Une perte des deux côtés : les nouvelles règles sur l’immigration au Royaume-Uni

, par Heather Barrigan, traduit par Jérôme Flury, traduit par Noémie Chemla

Une perte des deux côtés : les nouvelles règles sur l'immigration au Royaume-Uni
Pikist, Free Photos

Depuis la révélation par le Royaume-Uni de son nouveau système d’immigration à points en juillet, les discussions ont été intenses à propos des nouvelles règles et de leur futur effet quand celles-ci entreront en fonction le 1er janvier 2021. Les demandes de visa sous les nouvelles règles post-Brexit ont ouvert il y a peu. Un article du Grand format européen de décembre 2020 sur le Brexit

Depuis la révélation par le Royaume-Uni de son nouveau système d’immigration à points en juillet, les discussions ont été intenses à propos des nouvelles règles et de leur futur effet quand celles-ci entreront en fonction le 1er janvier 2021. Les demandes de visa sous les nouvelles règles post-Brexit ont ouvert il y a peu.

La liberté de circulation entre le Royaume-Uni prendra fin le 31 décembre 2020, et les citoyens de l’UE et hors-UE seront traités de la même manière, ce qui implique que les citoyens européens souhaitant travailler au Royaume-Uni auront à rencontrer plus d’obstacles qu’auparavant. Alors que les citoyens nés dans l’Union européenne représentent 38% des immigrés au Royaume-Uni en 2019, il est évident que cela aura des conséquences importantes à la fois pour ceux qui vivent déjà au Royaume-Uni mais également pour ceux qui souhaitent en faire de même à l’avenir. Les citoyens irlandais sont exemptés de ces règles.

Les citoyens européens vivant au Royaume-Uni avant le 31 décembre n’auront pas à passer par ce nouveau système, mais peuvent à la place déposer une demande afin d’obtenir le statut de résident permanent jusqu’au 30 juin 2021. S’ils sont acceptés, ils pourront rester au Royaume-Uni et obtenir les mêmes aides que les citoyens britanniques s’ils perdent leur emploi.

Le ton de la majorité des conversations concernant les nouvelles lois sur l’immigration au Royaume-Uni a été négatif, alors que les experts revenaient sur les conséquences néfastes à la fois sur l’économie du Royaume-Uni comme sur la diminution des possibilités à la fois pour les migrants vivant actuellement au Royaume-Uni comme pour ceux qui espéraient travailler et étudier dans le pays.

Droit du travail

Sous le nouveau régime, les travailleurs de l’Union Européenne devront faire une demande de visa pour pouvoir travailler au Royaume-Uni. Ils devront gagner des “points”, et auront le droit de travailler au Royaume-Uni au bout de 70 points. Ces points se gagnent grâce à certaines compétences ou qualifications : par exemple, savoir parler anglais vaut 10 points, obtenir une offre d’emploi pour un salaire supérieur à un seuil de 20 480£ vaut 20 points…

Cela signifie qu’il deviendrait très difficile pour les travailleurs dits “peu qualifiés” (le ministère de l’Intérieur a été fortement critiqué pour son usage de ce terme afin de décrire les travailleurs ne remplissant pas le critère salarial, bien que cette tranche inclue le personnel soignant et une partie des infirmières - deux professions dont les effectifs manquent au Royaume-Uni) de gagner le droit de travailler dans le pays.Leur unique option serait alors de demander des visas de courte durée, par exemple dans le cadre des programmes “mobilités jeunes” ou “agriculture saisonnière”.

Ce système pourrait largement faciliter l’exploitation de migrants, en leur offrant des contrats zéro heure précaires ; les travailleurs migrants risquent d’être moins enclins à dénoncer un employeur malhonnête ou à quitter leur travail, de peur de perdre leur statut migratoire ; les travailleurs sans papiers, quant à eux, n’auront quasiment plus aucun droit.

En outre, le ministre de l’Intérieur britannique a reconnu que ses nouvelles règles en matière de visas pourraient conduire à des discriminations contre les travailleurs handicapés, puisque les travailleurs “immigrants de niveau 2” se verront refuser les aides sociales et les allocations, comme l’aide au logement par exemple, tant qu’ils ne seront pas résidents britanniques. Selon l’agence gouvernementale, “il est possible que les personnes handicapées dépendantes des aides gouvernementales pour leur vie quotidienne ne puissent plus bénéficier des voies d’immigration britanniques ou de certaines d’entre elles”

Afin d’assurer la sécurité des travailleurs immigrés, il faudra que les employeurs encouragent tous les salariés à demander la citoyenneté britannique, qui ne peut être accordée qu’à des travailleurs résidant au Royaume-Uni depuis au moins trois ans avec un statut de résident permanent ou un permis de séjour illimité.

