Drogues (il)licites dans l’UE en chiffres
Dures, douces, de synthèse, à fumer, en pilule ou en poudre, les drogues n’ont jamais été aussi nombreuses qu’aujourd’hui. Au sein de l’UE, en 2021, on compte 87,4 millions d’adultes (15 à 64 ans) qui ont consommé des drogues illicites au moins une fois dans leur vie. Cela représente 31% de la population de l’UE, 60% d’hommes contre 40% de femmes. La drogue la plus consommée en Europe est le cannabis, considéré comme une drogue douce, c’est le moins stigmatisé, avec 22,6 millions de consommateurs en 2021. C’est d’ailleurs la France qui compte le plus de consommateurs, malgré son interdiction. En deuxième position, on trouve la cocaïne, qui représente 3,7 millions de consommateurs toujours dans l’UE. Viennent ensuite l’ecstasy et les amphétamines qui représentent respectivement 2,3 millions et 2 millions de consommateurs. La prise de drogue (douce ou dure) n’est jamais sans risque : plus de 6000 personnes sont mortes d’overdose en 2021, un chiffre qui augmente.
Qui consomme et pourquoi ?
Les drogues se retrouvent pour beaucoup dans le domaine médical. Ce sont des doses, largement contrôlées, distribuées en quantité limitées afin de soigner au mieux ou de limiter la souffrance du patient. Pour ce qui est de leur usage récréatif, les premiers clients sont principalement les adolescents et les jeunes adultes. Généralement, la consommation de drogue se fait dans le but d’éprouver du plaisir ou un sentiment de détente. Il s’agit d’usage ponctuel dans un cadre particulier, comme celui d’une soirée par exemple. Malheureusement, pour certains usagers, il s’agit de l’unique moyen de trouver du repos. La drogue est dans ce cas utilisée comme “anesthésiant” des pensées, des sentiments et surtout de la souffrance. Cela rend les risques de dépendance plus accrus et contribuerait plutôt, dans ce cas, au mal être du consommateur.
Parmi les consommateurs, on retrouve également certains sportifs de haut niveau. Ceux-ci cherchent à améliorer leur performance, avoir plus d’énergie. Le dopage est évidemment interdit puisqu’il s’agit d’une pratique qui, d’une part, va à l’encontre des valeurs sportives, et, d’autre part, constitue un risque très élevé pour la santé de son usager.
On a souvent pensé que le type de drogue utilisé dépendait du milieu socio-économique des consommateurs, et c’est vrai pour certaines drogues comme l’opium et l’héroïne, peu consommées en Europe. En revanche, le cannabis et la cocaïne sont consommés dans tous les milieux, y compris par des personnes qui ont des revenus financiers plus modestes. Le milieu festif quel qu’il soit, branché, alternatif, étudiant, mais aussi professionnel, est particulièrement touché.
Les drogues, une production importée
Sauf pour quelques plantations clandestines, les zones principales de production de drogue ne sont pas situées en Europe. La coca est essentiellement produite en Amérique latine sur la côte ouest entre la Colombie et la Bolivie. Le cannabis est massivement produit en Asie de l’est, en Afghanistan et au Pakistan, mais on trouve également des zones de production en Afrique subsaharienne, notamment au Mali, au Soudan du Sud et en République démocratique du Congo. La cocaïne, transformée dans son pays d’origine, est généralement transportée par bateau jusqu’à la côte africaine et remonte vers l’Europe par les terres en empruntant les mêmes chemins que ceux du cannabis. Ce trajet est considéré comme moins dangereux pour les trafiquants puisqu’il est moins surveillé que les déplacements par bateau qui relient la Colombie à Gibraltar.
Politique européenne en matière de drogue : Unis dans la diversité
Les politiques de légalisation de la drogue sont loin d’être uniformes dans l’UE. Les Pays-Bas sont souvent représentés comme pays de référence en matière de légalisation du cannabis. Néanmoins, contrairement à ce que l’on peut penser, le cannabis n’y est pas légal. Sa consommation, en revanche, n’est pas verbalisée. Malte est le premier pays de l’Union à avoir légalisé la consommation récréative de cannabis, suivi du Luxembourg. On parle ici seulement de cannabis, puisque toutes autres substances à effet psychotrope sont interdites en Europe. Réglementer l’usage de drogue, surtout dans un cadre récréatif, peut s’avérer complexe puisqu’il s’agit d’un sujet qui touche à plusieurs domaines, aussi bien juridique que sanitaire. De nombreuses questions quant à l’encadrement de l’usage de substances psychotropes naissent au sein du Conseil européen. D’un point de vue purement juridique d’abord, comment punir les infractions ? Est-il raisonnable d’incarcérer les toxicomanes et comment faut-il le faire pour rendre la peine efficace ?
D’un point de vue plus économique, on peut se demander si la drogue engendre le désœuvrement ou si, à l’inverse, c’est le chômage de masse qui conduit les désœuvrés à la consommation, à la petite délinquance et à la criminalité, et comment faire pour substituer des revenus du travail à ceux qui alimentent, par le trafic, des zones de relégation.
En 2021, le conseil européen propose une stratégie de l’UE en matière de drogue. Il s’agit d’une approche commune entre pays membres qui vise à lutter contre les incidences du trafic et la consommation de drogue sur la sécurité et la santé. Le plan d’action se concentre sur trois domaines principaux : la réduction de l’offre de drogue, en passant par un plus grand contrôle aux frontières et un renforcement de la sécurité ; la réduction de la demande de drogue, garantie par un ensemble de mesures adaptées au contexte social local et aux besoins de la population, en étroite collaboration avec les services de santé et d’aide social. Enfin, la lutte contre les dommages liés à la drogue, c’est-à-dire réduire l’incidence des maladies infectieuses, comme le VIH, mais aussi prévoir des solutions qui puissent remplacer l’imposition de sanctions coercitives. Pour cela, il s’agit de mettre en place une coordination entre pays membres de l’UE afin de permettre une coopération internationale.
La consommation de drogue est donc un sujet sanitaire et public complexe qui engage la responsabilité des citoyens et des Etats. Si en Allemagne le cannabis “sort du tabous” pour le ministre de la santé, Karl Lauterbach, la consommation de drogue et les personnes sous l’emprise d’addiction sont encore très stigmatisées, favorisant ainsi l’ignorance à des recherches de solution viable.
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