du fait de conditions de détentions critiquées par beaucoup comme cruelles et inhumaines. Depuis 2002, l’on estime que 5583 personnes sont passées par les 5 centres de détention présents à Malte. En 2006 le nombre de détenus s’élevait à 1017 réfugiés.

Conséquence directe de cette politique, les centres sont surpeuplés alors que la température en hiver descend sous la barre des 6 degrés sans aucun système de chauffage approprié ou de distribution de vêtements adaptés. Néanmoins, en 2005 les procédures sur le droit d’asile furent améliorées mais elles sont encore loin des standards internationaux. De plus, en novembre 2005, le gouvernement a amendé l’article 10 de loi sur les réfugiés, permettant ainsi à Malte de faire déplacer les réfugiés sans attendre que leur recours en appel soit étudié. Mauvais traitements, conditions de détentions cruelles, brutalité des agents pénitenciers, voilà les faits rapportés de ces centres de détention.

L’importance croissante de la question sur le droit d’asile des réfugiés est souvent liée aux problèmes du racisme et de la discrimination. Sur les derniers mois, plusieurs pays membres de l’Union européennes ont fait face à une recrudescence des crimes haineux, de personnes victimes d’agression n’ayant pour seul autre raison que celle de la couleur de leur peau. De nombreux incidents rapportent que des immigrants ont été frappés dans la rue, pendant qu’une série d’attaque a été menée à l’encontre de ceux - personnes ou organisations - qui ont osé parler en faveur des droits de l’homme.

Malheureusement, cette réalité est souvent ignorée, mais elle est - et restera encore - une marque honteuse pour la protection des droits de l’homme en Europe. Quand est ce qu’enfin nous commencerons à accepter et à faire face à cette réalité ?

Document traduit par Benjamin Anoufa, Adhérent des « Jeunes Européens France ».

- Illustration :

 Demandeurs d’asile au centre de réfugiés de Pavshyno près de Mukachevo, Ukraine. © UNHCR/L Taylor

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Notes

[1N.d.T : Ce texte est une tribune écrite par le Président d’« Amnesty International Malte » décrivant la situation sur place...

[2N.d.T : Même remarque que précédemment.

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