L’ancien rêve d’indépendance
L’Espagne est le pays européen, où le souhait de certaines régions de devenir indépendantes est le plus marqué. En Catalogne, être une nation à part entière n’est pas une volonté récente, elle s’explique notamment par son histoire. Pendant des siècles, la Catalogne était une région autonome. Ce jusqu’à ce que la majorité des droits d’autonomie soit abolie sous la dictature de Franco. L’État espagnol ainsi centralisé opprima toute expression des cultures régionales en Espagne, dont l’usage de la langue catalane.
En 1975, quatre ans après le mort de Franco, les populations de la Catalogne et du Pays Basque expriment leur souhait d’être autonomes par référendum. La Catalogne devient alors l’une des 17 régions autonomes d’Espagne. Ce statut lui permet notamment de rétablir l’usage de la langue catalane qui devient la langue officielle de la région. Toutefois, l’autonomie n’est pas totale : bon nombre de modifications juridiques des ordres de base régionaux doivent toujours être discutées avec le gouvernement central à Madrid. Cet entre-deux ne satisfait pas les rêves de beaucoup des Catalans.
Aujourd’hui, pour des raisons à la fois culturelles, historiques et économiques, une majorité de catalans s’exprime régulièrement pour une séparation totale avec l’État central d’Espagne. Le 1er octobre 2017, un référendum pour la constitution d’une république indépendante catalane a été organisé. 90 % des participants ont voté pour l’indépendance mais seulement 43% des catalans ont participé.
Les opposants aux séparatistes catalans ont en effet appelé au boycott du référendum non reconnu par le gouvernement à Madrid, qui l’a qualifié d’anticonstitutionnel. À la suite, le gouvernement régional de Catalogne a été disloqué et la région a été mise sous séquestre par Madrid. Carles Puigdemont, le chef du gouvernement catalan, s’est notamment exilé à l’étranger pour éviter un procès, alors que de nombreux dirigeants catalans ont été conduit en prison. La formation d’un nouveau gouvernement catalan après les élections de 2017 est devenue complexe alors même que les forces séparatistes sont arrivées en tête des élections. Suite au refus de Puidgedemont de briguer un nouveau mandat dans ces circonstances, Quim Torra a été élu comme nouveau président régional de Catalogne en 2018.
Une condamnation contestée
Le 14 octobre 2019, neuf dirigeants séparatistes ont été condamnés à des peines de neuf à treize ans de prison par le tribunal suprême d’Espagne. Ce dernier a également lancé un mandat d’arrêt européen contre Carles Puigdemont, qui vit actuellement en Belgique.
Le jugement a soulevé une vague de protestation massive dans toute la région et parfois avec de la violence comme à Barcelone. Si la majorité des manifestants conteste d’une manière pacifique, de nombreuses dégradations sont à déplorer. Dans le centre de Barcelone, des bâtiments ont été endommagés. Un impact économique considérable pour les restaurants et magasins du centre touristique a déjà été remarqué.
Un dialogue rompu
Le gouvernement catalan voit les peines prononcées comme une décision politique injuste, et reproche au tribunal de s’être prononcé contre l’indépendantisme. De son côté, Albert Rivera, président du parti Ciudadanos (centre droit) exige l’application du article 155 de la Constitution espagnole, qui autorise, par le gouvernement, de la mise en œuvre de toutes les mesures nécessaires pour rétablir l’intérêt général (1). Les différentes parties du conflit ne semblent pas prêtes aux compromis. Et l’issue du conflit ne semble pas aboutir de si peu.
Pour rendre l’indépendance de la Catalogne effective, l’organisation d’un référendum dans toute l’Espagne ou une modification de la Constitution espagnole serait nécessaire, car les statuts actuels n’autorisent pas la séparation d’une région de l’État. Aucune de ces possibilités ne semblent envisageables actuellement, le dialogue étant rompu.
Les Européens dans ce conflit
Aucun pays européen n’a reconnu l’indépendance de la Catalogne depuis le référendum organisé en 2017.
Le président du gouvernement catalan Roger Torrent a envoyé une carte à plus de 100 députés européens pour demander leur soutien pour résoudre le conflit catalan d’une manière politique. Selon lui, les droits démocratiques ont été oppressés par l’État espagnol et c’est à l’Europe d’empêcher la violation de droits fondamentaux. Il leur demande de rester attentifs à la situation en Catalogne et les exhorte de trouver une solution pacifique et politique au conflit.
Face à cet appel au secours, le soutien reste faible. L’Union européenne, elle, ne peut pas se prononcer dans ce conflit, qui demeure une affaires interne à l’État espagnol.
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