La politique menée par le parti Droit et Justice
C’est un projet de loi inquiétant qui, proposé le 17 décembre 2019, marque le coup d’envoi du second mandat du parti nationaliste Droit et Justice (PiS) à la tête de la Diète. Il s’inscrit également dans une politique bien assise. En effet, bénéficiant depuis 2015 d’une majorité absolue à la chambre basse du Parlement polonais, les députés du PiS n’ont eu de cesse de réaffirmer leur politique réactionnaire, une menace qui pèse sur la pérennité des acquis démocratiques.
Le projet de loi
Le projet de loi fait suite à un arrêt de désapprobation rendu par la Cour constitutionnelle polonaise, après avis de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Ces contestations chroniques trouvent leur source dans les réformes engagées depuis 2015 par le Gouvernement sous l’autorité du président de la République Andrzej Duda. Parmi elles, la réforme des Médias devenu outil de propagande du Gouvernement, ainsi qu’une révision constitutionnelle constituant un affront direct pour les magistrats jugés être à la source du « chaos ». Le danger est réel, le Parlement est désormais compétent pour nommer les membres d’une commission judiciaire spéciale remplaçant la Cour constitutionnelle polonaise, ainsi que les membres du Conseil national de la Magistrature.
Cette réforme qui met à mal la garantie d’indépendance des magistrats ainsi que la séparation des pouvoirs étatiques a eu un fort écho au sein de l’opinion. La commission Juncker en 2017 a déclenché, mais en vain, la mise en œuvre de l’article 7 du Traité sur l’Union européenne (TUE) qui permet de prendre des sanctions allant jusqu’à la suspension des droits de vote d’un État membre en cas de violation grave et persistante des valeurs de l’UE visées à l’article 2 du TUE (dignité humaine, liberté, démocratie, égalité, État de droit, respect des droits de l’homme).
Le projet de loi adopté le 20 décembre à 233 voix contre 203 a pour but de renforcer la soumission des juges au parti de Jaroslaw Kaczynski. Ces derniers ne peuvent notamment pas remettre en cause les réformes du parti majoritaire au Parlement vis-à-vis de la hiérarchie des normes s’ils estiment fondée une violation de celle-ci. Ils ne peuvent contester la légalité de la nomination d’un juge, le Conseil national de la magistrature, les prérogatives du Président, ou encore exercer « des activités à caractère politique ». Seront sanctionnés ceux qui sont réputés « nuire au fonctionnement du système de la justice ». En bref, ils ne peuvent contredire les politiques menées par le Gouvernement sous peine de poursuites disciplinaires pouvant aller jusqu’à la radiation.
L’alliance politique avec Viktor Orbán
Le cas polonais n’est cependant pas un cas isolé. Figure du populisme centre-européen, Viktor Orbán multiplie les réformes « illibérales » qui cachent un net recul de l’État de droit. Qu’il s’agisse d’attaques contre la liberté d’expression et l’indépendance de la justice, de l’essor de la corruption ou encore de la situation alarmante sur le droit des minorités, la liste non-exhaustive des atteintes directes à la démocratie inquiète et interroge quant à la place de la Hongrie au sein de l’Union européenne.
L’échec de la tentative de mise en œuvre de l’article 7 en 2017 par la Commission européenne à l’encontre de la Pologne tient cependant à la coopération entre ces deux États. Pour que les sanctions puissent aboutir, le Conseil européen doit reconnaître à l’unanimité la violation grave et persistante des valeurs de l’Union, or, la Hongrie comme la Pologne ont indiqué ne pas voter l’une contre l’autre. Ce soutien a été réaffirmé en 2018 à l’occasion du déclenchement par le Parlement européen de la procédure susvisée à l’encontre de la Hongrie. Une nouvelle procédure contre la Pologne se heurterait également au même obstacle.
L’article 7, jamais mené à son terme, n’aurait toutefois qu’une valeur symbolique, il permet de mettre en lumière les violations répétées d’un État dissident et constitue une « forme d’humiliation » pour ce dernier. Il s’agit cependant de la sanction la plus lourde qui pèse sur les États membres de l’Union européenne. En effet, il n’est pas prévu de procédure de retrait forcé mais seulement de retrait volontaire d’un État membre, procédure inaugurée par le Royaume-Uni avec le Brexit.
