Un accord commercial sino-européen pour la fin de l’année ?
La pandémie du coronavirus a laissé des traces dans les esprits des européens, notamment en ce qui concerne leur rapport à la Chine. Au fil des pénuries en matériel sanitaire, la dépendance de nombreux États-membres des importations chinoises a éclaté au grand jour. La République populaire est devenue un partenaire commercial incontournable pour l’UE, un partenaire cependant très enclin à protéger son marché. Les entreprises étrangères installées sur son sol sont en effet encore et toujours confrontées à de nombreuses barrières commerciales. Dans ce contexte économique déséquilibré, la méfiance envers la Chine n’a fait que croître et il devenait urgent pour l’Union Européenne de « faire valoir ses intérêts ».
Les négociations ont commencé bien avant les premiers cas de coronavirus. Depuis 2013, des équipes européennes tentent de trouver (difficilement) un accord avec les Chinois. Au centre des débats se trouve l’accord bilatéral d’investissement qui devrait garantir des échanges commerciaux réciproques et plus équilibrés entre la Chine et l’Union européenne. La présidente de la Commission européenne a toutefois signalé que des avancements concrets ont été réalisés. Un accord essentiel sur les indications géographiques a ainsi été trouvé à l’issue du sommet. Et Mme von der Leyen de se laisser aller à l’optimisme : bien que « beaucoup reste encore à faire », un accord bilatéral pourrait être signé avant la fin de l’année 2020 - à la condition que la Chine montre sa « volonté de continuer les négociations et de parvenir à un accord ».
Les valeurs européennes à l’épreuve des intérêts économiques et commerciaux
La balle semble donc être dans le camp de l’Empire du milieu. Et pour cause, l’Union européenne, forte d’un modèle démocratique exigeant, ne peut cloisonner ses intérêts économiques et ses valeurs. Cela pousse deux jours plus tard Ursula von der Leyen à présenter la Chine comme un « partenaire de négociation, un concurrent économique et un rival systémique » ... Comment négocier avec un tel adversaire ? Angela Merkel propose une stratégie très progressive de « réponses millimétrées (Millimeterlösungen) », qui devrait permettre ultimement à l’Union d’affirmer ses valeurs tout autant que ses intérêts. L’envoi d’observateurs européens dans les provinces ouïghoures à l’ouest du pays, évoquées dans des accusations de graves violations des droits les plus fondamentaux, a notamment été évoqué.
Mais cela sera-t-il suffisant ? Les réponses « millimétrées » ont une portée bien courte lorsque l’on considère le bras décidément très long de Pékin, qui n’hésite pas à frapper Hong Kong, Taïwan, ou les provinces du Xinjiang et du Tibet au mépris des règles internationales. En s’engageant dans cet accord, l’Union Européenne cherche à concilier commerce et valeurs, ce qui est loin d’être évident, d’autant plus que la visite du président du Sénat tchèque à Taïwan a fait monter la moutarde au nez de Pékin.
Devant l’ampleur de la tâche, Angela Merkel a salué la capacité de l’Union à parler d’une seule voix face à la Chine. Les conditions très particulières de ce sommet ont en effet obligé la chancelière allemande à s’exprimer au nom des 27, une « étape importante sur le chemin de l’établissement d’une politique extérieure commune pour les partenariats stratégiques » estime-t-elle. Consciente cependant que cette rencontre ne suffira pas pour parvenir à un accord, Angela Merkel a annoncé la tenue d’un sommet en présentiel rassemblant les vingt-sept dirigeants européens et le président chinois « dès que la pandémie le permettra ». Affaire à suivre donc...
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