Le choc du Brexit et de la nécessité de s’en remettre rapidement

, par Jaan, Louise Guillot

Le choc du Brexit et de la nécessité de s'en remettre rapidement
David Cameron n’assistera pas à l’ensemble de la réunion du Conseil européen (28-29 juin), laissant la place aux représentants des 27 Etats membres pour définir une possible réorientation du projet européen. - Number 10 / Arron Hoare (CC/Flickr)

La presse européenne est unanime pour dire que l’annonce de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne est un véritable choc auquel personne ne voulait croire. Pourtant, les Britanniques se sont prononcés démocratiquement, grâce à l’outil référendaire, pour quitter le projet politique et économique européen. Les analystes parlent d’un désaveu envers les élites britanniques et européennes, mais cela semble être un sentiment largement partagé en Europe : la montée des nationalismes et des partis d’extrême droite l’illustrent, comme le montre les atteintes à l’État de droit en Pologne ou les succès électoraux des partis populistes et europhobes en Italie, en Allemagne, en Autriche et même en France. Il est grand temps de réagir.

De la nécessité de (re)mobiliser l’opinion publique et la classe politique pour construire une autre Europe, une « Europe en mieux »

Le constat est dressé. L’Union européenne fait face à de multiples crises depuis le milieu des années 2000 : crises financière et économique, crise de la zone euro, crise migratoire, difficultés dans la construction de ses relations de voisinage avec la Russie à cause de la crise en Ukraine, mais aussi avec les pays du Proche et du Moyen Orient du fait de la grande instabilité de cette région du monde. Alors oui, il ne semble pas faire très bon vivre en Europe par les temps qui courent et le Brexit apparaît comme la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

En effet, du haut de mes 22 ans, je ne pensais pas que le projet européen pourrait être aussi radicalement remis en cause. Je pensais naïvement que son volet économique, au moins, qui apparaît comme un des plus grands accomplissements de l’Union, serait toujours un facteur de rapprochements. Je comprends toutefois que tous les Européens ne partagent pas la même vision du projet politique d’unification de l’Europe, au-delà de la paix durable que cette dernière aura su nous apporter. Mais visiblement je me trompais.

Les nations européennes sont de plus en plus divisées et le Brexit est un événement qui risque de porter un coup fatal à l’Union et entériner ces divisions. C’est pourquoi il est important, aujourd’hui encore plus qu’hier et encore davantage demain, de se mobiliser pour sauver ce paquebot qui commence à sombrer, lentement mais sûrement. Nous avons donc besoin d’une mobilisation massive de la société civile et d’un véritable renouvellement de la classe politique pour effectuer le grand virage que l’événement du 23 juin 2016 appelle. Date maintenant gravée à jamais dans les manuels d’histoire. Il est temps de rappeler quelques éléments essentiels du fonctionnement de l’UE pour stopper la désinformation : car oui, les eurodéputés sont élus démocratiquement et les législations qu’ils votent ont une conséquence directe sur la vie quotidienne de 500 millions de citoyens ; car oui les chefs d’État et de gouvernement sont bien ceux qui fixent les grandes orientations que doit prendre l’Union européenne ; car oui 80% du budget européen est en réalité géré par les collectivités des États membres au travers des fonds structurels [1].

De la nécessité du tandem franco-allemand pour relancer le projet politique européen

En 2017 se tiendront des élections en France et en Allemagne afin de désigner de nouveaux chefs d’État et de gouvernement, il est indispensable que nous nous mobilisions pour faire de l’Union européenne un sujet et un enjeu majeur de ces élections. Nous ne pouvons pas attendre les prochaines élections européennes qui auront lieu en 2019 pour réagir ! Il faut bien sûr que les jeunes se mobilisent pour qu’ils continuent de pouvoir voyager, aller étudier à l’étranger et que leurs diplômes soient reconnus partout au sein de l’Union. Il faut bien sûr que les entreprises se mobilisent pour que les marchandises, les capitaux, les services et les personnes continuent de pouvoir circuler librement au sein de l’Union. Il faut bien sûr que la société civile continue de se mobiliser pour répondre au défi de l’immigration mais surtout de l’intégration. Il faut bien sûr que nos représentants au Parlement européen aient la conviction de représenter et de défendre les intérêts des 500 millions de concitoyens.

