Sur la route du Danube, ou l’Europe à rebrousse-poil

, par Charles Coudoré

Sur la route du Danube, ou l'Europe à rebrousse-poil
Votre vélo vous manque ? Evadez-vous dans une lecture. Image : Badahos / Shutterstock

En recherche d’évasion, il est des lectures à même de nous emmener hors de nos murs de confinement. Sur la route du Danube est une invitation au voyage et à la redécouverte de notre continent européen. A vélo, pendant 4000km, l’auteur Emmanuel Ruben, accompagné de son ami Vlad, suit le Danube, depuis son delta en Ukraine, jusqu’à sa source à la Forêt-Noire allemande et partage son regard sur cette artère européenne sans frontières, lieu de naissance de nombreuses capitales et parcourant cette Europe des confins.

Optant ainsi pour une remontée à contre-courant, l’auteur témoigne dans son roman sa longue traversée géographique, et qui se révélera également temporelle, culturelle, linguistique le long de cette artère de l’Europe. « La plupart des voyageurs danubiens vont de la source à l’embouchure, convaincus qu’il faut toujours se diriger vers la mer (…) je voulais remonter le Danube dans le sens des invasions barbares et des grandes migrations, je voulais caresser l’Europe à rebrousse-poil », écrit Emmanuel Ruben.

Au fil des rencontres comme celle de Viktor, batelier à Vilkovo, l’auteur nous offre un regard sur ces villes - frontières aux multiples histoires : « Vilkovo a été successivement une possession turque, russe, roumaine, soviétique puis ukrainienne ». Mais aussi sur ces populations vivant au rythme des eaux du fleuve : « Lorsqu’il a une petite soif, Viktor se contente de puiser dans le creux de sa main l’eau fluviale (…) – j’ai bu toute ma vie cette eau qui provient de tous les pays d’Europe ».

Une critique du « Reich de Schengen »

Du Danube à l’état sauvage, source à la fois de visions de friches industrielles roumaines, ou d’arrestations de migrants aux bords de la Hongrie, nous découvrons de très beaux et forts passages lorsque la route amène l’auteur aux frontières serbo-croates, évoquant les conflits, encore récents, dans les Balkans dans les années 90.« Dans la nuit balkanique qui tombe toujours aussi vite, il est inutile de rechercher l’âme meurtrie de Vukovar, hier un des fleurons de l’Autriche-Hongrie et de la Yougoslavie (…) je suis bien forcé de constater qu’une guerre totale comme celle qui fut livrée dans les parages peut priver un lieu de tout génie », comme l’analyse l’auteur à l’arrivée dans la ville croate de Vukovar, profondément meurtrie et toujours victimes des relents nationalistes entre serbes et croates.

Au contact de ces souvenirs, et expériences, l’auteur débouche finalement sur une critique très personnelle, malgré tout non dénuée d’arguments, de l’autre Europe, institutionnelle, « le Reich de Schengen » selon ses mots, que nous vivons dans notre partie ouest géographiquement parlant, et qui l’amène à regretter cet éloignement des peuples, notamment nomades, et des valeurs réelles qui devraient traverser le continent, tutoyant un certain style pamphlétaire qui pourra enrichir la réflexion sur les politiques européennes du futur. Ou à pousser le lecteur à prendre lui-même son vélo et tenter cette aventure et découvrir de ses propres yeux cette Europe du Danube.

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