Les élections européennes de 2014 : vrai espoir de démocratie ou crainte face aux nationalistes ?

1ère partie : Les citoyens pris dans l’étau entre plus de démocratie et les menace nationalistes.

, par Michel Morin

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Les élections européennes de 2014 : vrai espoir de démocratie ou crainte face aux nationalistes ?

Les élections du Parlement européen de 2014 permettront une avancée démocratique si toutes les possibilités offertes par le Traité de Lisbonne sont appliquées. Le président de la Commission européenne émanerait alors d’une majorité politique démocratiquement élue. Mais l’enthousiasme premier est en train de s’émousser et des perspectives moins idéales semblent se dessiner.

Dans le même temps, les expressions politiques dans les pays d’Europe montrent la progression dans les opinions de néonationalismes les plus radicaux, aux relents racistes et xénophobes pour certains. Ils s’installent comme des forces alternatives aux jeux démocratiques discrédités, contre les classes politiques nationales et européennes. Ils sont contre l’ordre établi en et par l’Europe et adopte donc une posture révolutionnaire.

Le Parlement européen : une mécanique solide et fragile.

Jusqu’à présent, le Parlement européen peut jouer son rôle dans le système de codécision de l’Union européenne aux divers niveaux, par la création de majorités d’opinion, par le choix de dossiers sur lesquels il mène des batailles pour faire avancer l’intérêt général européen, comme sur le cadre financier 2014-2020 dernièrement. Lorsque les députés européens viennent à la rencontre des citoyens, ils témoignent. Ils montrent que ce fonctionnement est possible parce qu’un travail d’échanges entre les élus de tous les groupes, le respect des règlements communs et des procédures liées au multiculturalisme, permettent de créer des consensus et des majorités de projets. L’acceptation du système commun est le socle de cette mécanique. Les rares conflits médiatiques spectaculaires qui ont eu lieu dans l’enceinte de Parlement européen sont toujours restés limités par rapport à ce qui peut se passer dans les parlements nationaux. De plus de nombreux opposants à l’Union pratiquent un absentéisme assidu.

Par contre l’accroc lié au comportement du groupe Jobbik de Hongrie montre le risque de dérives pour l’avenir. En 2009, les trois députés se sont imposés en tenue paramilitaire dans l’enceinte parlementaire. Le comportement du nationaliste anglais Neil Farage est de même nature. Réprimandé et condamné, il perpétue ses saillies verbales. Ils sont peu nombreux…pour l’instant. Mais les eurodéputés qui ont assisté à ces événements soulignent leur extrême capacité de nuisance.

Que feront les nationalistes radicaux s’ils se retrouvent massivement présents dans l’hémicycle européen ?

Stratégies révolutionnaires ou entrée dans le rang ?

Les négociations actuelles conduites entre les forces nationalistes pour créer un groupe commun au sein du Parlement ont pour objectif politique de renforcer toutes les forces eurosceptiques et europhobes. Mais elles visent aussi l’obtention de moyens financiers et humains importants leur permettant de mener durablement leurs batailles.

Ces unions tactiques de forces, qui par nature ne peuvent s’entendre, se contenteront-elles de faire fructifier leurs acquis ? Rentreront-elles dans le rang ? Se contenteront-elles de faire les coucous dans une enceinte démocratique tout en menant de simples escarmouches pour conforter leurs partisans ? Ou bien la mécanique générale, l’horlogerie précise du système de décision leur apparaîtront-elles comme plus fragiles que nous le croyons ? Et alors l’offensive politique pour bloquer la machine européenne deviendra-t-elle leur priorité ?

Leur nombre pèsera dans les batailles à venir. Quelques mini-groupes ne peuvent casser durablement un outil parlementaire. Par contre au-delà d’une certaine masse critique, tout devient possible pour qui veut détruire.

Détruire l’Europe actuelle est leur objectif. Après avoir conquis une partie suffisante de l’opinion sur ces bases-là, leur crédibilité se jouera sur leur aptitude à changer effectivement les choses. Avec le Traité de Lisbonne, bloquer les décisions dans le Parlement européen, c’est bloquer l’ensemble de la machine européenne et la possibilité de se donner le beau rôle en se retournant vers l’opinion lors de chaque crise créée. Tous les comportements excessifs apparaîtront comme une véritable attitude révolutionnaire contre l’Europe honnie.

Le pire n’est jamais certain…

La bataille des élections européennes est donc cruciale. Tout moment de la vie démocratique l’est, mais 2014 sera marquée par de « nouvelles donnes », des bonnes et des mauvaises.

Les citoyens européens ont encore leur destin en main pour empêcher que des mauvaises nouvelles venues des horizons néo-nationalistes déferlent.

Tous les professionnels et les militants de l’éducation, qu’elle soit institutionnelle, permanente ou populaire doivent multiplier les démarches d’éducation civique pour faire refluer les vagues démagogiques contre les valeurs de la vie en commun, contre les xénophobies et les racismes et pour favoriser le débat, le dialogue, la tolérance.

Tous les démocrates doivent dénoncer les dangers que ces forces font courir à l’avenir pacifique et démocratique de l’Europe. Un véritable front démocratique doit s’exprimer, sinon s’organiser, pour porter ce message. C’est sans doute autour du Mouvement européen qu’il peut prendre racine.

