Un appel au secours des réfugiés et des persécutés
Hier, dans sa prière « urbi et orbi », le pape a rappelé son soutien aux chrétiens d’Orient et aux réfugiés de Daech. Alors que les combattants kurdes sont la principale force d’opposition à l’Etat islamique, les familles irakiennes et syriennes déplacées demeurent sur les routes, se réfugiant dans les pays voisins. L’afflux de ces hommes, de ces femmes et de ces enfants croît et l’aide humanitaire tarde à parvenir à ces réfugiés. Il y a quelques jours, c’était Jean d’Ormesson qui avait appelé les gouvernements à combattre Daech].
Le pape a élargi son appel à l’ensemble des réfugiés et déplacés, condamnant les persécutions à travers le monde et déclarant : « nos frères et sœurs d’Irak et de Syrie qui, depuis trop de temps, souffrent des effets du conflit en cours et, avec ceux qui appartiennent à d’autres groupes ethniques et religieux, subissent une persécution brutale ». C’est le secours à ces personnes qu’il réclame dans le respect de la dignité humaine.
Il a également eu quelques mots pour les Ukrainiens, les appelant à trouver « un nouveau chemin de fraternité et de réconciliation ». Sur fond de tensions internationales, les Ukrainiens principalement orthodoxes, mais certains catholiques de rite byzantin, célèbreront Noël le 7 janvier prochain dans la tourmente de la guerre civile se poursuivant à l’Est, malgré la stabilisation du pouvoir à Kiev à la suite des dernières élections présidentielles et législatives.
Enfin, il a émis une pensée particulière aux 141 victimes pakistanaises, dont 132 enfants scolarisés, tuées à la suite de l’attaque par les Talibans dans une école à Peshawar, le 16 décembre dernier. Cet attentat a bouleversé le pays et la communauté internationale, qui aujourd’hui encore portent le deuil de ces défunts.
Une bénédiction des médiateurs de paix entre Israéliens et Palestiniens
C’est ensuite la Palestine que le pape a tenu à évoquer, terre de la naissance du Christ, terre de conflits aujourd’hui. Il a prôné le dialogue et à prier pour les intermédiaires de paix entre les Israéliens et les Palestiniens, ceux qui œuvrent au quotidien pour que les combats cessent et que le dialogue se noue. « Puisse le Seigneur ouvrir les cœurs à la confiance et donner sa paix à tout le Moyen-Orient, depuis la Terre bénie de sa naissance, en soutenant les efforts de ceux qui s’engagent efficacement pour le dialogue entre Israéliens et Palestiniens », a-t-il clamé.
Les chrétiens, nombreux dans la région et de diverses confessions, ont également accueilli le message du patriarche latin de Jérusalem dans son homélie de Noël. Fouad Twal, patriarche latin de Jérusalem, a rappelé le conflit qui a dévasté une nouvelle fois Gaza cette année : « Nous avons vécu, il y a quatre mois, une troisième guerre consécutive sur Gaza qui a laissé des deux côtés des milliers de victimes ». Déplorant l’impasse du dialogue israélo-palestinien et les conséquences désastreuses du conflit, empêchant tout dialogue et cristallisant les positions des deux partis, Fouad Twal a dressé le portrait de la situation actuelle : « le peuple israélien continue à vivre dans la crainte, et l’insécurité, tandis que le peuple palestinien continue à réclamer son indépendance et sa liberté, et Gaza attend d’être reconstruite pour la troisième fois », a-t-il décrit.
Il a ensuite formulé deux souhaits urgents pour la Terre sainte : « Le premier pour la reconstruction de Gaza et l’humanisation des conditions de vie de ses habitants. Le deuxième, toujours de nature humanitaire, concerne la vallée de Crémisan, menacée d’être engloutie par le tracé d’un mur qui risque de séparer de leurs terrains 58 familles palestiniennes chrétiennes de Beit Jala. Ces familles perdront l’accès direct à leurs propriétés. Au nom de la justice et de l’éthique, je demande aux responsables politiques d’empêcher ce mur. »
En effet, ce dernier appel fait suite à la lettre émise en avril dernier par les chrétiens palestiniens de Beit Jala, en Cisjordanie, qui protestent contre l’élévation d’un mur dans la vallée de Crémisan, séparant Bethléem de la ville de Jérusalem. La justice israélienne a tranché en faveur du mur au nom de la sécurité, alors que le mur pourrait favoriser une nouvelle fois l’installation de colonies israéliennes en territoire palestinien. Le 26 mai dernier, lors de sa visite en Israël, le pape s’est recueilli devant ce mur, répondant à l’appel des familles palestiniennes et engageant un dialogue avec les autorités israéliennes et palestiniennes pour favoriser le retour aux négociations pacifiques. Lors de cette visite, il avait également demandé aux autorités des trois religions dites « du Livre » d’œuvrer ensemble pour la paix. Un appel renouvelé par le patriarche de Jérusalem, rappelant la « vocation universelle » de la ville trois fois sainte.
