Fémin’histoire : Berty Albrecht

, par Chloé Lourenço, Voix d’Europe

Fémin'histoire : Berty Albrecht

Résistance. Voilà un mot qui pourrait décrire à la perfection Berty Albrecht. Cette jeune infirmière que rien ne prédestinait à un destin hors du commun va pourtant prendre les commande d’un réseau de résistance dès 1940. Pour que la France retrouve sa liberté, elle y laissera sa vie.

Enfance provençale

Berty Wild nait le 15 février 1893 dans une famille protestante d’origine suisse faisant partie de la bourgeoisie marseillaise. Sans histoire, elle suit des cours au lycée Montgrand avant de partir terminer ses études à Lausanne où elle obtient un diplôme d’infirmière en 1912.

Son diplôme à peine en poche, elle part en Angleterre à la veille de la Grande guerre comme surveillante dans une pension de jeunes filles. Elle n’y restera cependant pas longtemps : le conflit à peine déclaré, Berty rentre à Marseille et s’engage comme infirmière dans un hôpital militaire. En 1918, elle épouse un banquier hollandais, Frédéric Albrecht et part s’installer avec lui aux Pays-Bas, puis à Londres à partir de 1924. C’est à ce moment-là où elle commence à s’intéresser de près à la condition féminine.

Berty la militante

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la personnalité de Berty Albrecht ne passe pas inaperçue. Dès 1931, revenue s’établir à Paris, elle devient membre de la Ligue des Droits de l’Homme et décide de créer une revue au titre évocateur, Le Problème sexuel. Elle défend notamment le droit pour les femmes à avoir accès à un avortement libre. Elle ne verra hélas jamais la réalisation de ce qu’elle espérait.

Dès 1931, Berty vient en aide au réfugiés juifs et opposants au régime nazi qui prend forme outre-Rhin. Elle porte également secours aux exilés Espagnols, fuyant la guerre civile. A la veille du déclenchement du deuxième conflit mondial, elle opte pour une reconversion professionnelle, et devient intendante d’usine. Au lendemain de l’armistice, elle entre aux usines Fulmen à Vierzon, ville proche de la ligne de démarcation. Elle profite d’ailleurs de cette positionstratégique pour faire passer la ligne à de nombreux prisonniers évadés. Pour elle, la Résistance commence.

Berty la Résistante

Comme beaucoup de Résistants de la première heure, Berty Albrecht n’a pas décidé de créer un réseau et de se lancer tête baissée dans des actions coup de poing contre les Allemands. Elle a surtout agi en son âme et conscience, en commençant par de petites choses.

En 1941, elle dactylographie les bulletins de propagande du Mouvement de Libération Nationale crée par Henri Frenay qu’elle connaît depuis 1934, alors qu’elle s’occupait de réfugiés politiques. Elle recrute pour le mouvement et collecte les premiers fonds. Elle déménage alors à Lyon, et, chargée de mission pour le Ministère de la Production industrielle et du Travail, elle crée des ateliers de confection pour les chômeuses.

En 1941, de la fusion du MLN et du mouvement « Liberté » de François de Menthon, naît « Combat », qui se développe sous la direction d’Henri Frenay avec la participation active de Berty Albrecht. Poursuivant sa lutte contre les Allemands, elle établit de précieuses liaisons entre les deux zones au profit du mouvement. Les bureaux de Villeurbanne deviennent rapidement ceux du mouvement et Berty s’efforce aussi de mettre en place un service social de « Combat » pour venir en aide aux camarades du mouvement emprisonnés et à leurs familles.

Les allées et venues attirent l’attention de la police, qui arrête une première fois Berty à la mi-janvier 1942. Cette dernière, relâchée au bout de trois jours sera néanmoins contrainte à la démission. Quelques mois plus tard, en avril 1942, elle est de nouveau arrêtée et internée arbitrairement à Vals-les-Bains. Aucun procès ne se profile, alors qu’elle le réclame ardemment. Berty entame alors une grève de la fin de 13 jours, qui aboutira finalement sur un jugement et une condamnation à six mois de prison ferme.

Berty la martyre

L’invasion par les Allemands de la zone sud, le 11 novembre 1942, risque de compliquer un peu plus encore l’avenir des prisonniers politiques et résistants. Berty Albrecht décide alors de simuler la folie. Envoyée à l’asile psychiatrique de Bron le 28 novembre, elle est libérée par un commando de « Combat » mené par André Bollier, le 23 décembre 1942, grâce également à l’aide de sa fille Mireille et de son médecin traitant.

Refusant de passer en Angleterre, recherchée par toutes les polices françaises et allemandes, elle se cache durant deux mois dans la région de Toulouse puis elle reprend ses activités clandestines et, au début de février 1943, rejoint Henri Frenay à Cluny.

Arrêtée à Mâcon le 28 mai 1943 par la Gestapo au cours d’un faux rendez-vous, elle est torturée et transférée à la prison du Fort Monluc à Lyon puis à Fresnes où elle est incarcérée le 31 mai et placée dans une cellule du quartier des droits communs. Échappant ainsi à la surveillance réservée aux « politiques », elle se donne la mort par pendaison dans la nuit. En mai 1945, son corps est retrouvé dans le jardin potager dans la prison de Fresnes et inhumé dans la crypte du Mémorial de la France Combattante au Mont Valérien. Elle a reçu à titre posthume la Croix de Compagnon de la Libération, la Médaille Militaire, la Croix de Guerre avec palmes et la Médaille de la Résistance.

Berty Albrecht fait partie de ses Résistantes de la première heure qui a préféré donner sa vie plutôt que de voir son pays basculer du côté ennemi. Elle a reçu, à titre posthume, le titre de Compagnons de la Libération. Parmi les 1038 personnes décorées, seules six femmes en font partie. Dont Berty Albrecht. Ne l’oublions jamais.

Un article écrit initialement par Chloé Lourenço pour Voix d’Europe. Nous remercions l’autrice et le site de nous laisser reproduire ici cet article.

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