Enfin, il me semble que le tandem franco-allemand, délaissé depuis quelques années, a besoin de retrouver le dynamisme qu’il a perdu afin de jouer à nouveau le rôle central qu’il a joué tout au long de la construction de l’Union européenne. Nous nous rappelons, avec nostalgie peut-être, des couples vertueux pour l’Europe que formèrent Charles de Gaulle et Konrad Adenauer au commencement, suivi de Valéry Giscard d’Estaing et d’Helmut Schmidt pour portèrent la création du Système Monétaire Européen (qui sera le premier pas vers l’établissement d’une monnaie commune aux Européens), puis de François Mitterrand et d’Helmut Kohl à la fondation du Traité de Maastricht instituant l’Union européenne. L’Allemagne ne peut, et ne doit pas, assurer seule le leadership européen. Ce n’est pas non plus au tandem franco-allemand d’assurer seul le leadership de l’Union, il est plus qu’indispensable d’inclure l’ensemble des États membres, mais il semble nécessaire qu’une nouvelle impulsion soit donnée au projet politique européen, parce qu’à force de stationner au milieu du gué, nous finirons par tomber dans le trou.

Autant pour la France que pour l’Allemagne, c’est toute l’Europe qui perd un allié de taille avec la sortie du Royaume-Uni. C’est pourquoi il est aujourd’hui indispensable de se mettre autour de la table et de se décider enfin de la suite que nous voulons donner à l’Europe.

Après la réunion lundi à Berlin d’Angela Merkel, de François Hollande et de Matteo Renzi, un Conseil européen s’ouvre aujourd’hui pour ouvrir les premières négociations sur le Brexit.

Vos commentaires
  • Le 29 juin 2016 à 20:45, par Jean-Luc Lefèvre En réponse à : Le choc du Brexit et de la nécessité de s’en remettre rapidement

    Non, Louise, l’Europe ne perd pas « un allié de taille » avec le Royaume désUni ! Ce royaume, pour l’Europe, a davantage été un boulet, un frein, un lest pour le projet européen ! Oui, Louise, le couple franco-allemand doit reprendre du service, autrement que pour frimer ici (Oradour) ou là (Verdun) en passant par Omaha beach ! Oui, Louise ! Le couple franco-allemand ne peut tout assumer seul ! Encore faut-il qu’il fasse place aux autres !!! Et là, j’ai des doutes ! A la fois trop faibles pour cela, en raison de ces prochaines élections qui ne se présentent pas bien, avec des eurosceptiques de plus en plus puissants (AfD et la belle Marine) et trop puissants, le partenaire féminin imbu de sa puissance économique et le partenaire masculin nimbé de sa nostalgie de représenter une grande puissance évanescente !!! Alors, Louise, comme toi, je suis nostalgique de ces couples « vertueux » que tu cites, mais la « vertu », c’est aussi, étymologiquement, une force et un courage dont MERKEL et HOLLANDE me paraissent être en manque !!! Les parlementaires européens dont tu espères beaucoup, à juste titre ? Combien sont devenus des apparatchiks à la solde de leur parti avant d’être des gens d’idéal ? Comme toi, j’espère et attends beaucoup de la société civile et de la génération Erasmus, en désespoir de cause ! Des Indignés, il y en a eu en Europe, qui ont été montés en épingle ( « Podemos », « Nuit debout »...) pour des raisons matérialistes socio-économiques. J’en attends d’autres, des Indignés du COEUR, parce que ce continent, qui vieillit, qui étouffe ses jeunes générations, ne respire plus, sans enthousiasme aucun, sinon celui de l’avoir ! Tous ceux, Louise, que tu as cités, n’étaient pas protestants. C’est peut-être cela aussi qui explique la marasme actuel : le « salut » dans la culture protestante se conjugue très bien avec ce que l’on vit : austérité, rigueur, individualisme ! Ancien directeur d’école, past president de deux associations européennes de directeurs, j’ai un rêve. Pour vous ! Pour mes petits-enfants ! Battez-vous !!!

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