Dans le même temps il faut offrir clairement aux citoyens la possibilité de choisir entre une Europe progressiste et une Europe conservatrice. Il faut pouvoir choisir entre une Europe de gauche ou de droite, selon l’interrogation débattue par les militants des Maisons de l’Europe à Strasbourg fin novembre. Savoir s’il faut une Europe intergouvernementale ou une Europe fédérale est un débat permanent, mais il doit être fortement corrélé aux choix précédents. Sinon le débat refermé sur la seule nature de l’Europe suscitera au mieux l’abstention.

La prédominance actuelle de l’influence conservatrice sur l’Europe exige donc le renforcement d’une expression politique autonome de combat en faveur d’une Europe progressiste. Cela est aujourd’hui vital pour la survie même de l’idéal européen.

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Vos commentaires
  • Le 21 décembre 2013 à 16:23, par emmanuel lunda En réponse à : Les élections européennes de 2014 : vrai espoir de démocratie ou crainte face aux nationalistes ?

    pas du tout d’accord avec votre vision parfaite du fonctionnement de l’union européenne (beaucoup trop libérale) ... c’est en soi une raison suffisante pour avoir envie de la changer ...

  • Le 21 décembre 2013 à 17:47, par Aurélien Brouillet En réponse à : Les élections européennes de 2014 : vrai espoir de démocratie ou crainte face aux nationalistes ?

    j’ai du mal à comprendre votre propos, nous sommes loin d’adhérer au fonctionnement de l’UE actuel. Je vous conseille de lire les articles de ce site. Nous critiquons l’intergouvernementalisme actuel de l’UE et nous battons pour une Europe fédérale, démocratique et transparente au service des citoyens. Cela passe par une implication au parlement européen de la part des députés européens, objet de cet article.

  • Le 27 décembre 2013 à 03:51, par Jules En réponse à : Les élections européennes de 2014 : vrai espoir de démocratie ou crainte face aux nationalistes ?

    Mais pourquoi au juste vouloir détruire ce qu’il reste des États-nations ? L’Europe démocratique est un oxymore, car on trouve au minimum 28 ’demos’, sans compter les états divisés comme la Belgique. Chacun parle sa langue, transmet sa culture, agit selon sa manière d’appréhender le monde, tout cela issu des temps immémoriaux, choses bien méprisées par une Europe moderne de la « convergence » et de « l’intégration » et bourrée d’orgueil.

    IN FINE, qui prend la décision finale parmi ces 28 demos, sans compter les roms, les israélites et les communautés immigrées ? Les professionnels de l’Europe ? Les latins, les germains ou les anglais, selon le rapport de forces ? Les religieux juifs, via le marxisme culturel ?

    Quelque soit la réponse, il vous faudra aliéner les peuples par la subvention, par l’argent, par le divertissement, par la violence étatique et surtout juridique, à coup de directives et de décisions de la CJUE... tout standardiser, pour que tout le monde rentre dans le rang, que tout soit bien contrôlable d’en haut...

    ...mais cette aliénation commence au Parlement ! 500 cabines de traduction pour 1 milliard de budget, les nations mélangées, pour qu’on se croie égaux en tous points ! Résultat, on les voit soutenir la théorie qui pousse l’anti-racisme jusqu’à uniformiser les Auvergnats et les Roms, l’anti-sexisme qui va jusqu’à uniformiser les hommes et les femmes... et qui se trouve contredite au quotidien par l’expérience.

    Le Parlement européen est une mystification. Aucune institution élue n’est plus coupée du monde qu’elle. Spontanément rien ne fait lien dans l’Assemblée, ni la langue ni les principes sans parler de vision de l’avenir ; c’est donc et ce sera toujours le paravent de multiples combines pour les saxons, les marxistes et les chéquards. La transparence ? Mais c’est justement en son nom qu’on agrandit cette machine aux intrigues !

    Nous ne voulons pas être domestiqués, apprivoisés par une Europe qui ne sera jamais unie que dans l’aliénation. Bruxelles s’amuse à faire de nous des hommes déracinés, et il faudrait qu’on se débarrasse du libéralisme pour réclamer plus larvesquement à nos maîtres les commissaires et les eurodéputés quoi penser, quoi manger, quoi entreprendre ? où étudier, où travailler, où vivre ? mais de quel droit ? pourquoi eux et pas quelque unité plus proche de nous ?

    Il est temps de faire tomber de leur piédestal tous ceux qui rejettent leur nation par snobisme et feignent ou ignorent les conséquences catastrophiques de ce pari de Pascal !

  • Le 28 décembre 2013 à 08:26, par Morin Michel En réponse à : Les élections européennes de 2014 : vrai espoir de démocratie ou crainte face aux nationalistes ?

    J’espère que le seconde partie de l’article a levé une partie des malentendus ou des incompréhensions que je découvre dans les commentaires de Emmanuel Lunda et d’Aurélien Brouillet. C’est sur le socle d’un combat pour une Europe Fédérale que mon analyse est construite. Décrire des menaces périlleuses pour la démocratie que font peser les néo-nationalismes sur le Parlement européen et le fonctionnement de l’Union n’est pas cautionner l’inter-gouvernementalisme comme système. Ou alors il faut m’expliquer la logique ...D’autre part mon espoir de voir naître une expression profondément progressiste au sein du fédéralisme européen est bien convergente avec un refus du libéralisme économique qui domine les politiques en Europe. Se référer à la seule Europe fédérale sans des contenus économiques et sociaux, vielle antienne, ne permettra pas de créer l’adhésion populaire en faveur de l’union politique de l’Europe. L’enjeu urgent est à mon avis de dresser quelques digues face aux dérives réactionnaires qui enflent.

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