Manque de main d’oeuvre

Les nouvelles règles vont empêcher les chefs d’entreprises britanniques de recruter des travailleurs européens sans devenir une “sponsor licence”, c’est-à-dire, en obtenant les autorisations nécessaires. Cela va avoir des conséquences pour diverses entreprises mais aussi de grandes organisations publiques comme la NHS (Le système de sécurité sociale britannique) qui fait déjà face à un manque d’effectif médical dans la crise actuelle, avec plus de membres qui partent ou prennent des congés à cause du stress ou la maladie.

Le comité consultatif sur l’immigration a conseillé au gouvernement d’ajouter les postes d’auxiliaires et assistants infirmiers à la liste des postes en manque. Une mise à jour récente a également indiqué qu’il existait un besoin conséquent de bouchers, soudeurs et maçons, comme pour de nombreux autres postes.

Le gouvernement a lancé une campagne pour aider les entreprises à travers le pays à se préparer avant que les modifications prennent effet. Cette campagne comprend des plans pour les scientifiques, universitaires, actionnaires, entrepreneurs et plus encore. Malgré cela, elle manque d’inclure les travailleurs peu qualifiés. C’est pourquoi il existe maintenant des experts du travail qui proposent leurs services pour aider les entreprises existantes à rester en ordre avec les nouvelles règles.

La population étudiante en baisse

L’introduction d’un système de points va avoir des conséquences négatives pour les universités puisque le nombre d’étudiants internationaux va baisser. Actuellement, ils représentent 19,6% de l’ensemble des étudiants dans le pays, un taux qui monte jusqu’à 35,8% pour les études supérieures. Cela ne va pas seulement avoir un impact pour les universités mais également un effet négatif sur l’économie.

Une fois le système à points mis en œuvre, les étudiants venant d’Union européenne devront candidater à un visa étudiant et pour être éligible, ils doivent obtenir au moins 70 points. Cette nomenclature inclut 50 points sur la confirmation d’acceptation pour les études, qui doit être renseignée sous la forme d’un courrier ou d’une confirmation par email de la part de l’Université concernée. Dix points sont aussi nécessaires à propos des moyens financiers, ce qui passe par la preuve que les étudiants peuvent payer les frais de scolarité, le logement et les frais d’entretien. 10 points encore sont remis pour la preuve de compétences langagières en anglais, qui est nécessaire pour n’importe quel étudiant originaire d’un pays non anglophone, qui doit atteindre le niveau B2 du cadre commun européen.

Alors que ces inconvénients pourraient avoir des conséquences négatives pour les entreprises à travers le Royaume-Uni, il existe de nombreuses organisations oeuvrant dans l’objectif de préparer les compagnies aux nouvelles règles, comme des avocats spécialistes de l’immigration.

Les conséquences pour l’Union européenne

Tout comme pour chaque résident de l’UE vivant actuellement au Royaume-Uni, les Britanniques qui habitent actuellement au sein de l’Union européenne vont devoir faire une demande de statut de résident dans le pays où ils vivent avant le 30 juin 2021. Cependant, le 28 septembre 2020, l’UE a confirmé que plusieurs Etats membres pourraient prolonger ce délai à cause de la pandémie. Les conditions précises de l’accord dépendent des pays de l’UE et chaque Etat membre a la responsabilité de mettre en place un plan d’accord. Les citoyens des pays de l’UE peuvent voyager vers le Royaume-Uni sans visa, ainsi l’Union européenne a ajouté le Royaume-Uni à la liste des 61 pays exemptés de visa afin de laisser le voyage entre l’UE et le Royaume-Uni relativement simple, à condition que le séjour soit inférieur à 90 jours.

Le droit automatique pour les résidents britanniques de vivre et travailler dans l’UE s’arrête après la période de transition. Après cela, les citoyens doivent candidater selon les règles en matière d’immigration, selon le pays dans lequel ils se rendent. Les personnes qui souhaitent travailler au sein de l’UE après la période de transition devront s’assurer que leurs diplômes sont reconnus dans l’Union européenne.

Si les modalités de voyage entre le Royaume-Uni et l’Union européenne demeurent relativement inchangées, le nouveau système de points a donné lieu à de nombreuses difficultés et des zones grises en matière d’emploi pour les citoyens européens au Royaume-Uni et vice-versa, faisant là de la perte de la liberté de mouvement une autre conséquence conséquence sombre du Brexit.

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