L’Europe, nouvelle terre d’accueil des femmes afghanes

, par Mélina Bouchet

L'Europe, nouvelle terre d'accueil des femmes afghanes
Le bâtiment de la Cour de justice de l’UE à Luxembourg ©Flickr

Ce 4 octobre 2024, la Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu une décision estimant que toute femme afghane, subissant le régime imposé par les Talibans, peut demander l’asile aux pays membres de l’Union Européenne en invoquant seulement leur nationalité et leur genre.

La situation déplorable en Afghanistan

Les Talibans forment un mouvement islamiste fondamentaliste qui est apparu en 1994 et qui a été fondé par Mohammad Omar. Ils prônent la remise en oeuvre de l’islam “pur” et sont considérés par Ashley Jackson, journaliste, comme des “conservateurs, dans le but d’avoir un véritable gouvernement islamique, un état et une société basée sur une inetrprétation bien plus stricte de l’islam”.

Les Talibans s’emparent de Kaboul, capitale de l’Afghanistan le 27 septembre 1996 et instaurent le régime de l’Emirat islamique d’Afghanistan. C’est en 2001 que le régime prend fin en raison de conflits interétatiques ainsi que intra-étatiques. Mais le 15 août 2021,les Talibans reprennent de nouveau le pouvoir. Des mesures extrêmement restrictives sont prises à l’encontre des femmes et l’atteinte à leur liberté ne fait que croître. Les femmes afghanes ne peuvent pas chanter, réciter de la poésie, lire à voix haute en public, étudier, sortir seule dans la rue et cette liste n’est pas exhaustive. Parmi les nouvelles mesures de 2024, pour la “prévention du vice et la promotion de la vertu”, les femmes sont imposées de se voiler entièrement le corps en public, en couvrant leurs visages pour ne pas “tenter” les hommes.

L’état des demandes d’asiles au sein de l’Union Européenne

Un demandeur d’asile est une personne qui sollicite une protection internationale hors des frontières de son pays, mais qui n’a pas encore été reconnue comme réfugié (Amnesty International). Des textes entourent ce droit d’asile au sein de l’UE : il s’agit du règlement du 26 juin 2013 ainsi que de la directivedu 13 décembre 2011, qui ont été transposés en France par la loi du 29 juillet 2015 ainsi que par un décret du 21 septembre 2015 pris en application de la loi citée. De plus, la France consacre le droit d’asile comme un principe à valeur constitutionnelle découlant du préambule de la Constitution de 1958 par une décision du Conseil Constitutionnel du 13 août 1993.

En 2022, 131 254 demandes d’asiles ont été formulées à l’intention des Etats membres de l’UE, avec un taux d’acceptation de 42%, soit 56 000 personnes reconnues réfugiées. Parmi celles-ci, 15% des demandes provenaient de citoyens afghans, ce qui représente 17 000 demandes sur les 131 254. Ces demandes ont connu une hausse de 37% entre 2021 et 2022 (Rapport 2023 sur la situation d’asile, Agence de l’UE pour l’asile). On peut donc facilement observer qu’au regard de ces chiffres, la nécessité des citoyens afghans d’une protection diplomatique face à ce régime ne garantissant plus et remettant en cause les droits et libertés de l’Homme est établie.

Une décision positive au regard des restrictions en cours

Malgré les prochaines mesures restrictives qui vont être mises en vigueur avec le Pacte européen sur la migration et l’asile, la Cour de justice de l’Union européenne rend une jurisprudence qui peut être considérée comme limitant la portée du Pacte.

En l’espèce, deux femmes afghanes ont demandé le statut de réfugié aux autorités autrichiennes et ont été déboutées de leurs demandes. L’une d’entre elles a quitté l’Afghanistan adolescente, avec sa mère et ses sœurs, pour échapper au patriarche qui a tenté de les vendre. L’autre est née en Iran d’une famille afghane sans permis de séjour et a donc demandé l’asile en Autriche. A la suite de ce refus, elles ont fait appel auprès de la Cour administrative suprême d’Autriche, qui a saisi la Cour de justice de l’UE d’un recours préjudiciel pour se prononcer. Le recours préjudiciel permet aux juridictions d’un Etat membre d’interroger la Cour de justice de l’UE sur l’interprétation d’un texte de droit de l’UE applicable au litige dont il est saisi. La Cour de justice de l’UE fait valoir que “la situation des femmes sous le nouveau régime des Talibans, justifie, à elle seule, l’octroi de ce statut”. Elle estime donc qu’un Etat membre de l’UE peut, dans le cas de l’examen d’une demande d’asile d’une femme afghane, prendre uniquement en considération le sexe et la nationalité. Il faut tout de même souligner que les décisions prises par la Cour de justice de l’UE s’imposent aux Etats membres.

C’est une lueur d’espoir pour l’ensemble des femmes afghanes malgré une réalité économique qui ne permet qu’à un petit nombre de pouvoir échapper au nouveau régime. Cette décision s’adresse tout particulièrement aux femmes afghanes ne résidant pas en Afghanistan, d’échapper à un retour forcé. On ne peut que souhaiter que la Cour de justice de l’Union Européenne étende cette décision auprès d’autres femmes persécutées dans le monde.

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