En Pologne aussi, c’est le début des vacances. Probablement, le gouvernement de Beata Szydlo (PiS) considère que le moment est bien choisi pour faire adopter une nouvelle loi, sans grande attention du Parlement. La réforme de la justice fait pourtant débat et prévoit une réorganisation du Conseil national de la justice (Krajowa Rada Sądownictwa) et de la Cour suprême (Sąd Najwyższy), la deuxième plus importante cour de justice après la Cour constitutionnelle.
Mercredi 12 juillet, la majorité gouvernementale adopte un projet de loi sur le Conseil national de la justice. Jusqu’à présent, ce dernier est chargé de veiller à l’indépendance des tribunaux et de choisir les candidats pour les postes de juge. Avec l’entrée en vigueur de la loi nouvellement présentée, ce même Conseil national de la justice doit être dissout sous 30 jours. Pour la nouvelle composition du Conseil, ce seront pour moitié des candidats élus par la Diète polonaise (Sejm) et pour autre moitié nommés par le Président. Ainsi, le PiS aurait les mains libres pour placer ses candidats.
Jeudi 13 juillet, un nouveau projet de loi est présenté devant le Parlement, projet qui signifie de facto le démantèlement de la Cour suprême. Avec l’entrée en vigueur de la loi, les juges de la Cour suprême devraient être envoyés à la retraite, à l’exception de ceux nommés par le ministre de la justice. En outre, la Cour suprême devrait être subdivisée en trois chambres distinctes.
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— DziennikGazetaPrawna (@DGPrawna) 13. Juli 2017
« Division tripartite du pouvoir » – Titre du 14 juillet 2017 du magazine polonais Gazeta Prawna. Sur la couverture, le chef du parti PiS, Jaroslaw Kaczynski.
En 2015 déjà, quelques semaines après sa prise de fonction, le gouvernement du PiS décidait une refondation de la Cour constitutionnelle et le remplacement des juges. A l’époque aussi, les projets de lois étendus ont été adoptés en procédure accélérée par les deux chambres du Parlement, et partiellement promulgués par le chef de l’Etat le soir même. Les anciens Présidents de la Cour constitutionnelle s’expriment désormais dans une lettre ouverte. Ils avertissent du danger d’une révision constitutionnelle de fait et voient les droits et les libertés des citoyens en péril.
Dès que le chef de l’Etat Duda contresignera la loi, elle aura valeur contraignante. Le porte-parole du Président a annoncé que Duda ferait vérifier la constitutionnalité du texte. C’est assez inhabituel qu’un projet de loi de cette ampleur n’ait pas donné lieu à une consultation avec le chef de l‘Etat en amont.
Le chef de file du Parti populaire européen (PPE), Manfred Weber, a déclaré qu’au vu de la réforme de la justice en Pologne, une « ligne rouge a été dépassée en matière d’Etat de droit ». Des conséquences directes ne sont pas exclues. Une procédure de « sauvegarde de l’Etat de droit » est déjà en cours à l’égard de la Pologne, ce qui peut aboutir au déclenchement de l’article 7 du Traité de l’Union européenne [3]. Si le droit de vote au Conseil de l’UE peut lui être retiré, il est toutefois peu probable que la procédure aboutisse puisqu’elle requiert l’unanimité des pays membres et que la Hongrie pourrait menacer de son véto. La suspension des aides européennes ne serait quant à elle possible qu’à partir du budget 2021.
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