Les chiffres de l’Allemagne

, par Louis Ollion, Pierre-Adrien Hanania

Les chiffres de l'Allemagne

Quelques statistiques éclairantes sur la situation actuelle de l’Allemagne, géant européen.

74%... et le reste de l’UE ?

La crise économique et budgétaire a fait transpirer la plupart des chefs d’état européens depuis 2011. Aucun n’en est ressortit indemne, à l’exception notable d’Angela. 74% des allemands sont satisfaits de son action, on le sait, et la réélection de Merkel n’a été une surprise pour personne. Ce que l’on sait moins en revanche, c’est qu’elle est tout aussi populaire de ce côté ci du Rhin : 73% des français pensent qu’elle a fait du bon boulot, alors que notre propre président bat chaque jour son propre record d’impopularité : Jamais un chef d’état français n’avait été aussi bas dans les sondages, au moins depuis Louis XVI.

D’aucuns diront que l’herbe est toujours plus verte dans le pré du voisin... Si elle est très admirée en France, en république Tchèque ou en Pologne, elle l’est moins dans le sud de l’Europe. Les grecs semblent n’avoir pas apprécié leur sauvetage à sa juste valeur. Vu l’état du pays, on est d’ailleurs en droit de se demander qui sont les 10% qui approuvent encore la chancelière. L’Espagne et l’Italie, si ils ne sont pas au même niveau, ne la tiennent pas non plus dans leur cœur. Les anglais eux sont à mi parcours entre l’admiration béate de la France ou de la Pologne et la haine des PIGS. 56% d’entre eux approuvent l’action d’Angela Merkel.

69 millions…

Telle est, selon l´Office fédéral de statistiques, l’estimation de la démographie allemande en 2050. Oui, il s’agirait alors en effet d’une chute de 16% en 40 ans, soit 13 millions d’Allemands en moins. Autant dire un véritable cataclysme démographique pour un pays qui ne serait alors plus et pour la première fois depuis des décennies le pays le plus peuplé d’Europe (si l’on en excepte la Russie).

En effet, ce déclin démographique est à mettre en parallèle avec une population stable et même croissante de la France et du Royaume-Uni, renforcée démographiquement par l’immigration et un taux de la natalité fort contrairement à celui des Allemands, de 1,3 en 2010 et qui n´a plus été à 2,1 enfants par femme depuis 1965. Ce déclin pose un problème national, à l’heure où l’on prévoit que 40% ( !) de la population en 2050 sera âgée de plus de 60 ans, promettant une pression sans précédant sur les jeunes d’aujourd’hui. Il s’agit toutefois aussi d’un problème à portée nationale, puisque l’Allemagne - avec son statut de pays le plus peuplé de l´UE - perdrait de fait un atout qu’elle a fait valoir depuis le début de la construction européenne et qui a une valeur concrète notamment avec le nombre de sièges au Parlement Européen.

Le chiffre qui n’existe pas… encore !

Et qui aujourd’hui est au centre des critiques que l’on fait au système allemand et au parti qui le porte aujourd’hui, la CDU d’Angela Merkel. Car en effet, le taux de chômage est exceptionnellement bas. On remarque, à partir des chiffres d´Eurostat, qu´il est même le plus pour les jeunes en Europe, contrastant avec les plus de 50% en Espagne par exemple. Mais, mais, mais : Ce que la France a instauré avec le SMIC, salaire minimum qui permet d’établir une sorte de seuil de décence de la compensation pour un travail, l’Allemagne, elle fait le choix de ne pas en avoir. Le SMIC n’y existe et permet l’existence de mini jobs avec un rendement horaire qui descend parfois en-dessous de 5 euros, soit 700 euros pour 4 semaines à raison de 35 heures. Cette réalité que masque le taux de chômage allemand remet en perspective tout un pan du marché du travail allemand critiqué donc pour ne pas avoir établi un salaire minimum, priorité du programme électoral de la SPD qui devrait former une grande coalition avec la CDU. Ce chiffre n’existe donc pas encore mais le pourrait bientôt, puisque les deux partis se sont entendus sur la commission qui serait chargé d’en établir la mise en place. Le dit-Mindestlohn sera donc peut-être déjà bientôt un chiffre qui existe concrètement.

4,7%

Soit le score électoral pour la première participation d’Alternative für Deutschland (AFD), parti populiste. Si cette entrée sur l´échiquier politique allemand s’avère fracassante, loin devant d’autres partis d’alternatives tels les Pirates (2,2%) ou la NPD néonazi (1,3%), l´AFD s’est tout de même heurté à l’obstacle des 5% des dépasser pour intégrer le Parlement allemand. Le succès relatif de ce parti, qui demande notamment la suppression de l’euro, montre que la question populiste existe dans un pays où l’euro est certes mais où 30% de la population regrettent publiquement la disparation de la Deutsche Mark. Le populisme y est donc apparu, mais il faut rappeler qu’il n’a ni des racines politiques ancrées ni l’envergure en terme de professionnalisme et de crédibilité qu’a un parti populiste comme le Front National en France, le Vlaams Block en Belgique ou encore le Fidesz au pouvoir en Hongrie.

L’Allemagne aujourd’hui profite clairement de la conjoncture européenne et contient donc ce phénomène, bien que l´euroscepticisme y soit ici aussi de mise. Paradoxalement, et alors que la scène politique allemande laisse un certain champ à ce genre de partis – de par la proportionnelle qui distribue les sièges parlementaires relativement à leur score – les scores de la dernière élection ont laisser émerger le contraire avec un choix des Allemands se portant sur les gros partis et mettant à mal la montée de courants alternatifs. Angela Merkel est un rempart face au populisme en Allemagne et donne à la scène politique allemande un certain statut d´exception par les temps qui courent. Pour l’AFD, la prochaine échéance est claire : Réussir à s’adjuger des sièges à l’issue des élections européennes en mai 2014…

54%

C’est le pourcentage d’allemands qui pensent (encore !) que l’intégration économique européenne est une chance pour la croissance interne. Même si elle est courte, c’est une majorité de la population, ce qui n’est vrai dans aucun autre pays de l’Union ; c’est en fait le seul pays de l’UE où le soutient à l’intégration économique à augmenté, entre 2009 et 2013. De 4 points exactement, alors que ce soutient à dévissé de 21 point en France sur la même période, pire qu’en Espagne ou en Italie. Les sentiments pro-européens des allemands ont visiblement été protégés des affres de la crise - c’est vrai qu’ils s’en sont mieux sortis-. Mais ils ont dû payer pour la crise des autres, étant les plus gros contributeurs aux fonds de sauvetage européens mis en place pour venir en aide aux cancres budgétaires.

Les allemands sont ils donc infiniment généreux, avec l’idéal européen chevillé au corps ? Le score ridicule de l’avatar allemand du populisme eurosceptique, l’AfD, aux législatives, tendrait à le confirmer. On peut aussi penser que la crise n’ayant pas été vécue directement par la population, le soutient à l’UE est resté égal. Dans les autres états-membres, et notamment la France, l’idée européenne a accusé le coup de la dégringolade économique. Mais on peut aussi supposer que l’intégration européenne profite beaucoup à l’Allemagne, mais pas à ses partenaires. Que les allemands, à la manière des chinois, vivent de leurs exportations massives, mais que les voisins soient perdants dans le « jeu » économique. L’Allemagne s’est faite gentiment taper sur les doigts par la Commission, qui lui a fait ce reproche mercredi dernier.

Article paru originalement dans le magazine franco-allemand l’ingénu, numéro 23. Crédit photographique : Sophie Schroda

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