À l’occasion du 100e anniversaire du massacre des Arméniens, le président du Bundestag, Norbert Lammert, a, en tant que représentant du Parlement allemand, qualifié ces actes de génocide. Le gouvernement fédéral a également fait mention de ce terme dans une déclaration commune des deux partenaires de coalition (CDU-CSU et SPD). À cela s’ajoute une phrase du président fédéral, Joachim Gauck, qui avait qualifié de « génocidaire » l’extermination massive des Arméniens dans un discours.
Une approche prudente
Une telle accusation paraît encore délicate pour l’Allemagne, qui en raison de son passé et des actes du régime national-socialiste ne se sent pas à même de dispenser des remontrances morales. Par la reconnaissance de la coresponsabilité de l’Empire allemand dans ce massacre, Gauck et Lammert ont tenté de limiter de telles appréhensions. Les deux hommes politiques se sont évidemment efforcés de ne pas détériorer plus que nécessaire les relations avec un allié de l’OTAN, la Turquie. Il est peu surprenant qu’aucun incident diplomatique d’envergure n’ait éclaté entre l’Allemagne et la Turquie sur ce point. En revanche, en Autriche, l’ambassadeur de Turquie avait été rappelé à Ankara à la suite de déclarations similaires du Parlement autrichien.
Erdoğan contre-attaque
Le président de la République turque, Recep Tayyip Erdoğan, a fait de la critique des déclarations allemandes une affaire d’État. Sur les chaînes de télévision turques, il a lancé une offensive tous azimuts : « le discours de Gauck repose sur les “mensonges arméniens” et, de plus, l’Allemagne devrait en premier lieu se remémorer sa propre histoire. » Erdoğan oublie que cette démarche introspective est résolument liée à un repentir profond et qu’elle fait désormais partie intégrante de l’identité allemande. Il néglige par la même occasion les déclarations de certains députés du Bundestag, qui soutiennent le processus de réconciliation turco-arménien. Mais il ne s’en est pas pris qu’à l’Allemagne, il a également critiqué la France, la Russie, les États-Unis et l’Union européenne qui ont fait usage de la notion de génocide lors des commémorations.
Crimes et châtiments
À la suite de ces critiques acerbes, Erdogan se retrouve isolé sur la scène internationale. Cela fait des années qu’il repousse avec acharnement toute responsabilité dans le massacre des Arméniens et qu’il a recours à une tactique bien rôdé : s’offusquer des crimes historiques d’autres États et les confronter à leur propre culpabilité. Qualifier les crimes commis en Arménie de génocide ne revient en aucun cas à critiquer le gouvernement turc actuel. De même, que cela n’affecte que très peu, voire pas du tout, la politique du gouvernement allemand actuel de qualifier les crimes allemands sous le régime nazi d’holocauste. À l’inverse renier cet état de fait est punissable. Jusqu’ici, Ankara hésite encore – plus de 100 ans après avoir rejeté les faits pour la première fois – à endosser la responsabilité morale de ces crimes. Les raisons financières jouent certainement un rôle ici puisque le gouvernement turc redoute de se voir réclamer des indemnisations. Tout cela ne change rien au fait que la Turquie en tant qu’État successeur de l’Empire ottoman devra tôt ou tard faire face à son histoire.
1. Le 12 juin 2015 à 10:06, par david En réponse à : Un génocide est un génocide
que c’est triste et grotesque, cette propension absurde des politiques à vouloir « juger » l’histoire, à vouloir se transformer en ce qu’ils ne seront jamais, c’est à dire des bouches de vérité (et c’est tant mieux, car la croyance en une vérité vraie en politique mène généralement à la dictature et au totalitarisme). Croyez le ou non, mais vote ou pas vote de reconnaissance, je continuerai, à l’instar des gens raisonnables, à écouter les historiens plutôt qu’un parlement, allemand ou autre, lorsque je souhaiterai avoir un avis sur tel ou tel événement historique. Étonnant non ?
2. Le 12 juin 2015 à 21:48, par Jean-Luc Lefèvre En réponse à : Un génocide est un génocide
Et vous aurez raison, David, de toujours accorder votre confiance aux historiens. Pas de politiquement correct en matière de recherche historique, ce qui agace les « politiques » ! Pas davantage de prescription en histoire, ce qui agace les juristes !
3. Le 19 juin 2015 à 20:54, par Henri En réponse à : Un génocide est un génocide
Certes, il n’est pas souhaitable que l’Histoire connaisse une version étatique officielle. Mais quelle autre solution, pour contrer un négationnisme organisé et financé par un autre État puissant, et peu scrupuleux ? Vous semblez croire que les historiens sont tous irréprochables ; néanmoins, certains se sont laissés influencer par ce négationnisme d’État, moyennant financement de leurs travaux de recherche... Finalement, les historiens sont comme les autres professions : il y en a des honnêtes, et des moins honnêtes.
4. Le 20 juin 2015 à 01:00, par Tony En réponse à : Un génocide est un génocide
Le génocide des Arméniens est reconnu par l’ensemble des historiens.... il ne manque plus qu’à la Turquie de se regarder dans un miroir !
5. Le 21 juin 2015 à 15:41, par tnemessiacne En réponse à : Un génocide est un génocide
@ Henri
Pour moi l’histoire est beaucoup trop spéculative, basé sur rien. On pense que l’on sait déjà tout mais les moindres choses simples sont noyés dans la spéculation. Je vais peut-être choquer mais en littérature et en histoire sur 40 livres il y en a 4 qui apportent quelque chose, pour la mémoire à long terme.
Il faudrait plus d’émulation saine. Et je suis d’accord dans les secteurs d’activités il y a des fourbes, mais l’excellence basé sur l’honnêteté permet de créer des universités plus honnêtes. Les enjeux européens c’est de créer une certaine concurrence entre universités, mais la concurrence actuelle de masse est faussée. Pourquoi ne pas créer des universités dans les sciences humaines de pointe mais en redéfinissant l’excellence. Pourquoi à l’école ne pas faire apprendre par coeur dix dates par mois au lieu de spéculer sur le changement des mentalités.
Pareil en anglais dix mots par mois sera plus simple pour avancer.
Et pourquoi, ne pas créer des boulots ouverts à tous pour écrire des articles, basés sur la redéfinition de l’excellence ou plutôt de la normalité. Avec une méthodologie claire. C’est également l’enjeux des classement internationaux basés sur les AAA, AA A+ ect...
D’ailleurs se serait intéressant de savoir quels sont les critères précis de ces classement.
Le travail universitaire de qualité, tout le monde peut le faire, il faut juste faire un certain effort pour citer les sources et les reformuler.
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