L’incroyable court-termisme du Royaume-Uni

, par Charles Nonne, Claire Darme

L'incroyable court-termisme du Royaume-Uni

Il y a quelques mois, l’affaire de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) a de nouveau fait la une des journaux britanniques. Le gouvernement britannique a annoncé à plusieurs reprises qu’il envisageait de retirer le Royaume-Uni de la CEDH, sous prétexte que les derniers développements jurisprudentiels empêcheraient le pays de se protéger contre les criminels. Une telle allégation est avant tout une démonstration brillante de la vision politique court-termiste de David Cameron.

La Cour européenne des droits de l’homme est un instrument essentiel dans la lutte pour le respect des droits de l’Homme, non seulement au Royaume-Uni, mais également en Europe et au-delà. Si l’on prend en considération la problématique dans un cadre plus général, il est évident que dans certains pays comme la Turquie ou la Russie – les plus condamnés par la Cour –, la CEDH est parfois le seul recours pour des individus dont les droits ont été violés par leur propre État. Ce serait une honte si le Royaume-Uni donnait à ces pays une excuse pour se soustraire à ce garde-fou des défenseurs de la dignité humaine.

Par ailleurs, il est tout simplement inexact de présenter la CEDH comme un élément étranger au système judiciaire britannique. Le Royaume-Uni nomme lui-même le juge qui le représentera au collège des juges. Jusqu’à très récemment, le juge britannique était également président de la Cour. Il est encore plus important de garder à l’esprit que la création de la CEDH dans les années 1950 fut principalement permise grâce à l’impulsion et à l’influence des juristes et hommes politiques britanniques. La CEDH est en réalité l’une des plus grandes réussites du Royaume-Uni en Europe. Quitter la Convention ne serait rien de moins qu’une trahison de l’héritage et de l’honneur britannique.

En dernier lieu, le Royaume-Uni n’est que très rarement condamné par la Cour, qui rejette le plus souvent les plaintes déposées contre le pays au motif qu’elles sont infondées. Le Royaume-Uni n’a aucune raison de jouer les victimes alors qu’il dirige, plus qu’il ne subit, le système de la CEDH en tant qu’État membre.

Il y a d’un côté les sujets qu’un parti utilise pour gagner des voix. Au-delà, il y a les actions qui sont dans l’intérêt des peuples. Quitter la CEDH, ou prétendre qu’il s’agirait d’un choix judicieux, pourrait apporter à David Cameron les voix qu’il espère engranger ; mais il s’agirait surtout d’un coup fatal aux revendications britanniques pour une meilleure Europe.

Vos commentaires
  • Le 19 août 2014 à 19:01, par Laurent Bonsang En réponse à : L’incroyable court-termisme du Royaume-Uni

    à titre personnel si le Royaume-Uni venait à quitter la CEDH la question de la poursuite de la présence de ce pays au Conseil de l’Europe se posera inévitablement et je ne vois pas comment de fait le Royaume-Uni continuerait d’être membre du Conseil de l’Europe.. ce qui en passant ferait de ce pays le seul pays européen à ne pas être membre du Conseil de l’Europe tout comme le Belarus, belle référence non !

    d’autre part, cette attitude des actuelles autorités britanniques ne doit elle pas être regardée par rapport à la question de la poursuite de la présence du Royaume-Uni parmi les Etats membres de l’Union européenne et alors que les négociations pour l’adhésion de l’UE à la CEDH (merci au Traité de Lisbonne !) sont en court

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