Le recours en manquement
Face aux violations du droit de l’Union européenne, outre la mise en œuvre de l’article 7, est ouverte à la Commission européenne la possibilité de déclencher un recours en manquement prévu aux articles 258 à 260 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Il s’agit d’une procédure ayant pour objet de faire constater par la CJUE le non-respect par un État membre de ses obligations conventionnelles découlant de son appartenance à l’Union. Une phase pré-contentieuse (procédure d’infraction) permet au pays d’entamer une régularisation à défaut de laquelle peut intervenir une déclaration de responsabilité, purement déclaratoire. Il appartient aux autorités nationales de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux violations constatées, et seule l’inexécution ou l’exécution incomplète de l’arrêt en manquement peut donner lieu à un recours en manquement sur manquement qui ouvre à la CJUE la possibilité d’infliger à l’État des sanctions pécuniaires.
Les sanctions possibles étant uniquement pécuniaires, la Pologne n’est pas en voie de quitter l’Union européenne, et cette issue lui est favorable. En effet, sa sortie de l’Union européenne ne ferait qu’accentuer sa marginalisation et le risque serait celui d’une régression démocratique encore plus forte.
1. Le 3 février 2020 à 17:23, par Thomas En réponse à : Vers un retrait de la Pologne de l’Union européenne ?
Je trouve le titre de l’article un peu fort au final. Je pense qu’il faut prendre en compte le fait que la majorité des polonais sont bien conscients de l’apport de l’Union européenne dans leur pays. Ne serait-ce qu’en voyant le nombre important de panneaux mentionnant qu’un projet d’infrastructure a été co-financé par les fonds européens. J’ose espérer sans me tromper qu’ils s’en souviendront si un jour la question de la sortie se poserait
2. Le 9 février 2020 à 12:47, par manuel En réponse à : Vers un retrait de la Pologne de l’Union européenne ?
Il ne faut pas omettre que leur force de travail se sont les jeunes formés par l’éducation polonaise et qui partent de leur pays pour travailler dans l’UE et ils sont donc obligés d’employer des étrangers hors UE pour les remplacer. C’est pour cette raison, que la Pologne offre des permis de travail à une population hors UE. Cette pénurie de main d’oeuvre entraîne une contestation de la population qui perd sa jeunesse. Les milliards donnés par l’UE pour corrompre les gvt ne suffiront pas. On le voit avec leur dernier achat d’hélicoptères US au lieu d’investir dans la défense de l’UE. Les gvts polonais prennent l’argent de l’UE et achètent US pour que l’OTAN les protègent et non l’UE.
3. Le 11 février 2020 à 08:52, par Grange En réponse à : Vers un retrait de la Pologne de l’Union européenne ?
Bonjour. M Macron la semaine dernière est passé en Pologne. « vous exporté plus chez nous que vous importé. Je vous propose d’acheter nos armes ». Alors pensez qq vous voulez. 😠😠😠😠😠😠😠😠
4. Le 13 février 2020 à 13:56, par Jean-Michel En réponse à : Vers un retrait de la Pologne de l’Union européenne ?
Bonjour, Vu de l’intérieur (de la Pologne), un polexit relève un peu du fantasme politique. Les derniers sondages montrent que plus de 70% des polonais seraient contre une sortie et le gouvernement PIS en est conscient. Un référendum à l’anglaise reléverait d’un véritable suicide politique. PiIS assoit sa majorité, principalement sur les zones rurales de l’est de la Pologne où de nombreux agriculteurs ne surviven,t que grâce au dotations de la PAC. Les polonais sont avant out des pragmatiques politiques. Le gouvernement PIS passera comme bien d’autres régimes auparavant. Il suffit juste d’être patient mais l’opposiition devra changer son message ultra-libéral (elle a déjà commencé à lee faire). La retraite a 70 ans dans un pays à bas salaire ne séduit personne !
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