Une prière pour le continent africain
C’est enfin pour le continent africain que le pape a tenu à réserver quelques propos. Les conflits ethniques et religieux minant le continent depuis plusieurs années ne se sont pas estompés cette année, entraînant morts et désolations dans plusieurs régions. L’esclavage, le viol et les enfants soldats sont autant de réalité que le Saint-Siège tient à rappeler aux chrétiens du monde, afin que les responsables politiques agissent pour mettre fin à ces fléaux. La responsabilité politique, c’est l’un des leitmotiv du discours du pape François dans la tradition légitimiste chrétienne : « Je demande à tous ceux qui ont des responsabilités politiques de s’engager par le dialogue à surmonter les oppositions et à construire une cohabitation fraternelle durable », a-t-il souligné.
De même, il a fait appel aux dirigeants pour renforcer l’aide aux victimes de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest, une épidémie que la communauté internationale a sous-estimé d’après les derniers rapports de l’OMS. Remerciant les organisations humanitaires et les personnes mobilisées sur place pour venir en aide aux malades, il souligne la situation d’urgence dans laquelle se trouve aujourd’hui cette partie du globe : « Qu’il soit proche de tous ceux qui souffrent de maladies, en particulier les victimes de l’épidémie d’Ébola, surtout au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée. Tandis que de grand cœur je remercie tous ceux qui œuvrent courageusement pour assister les malades et leurs proches, je renouvelle une invitation pressante à assurer l’assistance et les thérapies nécessaires », a-t-il prononcé devant la foule de fidèles réunis place Saint-Pierre.
Plus d’un milliard de chrétiens sont de confession catholique autour du globe, reconnaissant l’autorité papale. Une autorité morale et spirituelle, dont la voix compte dans les dialogues internationaux. Ce message « urbi et orbi » est ainsi un rendez-vous pour de nombreux chrétiens catholiques et de nombreux observateurs, qui recueillent le message de cette autorité morale à la portée mondiale. Un message spirituel et politique qu’il convient d’analyser afin de comprendre les enjeux et les mouvances du monde actuel. C’est dans la critique de la société mondaine et de la culture de l’indifférence que le pape François a conclu son discours. Une évocation non sans résonance avec ses vœux à la Curie adressés il y a quelques jours aux membres de l’institution vaticane, gouvernement de l’Eglise, déplorant une institution sclérosée en proie à la « l’Alzheimer spirituel », à « la schizophrénie existentielle » et à la « mondanité ».
1. Le 26 décembre 2014 à 15:36, par Patrick B. En réponse à : Urbi et orbi : Les messages politiques du pape François
Je m’étonne de voir ce genre d’article sur ce site, à moins que le Pape François soit un nouvel émissaire en charge de la politique étrangère de l’UE ? Quoique.. Si c’est pour nous faire attendre les vœux de la nouvelle Commission Juncker
2. Le 26 décembre 2014 à 19:58, par Hervé Moritz En réponse à : Urbi et orbi : Les messages politiques du pape François
Le pape François tenant des propos politiques (nous ne nous préoccupons pas des débats théologiques) concernant en partie les prérogatives de l’Union européenne ou des préoccupations de cette dernière sur la scène internationale, il me semble pertinent d’analyser et d’aborder ces propos ici. Chef d’une communauté religieuse importante en Europe et dans le monde, autorité morale, et inspirant des mouvements politiques, tels que la démocratie chrétienne ou le socialisme chrétien, des mouvances majoritaires au Parlement européen, il est intéressant d’étudier les positions de la papauté. Je pense qu’il a sa place dans le débat politique, lorsqu’il parle politique, au même titre que tout leader d’un groupe social ou d’une communauté, qu’elle soit d’ordre religieuse ou d’un autre ordre.
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