La représentation féminine dans les instances politiques en Europe, entre disparités et progrès

Série Situation des Femmes en Europe 4/6

, par Martin Samiez

La représentation féminine dans les instances politiques en Europe, entre disparités et progrès
Le gouvernement finlandais, l’un des plus féminisés en Europe ©Finnish Government

La représentation des femmes dans les instances politiques en Europe a connu des avancées notables au cours des dernières décennies, notamment du fait de politiques d’égalité des genres et du renouvellement des générations. Cependant, des disparités significatives persistent entre les pays européens, notamment du fait de l’inaction de certains Etats, encourageant ainsi l’Union européenne à agir en la matière.

Les pays scandinaves, champions de la parité des genres en politique

La représentation féminine dans les instances politiques (gouvernement, parlement…) est très hétérogène sur le Vieux continent. En particulier, les pays scandinaves sortent du lot en affichant une proportion élevée de femmes dans leurs gouvernements. La Finlande est championne en la matière, et de manière indiscutable, puisque c’est le seul pays européen où les femmes représentent plus de la moitié du gouvernement, avec 12 femmes pour 19 ministres, soit environ 63%. Cette composition, exceptionnelle en Europe, n’est pas un « pic » isolé en Finlande mais s’inscrit dans une tendance durable qui survit aux changements de gouvernement successifs (social-démocratie puis droite conservatrice).

Viennent ensuite, sur le podium, la Suède et le Danemark avec respectivement 46% et 42% de femmes au gouvernement. Notons que le Danemark est dirigé par une Première Ministre depuis 2019, Mette Frederiksen.

Le trio de tête reste inchangé pour la composition des parlements nationaux : l’hémicycle suédois compte 46.6% de femmes, devançant légèrement celui de la Finlande avec 46%, suivi par celui du Danemark avec 44.1%.

Ces résultats encourageants, qui contrastent avec le reste des pays européens, s’expliquent notamment par le fait que ces pays ont mis en place très tôt des politiques proactives pour encourager la participation des femmes en politique et, de manière plus globale, pour promouvoir l’égalité des sexes dans tous les secteurs de la société (économique, associatif, juridique, médiatique…). Ces politiques, souvent parées d’un aspect éducatif et culturel, sont surtout efficaces sur les publics les plus jeunes, et pourront ainsi porter leurs fruits dans la sphère politique une fois que les générations se seront renouvelées.

La Hongrie en bas du podium à tous égards

À l’autre extrémité du spectre, certains pays européens affichent une représentation féminine nettement inférieure, voire inexistante. Par exemple, en 2017, la Hongrie et la République Tchèque ne comptaient aucune femme au sein de leur gouvernement.

S’agissant de la représentation des femmes dans les parlements nationaux, la Hongrie se distingue encore en affichant le plus faible taux de féminisation (14.1%) suivie de très près par Chypre (14.3%) puis par la Roumanie (19.4%). Ces faibles taux peuvent être attribués, d’une part, à l’absence totale de politiques favorisant l’égalité des genres et, d’autre part, à des facteurs culturels tels qu’une moindre libéralisation des mœurs. Par exemple, en Hongrie, le rôle de la femme en tant que mère est fortement valorisé, ce qui peut les dissuader de choisir des carrières longues ou à hautes responsabilités. Le gouvernement de Viktor Orban a d’ailleurs mis en place une politique nataliste très incitative qui accorde, entre autres, une exonération à vie de l’impôt sur le revenu pour les Hongroises ayant au moins 4 enfants.

Des politiques ont été menées à l’échelle nationale pour promouvoir la parité en politique

Plusieurs pays européens ont adopté des mesures spécifiques pour améliorer la représentation des femmes en politique, et cela ne concerne pas seulement les pays scandinaves ! La Belgique, par exemple, a instauré en 1994 une loi imposant un quota obligatoire de 25% de candidatures féminines sur les listes électorales des partis politiques, ensuite porté à 33,3 % à partir de 1999, et fait ainsi figure d’exception à travers tout le Vieux continent. Cette politique de quotas a permis, à court terme, de faire accroître drastiquement le nombre de femmes dans les conseils élus, et notamment dans les conseils municipaux, mais ne permet plus aujourd’hui de faire avancer les choses.

La France a également mis en place des lois relative à la parité en politique, en obligeant par exemple les partis politiques à présenter un nombre égal de candidats des deux sexes lors des élections départementales (binômes paritaires dans chaque canton) et des élections européennes, où les listes doivent alterner femmes et hommes afin d’éviter que les premières places ne soient monopolisées par des hommes. Ainsi, la France compte 50% de conseillères départementales et 49% d’eurodéputées, mais seulement 37% de femmes députées.

L’Union européenne espère jouer un rôle clef en la matière

À l’échelle de l’Union européenne, des efforts ont été déployés pour promouvoir l’égalité des genres dans les instances décisionnelles. La Commission européenne a par exemple lancé en 2020 la "Stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes 2020-2025", visant à combler les écarts persistants en matière de genre dans tous les domaines de la société. De plus, l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE) fournit des données et des analyses pour aider les États membres à élaborer des politiques plus efficaces en faveur de l’égalité des sexes, pourvu que ces États souhaitent bel et bien mettre en œuvre de telles politiques. Enfin, l’article 10 du Traité sur le fonctionnement de l’UE (TFUE) stipule que la lutte contre les discriminations fondées sur le sexe – entre autres – doit irriguer l’ensemble des politiques de l’Union.

Cependant, les politiques sociales, culturelles et éducatives, qui demeurent cruciales dans la résorption des écarts de genre en politique et en général, demeurent principalement la compétence des Etats membres et dépendent donc de leur volonté politique. L’UE ne peut donc améliorer la représentation des femmes dans les organes politiques sans le bon vouloir des États membres.

Agir sur la volonté des Etats pour résorber ces disparités dans le progrès

La représentation des femmes dans les organes politiques en Europe a indéniablement progressé, mais des disparités notables subsistent entre les pays. Les États les plus égalitaires ont souvent adopté des mesures proactives, telles que des quotas de genre et des politiques culturelles favorisant l’égalité des sexes de façon transversale et à plus long-terme.

À l’échelle de l’Union européenne, des stratégies et des institutions dédiées œuvrent pour promouvoir la parité, mais leur succès dépend largement de la volonté politique des États membres. Afin de résorber les écarts interétatiques dans le progrès, la Commission européenne pourrait éventuellement s’appuyer sur des mécanismes de prévention et de sanction, comme celui relatif aux valeurs de l’Union, afin d’encourager les Etats réticents à promouvoir l’égalité des sexes dans toutes les instances décisionnelles.

Le projet SFE - Situation des Femmes en Europe - est une initiative des Jeunes européens Paris, réalisée dans le cadre du Taurillon-en-Seine, qui consiste en une série d’articles de 6 épisodes, publiée à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes et abordant la condition féminine sur le continent européen sous des angles très divers et via des analyses, des portraits et des interviews.

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