Opinion. Une autre politique migratoire est indispensable, en France comme en Europe

, par Volt France

Opinion. Une autre politique migratoire est indispensable, en France comme en Europe
Photo de Miko Guziuk (©Unsplash)

Ces dernières années semblent avoir convaincu les Européens que nous sommes condamnés à poursuivre une politique toujours plus restrictive en matière d’immigration. Refuser ce postulat est une position courageuse, qui ne fait cependant pas avancer le débat en l’absence de propositions concrètes. Volt propose une alternative politique.

Un renforcement de l’arsenal législatif justifié ?

La loi immigration, adoptée en 2023, constitue le 119ᵉ texte législatif adopté en la matière depuis 1945. Souvent justifiées par la volonté de « répondre aux peurs des Français », ces lois toujours plus répressives ont pourtant objectivement échoué à atteindre cet objectif. Le Rassemblement national est aujourd’hui, et de loin, le premier parti de France, alors même que ses propositions en matière migratoire ont progressivement imprégné l’action politique des formations de droite et du centre.

À l’échelle européenne, le Pacte Asile et Migration, adopté en 2024, marque l’aboutissement d’un long parcours législatif. Si le texte affirme timidement le principe de solidarité entre États membres, il confirme surtout un virage sécuritaire dans la gestion des flux migratoires, symbolisé notamment par l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, Frontex. La majorité actuelle au Parlement européen risque d’amplifier cette dynamique, alors qu’une révision de la directive « retour » pourrait faire son retour à l’ordre du jour.

Un débat public polarisé

Il est donc urgent de changer de paradigme. Cela suppose d’abord de comprendre pourquoi l’immigration est devenue un tel point de crispation politique en France. Trop souvent, elle est réduite à des slogans anxiogènes ou mensongers : « frontières passoires » (Fabien Roussel), sentiment de « submersion migratoire » (François Bayrou), ou encore « L’immigration n’est pas une chance pour la France » (Bruno Retailleau). Derrière ces formules, il faut rappeler quelques faits simples.

L’immigration recouvre plusieurs réalités : droit d’asile, immigration de travail, études, regroupement familial. Les données du ministère de l’Intérieur ne pointent aucune « vague migratoire », mais une hausse progressive du nombre de personnes immigrées, une part encore inférieure à celle observée chez la plupart de nos voisins européens. La France est même le pays d’Europe occidentale où la proportion d’étrangers est la plus faible après l’Italie et le Portugal.

Des politiques pompiers pyromanes

Quant à la supposée crise de l’immigration illégale, elle est en grande partie fabriquée par les politiques elles-mêmes : distribution quasiment automatique des OQTF (obligations de quitter le territoire français), durcissement des conditions de régularisation, allongement des délais pour l’obtention ou le renouvellement des titres de séjour. La précarité administrative devient ainsi un outil de dissuasion, au prix de violations des droits et d’une inefficacité chronique.

L’autre postulat souvent avancé — il y aurait « trop d’immigrés » — est une affirmation purement politique, que nous rejetons. La réalité, c’est que la France manque de bras. Le vieillissement de la population et la diminution du nombre d’actifs exigent une politique migratoire plus ouverte, en particulier pour le travail. Nous devons aussi attirer davantage d’étudiants et de talents internationaux si nous voulons rattraper nos concurrents dans les technologies d’avenir et garantir notre prospérité future.

Et surtout, il est inacceptable de conditionner le droit d’asile à des considérations électorales. La France est loin d’avoir assumé sa part dans l’accueil des réfugiés syriens et ukrainiens au regard de sa richesse et de ses capacités, contrairement à certains de ses voisins.

Afin de répondre à la supposée « demande de fermeté » des électeurs, les gouvernements ont engagé des politiques toujours plus répressives, alors qu’elles n’ont jamais produit les effets escomptés. À titre d’exemple, plusieurs pays européens procèdent à des contrôles à leurs frontières sur les axes de transports, destinés à illustrer leur politique de fermeté. Mais cela ne produit aucun effet substantiel, si ce n’est de créer des bouchons et perturbations de trafic aux points de contrôle. Pendant ce temps, le véritable problème sous-jacent qui est celui de la gestion des étrangers en situation irrégulière dans l’espace Schengen n’est même pas effleuré.

Alors, quelle alternative ?

Volt défend une politique fondée sur un principe simple : l’immigration en elle-même n’est ni un problème à résoudre, ni un phénomène qu’il faudrait contenir pour satisfaire un fantasme de la « France d’avant ». L’immigration continuera toujours d’exister, indépendamment de la volonté politique. Notre rôle est de l’organiser intelligemment pour en faire une chance — pour les migrants et pour nos sociétés, ainsi que de répondre aux problématiques existantes.

Cela suppose une révolution du cadre existant, qui a échoué à répondre aux crises, à gérer efficacement les frontières et à garantir les droits des personnes. Il ne s’agit pas de faire « plus d’Europe », mais d’assumer une gestion pleinement fédérale d’un sujet qui, de fait, dépasse les frontières nationales, en particulier dans l’espace Schengen.

Nos propositions s’articulent autour de trois piliers :

1. Une gestion européenne du droit d’asile : Dans le cadre de la libre circulation des personnes, toute demande d’asile devrait être instruite à l’échelle européenne par un guichet unique. La solidarité entre États membres dans l’accueil des demandeurs d’asile doit devenir la norme : les pays en première ligne comme l’Italie, la Grèce ou la Pologne ne peuvent pas porter seul cette responsabilité.

2. La fin du tout-OQTF : les obligations de quitter le territoire doivent être ciblées sur les cas réellement problématiques. Les départs volontaires doivent être encouragés en respectant la dignité des personnes. En parallèle, Frontex doit évoluer vers une véritable agence fédérale de gestion des frontières, sous contrôle du Parlement Européen et dans le respect des droits fondamentaux.

3.Un cadre harmonisé pour l’immigration de travail : L’Union européenne doit faciliter la venue et la mobilité des travailleurs étrangers en son sein. Cela passe par la simplification des procédures, la reconnaissance des compétences, des diplômes et une approche coordonnée des besoins en main-d’œuvre entre les États membres.

Le débat public, en France comme en Europe, reste largement dominé par les discours de la fermeture des frontières. Les partis de gouvernement refusent de regarder la réalité en face : la lutte contre l’immigration ne constitue pas une politique à même de répondre aux besoins économiques ainsi qu’aux défis démographiques. Pire, cela produit l’effet inverse : hausse du nombre de personnes en situation irrégulière, perte d’attractivité pour les talents étrangers, mise en péril de notre modèle social. La délégation de la gestion de nos frontières à nos voisins nous place en situation de dépendance. Que se passerait-t-il si jamais l’Egypte ou la Turquie plongeaient dans une guerre civile ? Nous serions alors confrontés à une crise d’une ampleur sans précédent, car nous comptons justement sur ces États pour assurer la sécurité de nos frontières. C’est pourquoi l’Europe doit désormais se responsabiliser en matière de politique migratoire.

Les gouvernements successifs s’enferment dans une logique répressive, inefficace et coûteuse. Il est temps d’oser une autre voie, fondée sur la vérité des faits et le courage politique. C’est tout l’objet du Livre blanc de Volt France, publié le 16 juillet 2025.

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