Au Royaume-Uni, 114% du seuil national requis a déjà été atteint, tandis qu’en Roumanie, en deuxième position, le taux est de 10%. Ce projet n’est-il qu’une « Initiative Citoyenne Britannique » dissimulée sous le drapeau européen, ou est-ce une réelle opportunité pour les citoyens non britanniques d’exprimer leur solidarité européenne pour aider ceux qui en ont besoin ?
La culture militante britannique aux portes de Bruxelles
Au Royaume-Uni, groupes de campagne et militants pro-européens ont eu recours aux pétitions parlementaires, sans succès. Des débats parlementaires, accordés après des pétitions ayant dépassé les 100 000 signatures, se sont tenus sur les questions de la tenue d’un référendum sur l’accord du Brexit, de l’inclusion de l’option de rester dans l’UE lors du vote parlementaire sur l’accord, ou encore sur l’abandon de l’article 50 dans le cas où la campagne pro-Brexit du Leave aurait enfreint la loi électorale durant la campagne du référendum (c’est effectivement le cas). Bon nombre d’autres pétitions ayant dépassé les 10 000 signatures ont poussé le gouvernement à rédiger une réponse copiée-collée évoquant le référendum de 2016 ainsi que la « volonté du peuple ». Une lassitude des pétitions se répand parmi les partisans et les Remainers engagés en oublient lesquelles ils ont déjà signées. Bien souvent, le but n’est pas réellement de proposer une politique potentiellement acceptable pour le gouvernement (pour quelqu’un qui n’hésite pas à brandir l’argument de la « volonté du peuple », Theresa May est étonnamment peu disposée à engager le dialogue avec le peuple), mais de faire valoir des arguments politiques.
En cela, l’initiative « Citoyenneté permanente de l’UE » est le prolongement de la campagne britannique, cette fois-ci portée au niveau européen. L’initiative, en un sens, ressemble fort à une tentative détournée de changer le cadre légal de l’UE. Elle passe également pour un rejet absolu du principe qu’un Etat non-membre ne puisse mieux s’en sortir qu’un Etat membre. Les gouvernements britanniques successifs sont connus pour leurs constantes requêtes de concessions et de droits privilégiés au sein de l’UE, il n’est donc pas difficile de conclure que cette initiative n’est qu’un exemple supplémentaire de cet exceptionnalisme. Le site de la campagne est fortement centré sur le Royaume-Uni et ne présente que peu d’arguments encourageant les citoyens d’autres pays à signer l’initiative.
Une opportunité de faire preuve de solidarité
En même temps, l’idée n’est pas entièrement étrangère à l’UE des 27. En 2017, le représentant du Parlement européen dans les négociations du Brexit, Guy Verhofstadt, avait proposé un modèle où les citoyens du Royaume-Uni pourraient « conserver leur citoyenne européenne, au cas par cas ». Il a évoqué la détresse dans laquelle se trouvent les millions de citoyens britanniques ayant voté pour rester dans l’UE, prenant le parti d’aborder le problème sous l’angle de la solidarité envers les Britanniques pro-européens.
L’Ecosse en particulier, ayant voté pour le maintien dans l’UE, a reçu de remarquables élans de solidarité. Peut-être peut-on également y voir une vague de soutien et de compassion pour la petite nation opprimée dont le gouvernement a mis l’accent sur l’ouverture d’esprit et la tolérance. Il peut être plus difficile pour les Remainers d’attirer la sympathie, puisqu’on assimile instinctivement un peuple à son gouvernement. Les Remainers ont donc été particulièrement clairs sur ce point : certes, leur gouvernement n’aime pas l’UE, mais ce n’est pas leur gouvernement. En ce sens, l’Initiative Citoyenne Européenne mérite autant de soutien que la cause des Ecossais pro-européens.
Nous pouvons cependant espérer que la campagne adoptera une perspective plus européenne : une reconnaissance qui montrerait que le soutien apporté par le continent est apprécié et, en l’occurrence, essentiel. Pour commencer, il serait bon de considérer sérieusement la campagne pour rassembler les signatures nécessaires des six autres pays, plutôt que de la reléguer à une simple extension d’un effort fondamentalement centré sur le Royaume-Uni. Cela permettrait de considérer l’appartenance à l’UE comme un bien en soi, davantage qu’un moyen pour arriver à ses fins.
En tant que citoyen finlandais, j’ai signé cette initiative, parce que je connais bon nombre de militants Remain britanniques qui se sentent véritablement Européens. Ils sont peut-être bien plus nombreux que je ne l’imagine, mais pour le dire clairement, il serait sage pour tout Britannique pro-européen de penser comme un Européen, et non pas seulement comme un Remainer.
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